Territorialité de l'impôt sur les sociétés : imposition des entreprises en France et à l'étranger ?

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Le principe de territorialité de l'IS (impôt sur les sociétés) est présenté par l'article 209 I du Code Général des Impôts. Il permet de définir le lieu d'imposition des opérations réalisées par les entreprises.

Quel est le principe de territorialité en fiscalité internationale ? Pour mémoire, les conventions fiscales internationales prévalent sur le droit fiscal interne. En d'autres termes, le droit interne trouve principalement à s'appliquer en l'absence de convention fiscale.

Le territoire France

Pour l'application de l'impôt sur les sociétés, le terme « France » comprend :

  • France Continentale ;
  • Corse ;
  • îles du littoral ;
  • départements d'Outre Mer (Mayotte, Guyane, Guadeloupe, Martinique et Réunion).

En revanche les Territoires d'Outre-Mer (Nouvelle Calédonie, Polynésie Française, terres Australes et Antarctiques françaises, Wallis-et-Futuna), et Saint-Pierre-et-Miquelon sont considérés comme des pays tiers de même que la Principauté de Monaco.

Quelles sont les règles de territorialité de l'impôt sur les sociétés ?

Pour l'impôt sur les sociétés, le droit français retient le principe suivant : les bénéfices relevant de l'impôt sur les sociétés sont uniquement ceux réalisés par des entreprises exploitées en France ainsi que ceux dont l'imposition est attribuée à la France du fait de l'existence d'une convention internationale.

On remarque alors que peu importe le lieu de situation du siège social, dès lors qu'une entreprise dont le siège est situé en France exploite une activité à l'étranger, cette activité (mais uniquement cette activité, l'ensemble des autres activités exploitées en France étant imposable en France) n'est en principe pas soumise à l'impôt sur les sociétés en France, quand bien même la comptabilité relative à cette activité serait centralisée en France.

A contrario, toute entreprise dont le siège se situe à l'étranger, qui exploite une activité en France, est assujettie à l'impôt sur les sociétés en France à raison de cette activité.

Pour qu'une entreprise soit considérée comme étant exploitée en France, il faut qu'elle y exerce une activité qui peut relever de l'un des 3 critères suivants :

  • s'effectuer dans le cadre d'un établissement stable et autonome ;
  • être réalisée dans le cadre d'une représentation sans personnalité professionnelle indépendante ;
  • résulter de la réalisation d'opérations formant un cycle commercial complet.

La notion d'établissement stable et autonome

L'établissement autonome est une installation fixe présentant un caractère permanent et possédant une autonomie avérée dans son organisation et son mode de fonctionnement (atelier de fabrication, siège de la direction, comptoir de vente, succursale...). Quand une entreprise ayant son siège économique en France possède un établissement autonome situé hors de la France, les bénéfices résultant de cette structure ne seront pas imposables en France mais relèveront du pays dans lequel est situé cet établissement.

La notion de représentation

On distingue deux catégories de représentation suivant que le représentant soit indépendant ou non.

Dans le cas d'un représentant dépendant, celui-ci exerce son activité au sein d'un établissement de l'entreprise à l'étranger sous les directives de la société mère française. Les bénéfices dégagés par cet établissement ne sont alors pas imposables en France.

A contrario, une entreprise ayant son siège en France et exerçant une activité à l'étranger via un représentant indépendant sera imposée sur les bénéfices réalisées dans le cadre de cette opération. Le représentant, quant à lui, sera imposé sur sa rémunération (commission).

Opération formant un cycle commercial complet

Lorsqu'un cycle commercial complet (par exemple : achat revente de marchandises) est réalisé à l'étranger, les résultats ne seront pas imposables en France. Si le cycle commercial est incomplet (opération non distinguable de celle réalisée en France et étroitement liée), les résultats seront imposés en France.

Des dérogations au principe de territorialité

Certaines exceptions aux règles de territorialité sont prévues par le droit interne français. On relève ainsi des dérogations concernant l'option pour un bénéfice mondial ou consolidé, des dérogations relatives à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscale ainsi que des dispositifs spécifiques à certaines activités jugées non indépendantes.

Bénéfice mondial ou bénéfice consolidé

Ces régimes sont applicables sur agrément du Ministre de l'Économie et des Finances. Ils permettent aux entreprises françaises agréées de déterminer leurs bénéfices taxables à l'IS en retenant soit l'ensemble de leurs bénéfices français auxquels s'ajoutent les bénéfices de leurs établissements situés à l'étranger (principe du bénéfice mondial), soit de retenir le bénéfice réalisé en France et d'y ajouter la part leur revenant dans les bénéfices de leurs filiales françaises et étrangères (principe du bénéfice consolidé).

Lutte contre la fraude et l'évasion fiscale 

Cela concerne notamment les dispositions suivantes :

  • les problématiques de prix de transfert et la sanction des transferts indirects de bénéfices à l'étranger entre entreprises dépendantes (article 57 du CGI) :
  • le rattachement aux résultats français des bénéfices réalisés par certaines filiales et établissements situés dans des pays à fiscalité privilégiée (article 209 B du CGI) ;
  • la déductibilité de certaines charges (intérêts, redevances, rémunérations de prestations de services) en cas de paiement à un bénéficiaire soumis à un régime fiscal privilégié (article 238 A du CGI).

Autres dispositifs particuliers

Il existe un régime fiscal particulier pour les quartiers généraux des sociétés multinationales installées en France qui sont chargés de gérer, coordonner, diriger les activités du groupe sur un secteur défini et les centres de logistique qui exercent des fonctions de stockage, conditionnement, étiquetage ou distribution pour un groupe multinational.  Sur demande auprès de l'administration fiscale ces établissements pourront déterminer les bénéfices imposables à partir d'une marge bénéficiaire calculée en appliquant un pourcentage au montant de leurs charges d'exploitation courantes.

De même, un dispositif est créé pour les centres de coordination de recherche et développement.  Cela concerne les sociétés qui réalisent des prestations de recherche et développement non susceptibles d'être revendues. Leur bénéfice imposable sera déterminé forfaitairement par application de la méthode du prix de revient majoré (ou toute autre méthode pertinente)

A noter que ces deux dispositifs peuvent être cumulés.