Plus-values de cession de titres : les régimes de faveur

Article écrit par (1251 articles)
Modifié le
12 300 lectures
Dossier lu 46 787 fois

Le législateur a prévu plusieurs régimes dérogatoires qui permettent de réduire la taxation de la plus-value constatée à l'occasion de la transmission d'une société.

Ces dispositifs de faveur concernent uniquement l'impôt sur le revenu (IR) et n'ont aucun impact s'agissant des prélèvements sociaux (ceux-ci demeurent dus sur le montant de la plus-value sans application d'aucun abattement quel qu'il soit).

Abattement renforcé en cas cession de titres de PME de moins de 10 ans

La plus-value réalisée à l'occasion de la cession de parts sociales de société acquis avant le 1er janvier 2018 peut bénéficier d'un abattement spécifique pour durée de détention lorsque les conditions suivantes sont réunies (article 150-0 D, 1 quater-B-1° du CGI) :

  • option pour le barème progressif de l'impôt sur le revenu en application du 2 de l'article 200 A du CGI ;
  • la société dont les titres sont cédés est une PME au sens communautaire, c'est-à-dire une société qui emploie moins de 250 salariés et qui, soit réalise un chiffre d'affaires n'excédant pas 50 millions d'¤, soit a un bilan annuel inférieur ou égal à 43 millions d'¤. Ce statut de PME s'apprécie à la date de la souscription ou de l'acquisition des titres (autrement dit, le fait que la société dont les titres sont cédés ne soit plus une PME au moment de la cession n'empêche pas l'application du dispositif dès lors qu'elle répondait aux caractéristiques des PME au moment de la souscription ou de l'acquisition des titres) ;
  • la société dont les titres sont cédés était créée depuis moins de 10 ans au moment de la souscription ou de l'acquisition des titres et n'était pas issue d'une concentration, d'une restructuration ou d'une extension ou reprise d'activités préexistantes.

La jurisprudence a confirmé que la création d'une société pour la reprise d'une activité préexistante ne permet pas l'application de l'abattement renforcé. Elle invoque notamment le fait que l'activité de la société nouvellement créée est identique à celle de la société reprise et que l'essentiel des moyens corporels d'exploitation ont été repris à cet effet (cour administrative d'appel de Douai, 23 mars 2022, n°20DA01563).

L'administration avait admis une tolérance en cas d'apport d'une entreprise individuelle en société (Rep. Laqhila AN 13-8-2019 n°3501 : apport de l'entreprise individuelle intervenant moins de 10 ans après la création de l'entreprise). Toutefois, cette tolérance n'a pas été reprise dans le BOFiP. Dans un arrêt de la cour d'appel de Lyon, la tolérance admise par le ministère n'a pas été reprise non plus, l'administration considérant celle-ci postérieure à la date à laquelle il a cédé les parts. Le cédant des titres ne pouvait se prévaloir de cette tolérance (cour administrative d'appel de Lyon, 21 juin 2022, n°21LY00880).

  • la société dont les titres sont cédés n'accorde aux titulaires des titres que les seuls droits résultant de leur qualité d'associé ou d'actionnaire, à l'exclusion de tout autre avantage ou garantie en capital. À cet égard, l'administration a validé l'application de l'abattement renforcé dans le cas où le contribuable avait signé une promesse unilatérale de cession de ses actions au bénéfice de son directeur général, lequel était parti à un pacte d'actionnaire. L'administration n'a pas considéré une garantie en capital, la promesse unilatérale ne comportant aucune obligation pour le directeur général et donc que le contribuable n'était pas assuré de vendre ;
  • la société dont les titres sont cédés est passible d'un impôt sur les bénéfices (IS ou IR ou un impôt équivalent si la société n'est pas établie en France) ;
  • la société a son siège dans un État de l'Espace économique européen ;
  • la société exerce une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, à savoir une activité opérationnelle ou la société doit être une holding animatrice. Sont toutefois exclus du bénéfice de cette mesure les titres de société ayant pour activité la gestion de leur propre patrimoine mobilier ou immobilier.

Les quatre dernières conditions ci-dessus s'apprécient de manière continue depuis la date de création de la société.

Cet abattement spécifique majoré est égal à :

  • 50% si les titres sont détenus depuis au moins 1 an et moins de 4 ans ;
  • 65% si les titres sont détenus depuis au moins 4 ans et moins de 8 ans ;
  • 85% au-delà de 8 ans de détention.

Cet abattement s'applique aussi aux dirigeants de PME partant à la retraite.

Abattement proportionnel majoré en cas de cession d'une participation au sein du groupe familial

Un abattement pour durée de détention s'applique aux plus-values réalisées lors de cessions intervenant au sein d'un groupe familial (article 150-0 A 3° du CGI). Le groupe familial se définit par le conjoint ou partenaire de PACS, ascendants et descendants, frères, s½urs et frères et s½urs du conjoint dès lors que les conditions suivantes sont remplies :

  • la société dont les titres sont cédés est soumise à l'impôt sur les sociétés ou à un impôt équivalent si elle est établie hors de France ;
  • ladite société a son siège dans un État de l'Espace économique européen ;
  • le groupe familial, doit avoir détenu ensemble, directement ou indirectement, plus de 25% des droits dans les bénéfices sociaux à un moment quelconque au cours des 5 années précédant la cession ;
  • l'acquéreur ne doit pas revendre les titres ainsi acquis dans un délai de 5 ans. En cas de revente de tout ou partie des titres à un tiers dans ce délai, la plus-value initiale réalisée lors de la cession à l'intérieur du groupe familial devient imposable en totalité dans les conditions de droit commun au nom du premier cédant, au titre de l'année de revente au tiers (application éventuelle des abattements pour durée de détention de droit commun).

Toutefois, l'exonération ne sera pas remise en cause :

  • En cas de transmission à titre gratuit de tout ou partie des droits sociaux en cause pendant le délai de 5 ans.

L'administration conserve la possibilité de démontrer, par l'emploi de la procédure de répression des abus de droit, que la mutation à titre gratuit déguise en fait une véritable mutation à titre onéreux.

Le décès du cessionnaire dans le délai de 5 ans n'est pas de nature à remettre en cause l'exonération de la plus-value.

  • En cas de cession à titre onéreux dans le délai de 5 ans de tout ou partie des droits sociaux à un membre du groupe familial du premier cédant.

Pour plus de précisions sur ce régime, voir BOI-RPPM-10-20-30.

Régimes spécifiques applicables en cas de départ à la retraite du dirigeant

Les contribuables qui cèdent leur titre de société peuvent bénéficier d'un abattement pour durée de détention. C'est ce qu'on appelle communément l'abattement de droit commun pour durée de détention des titres.

À côté de ce régime de droit commun, le dirigeant de PME qui part à la retraite peut bénéficier de deux régimes de faveur de taxation de la plus-value réalisée à l'occasion de la cession des titres de la société qu'il dirigeait.

Dans le cadre de son départ à la retraite, le dirigeant peut bénéficier soit d'un abattement fixe d'un montant de 500 000¤ soit d'un abattement pour durée de détention (seulement dans le cas de l'option pour le barème progressif de l'impôt sur le revenu), sur la plus-value engendrée par la cession de titres. Selon la date d'acquisition des titres, la durée de détention des titres et le montant de la plus-value, le choix de tel abattement plutôt que l'autre est opportun.