Les délits d'entrave : définition, procédure et sanctions

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Régi par le Code pénal et le Code du travail, le délit d'entrave se définit globalement par tout comportement entravant le bon fonctionnement des instances représentatives du personnel. Soumis à une procédure spécifique, différentes sanctions peuvent être appliquées selon les situations qui caractérisent ce délit.

Qu'est-ce qu'un délit d'entrave ?



Définition de l'infraction

Le délit d'entrave est une infraction se définissant par le fait, pour un employeur, d'empêcher la mise en place et le fonctionnement des instances représentatives du personnel, ou de porter atteinte à la protection des représentants du personnel. Ce comportement peut être actif ou passif.

Ainsi, même si l'employeur n'a pas volontairement voulu entraver le fonctionnement de l'instance, l'infraction est caractérisée. Le délit peut être constitué par la simple omission d'une obligation (absence de convocation aux réunions des membres, par exemple).

Nombreux sont les comportements constitutifs d'un délit d'entrave :

  • absence d'organisation des élections professionnelles ; 
  • absence d'organisation des réunions du CSE (comité social et économique)
  • non-respect des obligations de consultation du CSE ;
  • absence d'organisation de la réunion du comité de groupe, absence de désignation de ses membres, ou encore, atteinte à son fonctionnement régulier ;  
  • licenciement d'un salarié protégé sans accord de l'inspection du travail ;
  • atteinte à l'exercice du droit syndical, etc. 

La liste est non exhaustive.

Éléments constitutifs de l'infraction 

Une infraction dispose de 3 caractéristiques :

  • un élément légal : elle doit être prévue par la loi ;
  • un élément matériel : la réalisation de l'infraction ;
  • un élément moral : l'intention, l'élément psychologique. Toutefois, certaines infractions sont caractérisées même en l'absence d'intention (par imprudence, etc.).  

Ainsi, le délit d'entrave est caractérisé dès que l'employeur a commis un acte considéré par les textes comme étant un délit d'entrave. Toutefois, l'intention n'est pas une condition de reconnaissance de l'infraction. Même s'il agit par simple omission, l'infraction peut être caractérisée.

En effet, le droit est régi par un adage : « nul n'est censé ignorer la loi». Ainsi, même si le caractère volontaire de l'employeur n'est pas établi, il ne saurait invoquer son ignorance à l'égard des obligations légales qui lui incombent. Même en cas d'action en méconnaissance des règles légales, l'infraction est caractérisée.

Le délit d'entrave vise tous les représentants du personnel et les salariés protégés (membres élus du CSE, délégué syndical, salariés candidats non élus, etc.). Par ailleurs, d'autres personnes que l'employeur peuvent être condamnés pour délit d'entrave, tels que les salariés, les représentants du personnel, voire même des personnes extérieures à l'entreprise.

Quelle est la procédure de dénonciation du délit d'entrave ? 

Plusieurs personnes peuvent dénoncer un délit d'entrave.

Étant une infraction pénale, la juridiction compétente pour traiter ce délit est le tribunal correctionnel. L'engagement des poursuites se fait par le Ministère public et doit intervenir dans un délai de 3 ans à compter de la date de commission de l'infraction.

Les poursuites sont engagées à la suite d'une plainte de la victime ou d'un procès-verbal dressé par l'inspection du travail. Les victimes pouvant initier des poursuites sont, entre autres, les salariés protégés, les représentants du personnel, les syndicats, etc.

Quelles sont les peines encourues en cas de délit d'entrave ?

Selon le type de délit d'entrave commis, les peines diffèrent.

Le délit d'entrave est puni d'un an d'emprisonnement assortie d'une amende  de 3 750¤ lorsqu'il est caractérisé par les situations suivantes :

Cette peine concerne les personnes physiques. Pour une personne morale, la sanction est une amende de 18 750¤.

Le délit d'entrave est puni d'une amende de 7 500¤ pour une personne physique et de 37 500¤ pour une personne morale dans les cas suivants :

  • atteinte au fonctionnement régulier des institutions représentatives du personnel ;
  • absence de bilan social ; 
  • méconnaissance de l'obligation de consultation et d'information du CSE ; 
  • absence de BDESE (base de données économiques, sociales et environnementales). 

Enfin, le délit d'entrave est sanctionné d'une peine d'un an d'emprisonnement assortie d'une amende de 7 500¤ pour une personne physique, et d'une amende de 37 500¤ pour une personne morale en cas d'entrave à la constitution des instances représentatives du personnel ou à la libre désignation de leurs membres.

La ou les victimes du délit peuvent également se constituer partie civile et exiger le versement de dommages et intérêts en cas de préjudice subi.

Le délit d'entrave est-il prévu par le droit du travail ? 

Depuis l'ordonnance dite « Macron » du 22 septembre 2017, le délit d'entrave est inscrit dans le Code du travail à l'article 2317-1. Cet article dispose, en ce sens, que :

« Le fait d'apporter une entrave soit à la constitution d'un comité social et économique, d'un comité social et économique d'établissement ou d'un comité social et économique central, soit à la libre désignation de leurs membres, notamment par la méconnaissance des dispositions des articles L. 2314-1 à L. 2314-9 est puni d'un emprisonnement d'un an et d'une amende de 7 500¤.

Le fait d'apporter une entrave à leur fonctionnement régulier est puni d'une amende de 7 500¤. »

Cet article fait état de certains cas constitutifs d'un délit d'entrave mais ne précise pas toutes les situations.