L'établissement stable en fiscalité internationale

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L'établissement stable est une notion développée dans le cadre des conventions internationales, visant à déterminer le lieu d'imposition d'une activité opérationnelle exercée par une entreprise dans un Etat autre que celui du lieu de son siège. Chaque convention internationale a sa propre définition de l'établissement stable et de sa fiscalité.

Les critères retenus en France

Pour l'impôt sur les sociétés, le droit français retient le principe suivant : les bénéfices relevant de l'impôt sur les sociétés sont déterminés en prenant en considération uniquement les bénéfices réalisés par des entreprises exploitées en France ainsi que ceux dont l'imposition est attribuée à la France du fait de l'existence d'une convention internationale. Ce principe est régi par l'article 209, I, du CGI.

Pour qu'une entreprise soit considérée comme étant « exploitée en France », il faut entendre qu'elle y exerce habituellement une activité qui peut :

  • s'effectuer dans le cadre d'un établissement autonome ;
  • être réalisée dans le cadre d'une représentation sans personnalité professionnelle indépendante ;
  • résulter de la réalisation d'opérations formant un cycle commercial complet.

C'est quoi un établissement stable ?

Pour qu'une entité réponde à la notion d'établissement stable, selon le rapport formulé par la convention OCDE et appliqué par une grande majorité des pays (et donc des conventions internationales), il doit répondre à 2 critères :

  • l'installation fixe d'affaires ;
  • l'agent dépendant.

On rejoint les critères appliqués par la France qui évoquent la notion de représentation dépendante et la présence d'un établissement autonome.

L'installation fixe d'affaires

L'article 5 de la convention modèle OCDE donne des précisions sur la définition de l'établissement stable et le critère d'installation fixe d'affaires.

Ainsi, sont considérées comme installation fixe d'affaires les entités suivantes :

  • succursale ;
  • bureaux ;
  • siège de direction ;
  • usine ;
  • atelier ;
  • espaces d'extractions de ressources naturelles (mines, carrières, puits de pétrole ou gaz) ;
  • chantier de construction d'une durée supérieure à 12 mois.

En revanche, les bâtiments aux seules fins de stockage (marchandises ou matières premières) ne répondent pas à la définition de l'établissement stable tout comme les espaces dédiés uniquement à l'achat de matières ou marchandises.

L'agent dépendant

En l'absence d'installation fixe d'affaires, une entreprise peut avoir un établissement stable dans l'État dans lequel elle est représentée par un agent dépendant.

Selon l'article 5-5 de la convention modèle OCDE apporte des précisions que la définition de l'agent dépendant.

Ainsi, peuvent être considérés comme constituant un établissement stable les agents présentant les caractéristiques suivantes :

  • l'agent doit être dépendant : peu importe qu'il soit salarié ou non mais il doit être placé dans un état de dépendance juridique et économique vis-à-vis de l'entreprise. Dès lors, en principe, un commissionnaire (ou un courtier) ne constitue pas un établissement stable, sauf si le commettant est personnellement engagé par le contrat que le commissionnaire conclut avec les tiers ;
  • l'agent doit disposer de pouvoirs lui permettant de conclure les contrats de l'entreprise, c'est-à-dire à en négocier tous les éléments (même si les contrats sont effectivement signés au siège de l'entreprise) ;
  • la présence de l'agent doit présenter une certaine stabilité ;
  • l'agent doit exercer des activités qui, si elles étaient exercées par une installation fixe d'affaires, caractériseraient l'existence d'un établissement stable (i.e. pas d'établissement stable lorsque l'agent n'effectue que des opérations non caractéristiques de l'existence d'un établissement stable, telles que, par exemple, l'achat de marchandises par l'entreprise ou la réalisation d'activités préparatoires et auxiliaires).

Les conséquences de l'existence d'un établissement stable sur l'imposition des résultats

En présence d'un établissement stable à l'étranger, cet établissement sera imposé sur les bénéfices réalisés dans le pays où il se situe.

Ainsi, par exemple, lorsqu'une entreprise établie en France exerce une activité en Italie ou en Allemagne, par l'intermédiaire d'un établissement stable, l'Allemagne ou l'Italie sont en droit d'imposer les bénéfices réalisés par cet établissement stable.

L'État du siège de l'entreprise doit alors éliminer la double imposition, soit en exonérant les bénéfices de cet établissement stable imposables à l'étranger, soit en accordant un crédit d'impôt au titre de l'impôt payé dans l'État de situation de l'établissement stable. Les modalités seront précisées dans la convention internationale.

Précisons qu'un établissement stable n'a pas la personnalité morale (à la différence d'une filiale) mais qu'il constitue l'émanation à l'étranger d'une entreprise.

Le rescrit « établissement stable »

Le dispositif de rescrit s'adresse aux entreprises étrangères ayant signé une convention fiscale internationale avec la France et qui prévoient de réaliser des opérations économiques en France sans pour autant avoir recours à une implantation fixe constituant un établissement stable sur le territoire français. Le rescrit est prévu par les articles L. 80 B-6° et R* 80 B-9° du livre des procédures fiscales (LPF).

L'objectif pour la personne physique ou morale située à l'étranger est d'obtenir une confirmation de la part de l'administration fiscale française sur le fait qu'elle ne possède pas d'installation fixe en France et n'a donc pas de bénéfices à imposer en France.

La demande est à formuler par écrit en langue française, accompagnée d'un questionnaire spécifique et doit être adressée à la Direction générale des Finances publiques de Paris. L'administration fiscale dispose d'un délai de 3 mois pour apporter une réponse. L'absence de réponse vaut accord tacite.