Le statut des salariés protégés : représentants du personnel, conseillers prud'homaux

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Modifié le 24/03/2024
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Délégués syndicaux, représentants du personnel, conseillers prud'homaux, certains salariés bénéficient d'une protection particulière durant l'exécution mais également la fin de leur contrat de travail.

Qui bénéficie du statut protecteur ? Comment est appliquée la protection ?

Qui est considéré comme salarié protégé ? 

Est considéré comme salarié protégé le salarié exerçant un mandat électif ou nominatif au sein de l'entreprise ou à l'extérieur de celle-ci. Certains salariés n'exercent pas de mandat mais sont liés à une élection. Ils sont également visés par la protection.

Catégories de salariés 

Sont considérés comme salariés protégés :

  • les représentants du personnel : délégué syndical, représentants syndicaux au CSE, membres du Comité social et économique (CSE) ;
  • les candidats aux élections des représentants du personnel ;
  • les salariés ayant soumis une demande d'organisation d'élections de représentants du personnel ;
  • les salariés démontrant que l'employeur connaissait l'imminence de leur candidature ou de leur désignation avant d'être convoqués à un entretien préalable au licenciement ;
  • les représentants de proximité et les candidats ;
  • les salariés mandatés par une organisation syndicale représentative pour une négociation collective ;
  • les représentants de section syndicale ;
  • le défenseur syndical ;
  • les représentants des salariés dans le cadre d'un redressement ou d'une liquidation judiciaire ;
  • les conseillers extérieurs assistant un salarié dans le cadre d'une procédure de licenciement ;
  • les membres du conseil ou administrateurs d'une caisse de Sécurité sociale, d'une mutuelle ou d'une chambre d'agriculture ;
  • les conseillers prud'homaux et les candidats à l'élection des conseils de prud'hommes ;
  • les maires, les adjoints au maire des communes de plus de 10 000 habitants, le président ou les vice-présidents ayant délégation de l'exécutif du conseil départemental ou régional, lorsqu'ils exercent un mandat salarié ; 
  • les médecins du travail. 

Les assimilés salariés protégés

Bien qu'ils ne bénéficient pas du statut de salarié protégé à proprement parler, certains salariés bénéficient d'une protection particulière :

  • la femme enceinte bénéficie d'une protection absolue contre le licenciement ;
  • le salarié victime d'un accident ou d'une maladie.

Durée de la protection 

Protection durant le mandat

La durée de la protection dépend du type de mandat du salarié.

Pour un membre du CSE, la protection s'étend sur 6 mois à compter de la publication des candidatures. Elle se poursuit ensuite pendant toute la durée du mandat.

La même durée de protection de 6 mois s'applique aux salariés ayant demandé la tenue d'élections professionnelles. Celle-ci débute dès que l'organisation syndicale demande à l'employeur par lettre recommandée d'organiser ces élections.

La protection des conseillers prud'homaux débute à partir du moment où l'employeur est informé de leur candidature et s'étend durant tout le mandat.

Enfin, les délégués syndicaux, tout comme les représentants de la section syndicale, sont protégés durant toute la durée de leur mandat.

Protection après le mandat

Les membres du CSE ainsi que les conseillers prud'homaux bénéficient d'une protection 6 mois après leur mandat.

Les délégués syndicaux et les représentants de section syndicale bénéficient d'une protection 12 mois après la fin de leur mandat s'ils ont exercé durant un 1 an au minimum.

Les candidats pour devenir conseillers prud'homaux non sélectionnés bénéficient d'une protection de 3 mois après la nomination des conseillers.

Quels sont les moyens de protection des représentants du personnel dans l'exécution du contrat de travail ?



Modification du contrat de travail 

Si l'employeur entend modifier un élément substantiel du contrat de travail d'un représentant du personnel, il doit demander le consentement de ce dernier.

En cas de refus de la modification du contrat de travail, l'employeur peut engager la procédure de licenciement.

Si la modification ne repose pas sur un motif économique, un délai de réflexion doit être laissé mais aucune durée n'est fixée par la loi. L'absence de réponse à l'issue du délai ne vaut pas acceptation.

En cas de modification fondée sur un motif économique, un délai de réflexion d'1 mois est laissé au salarié protégé. L'absence de réponse vaut acceptation.

Changement des conditions de travail 

Aucun changement de conditions de travail ne peut être opéré envers un salarié protégé sans son accord.

En cas de refus de sa part, l'employeur doit poursuivre le contrat de travail aux conditions antérieures ou peut engager la procédure de licenciement en saisissant l'inspection du travail d'une demande d'autorisation de licenciement.

Transfert des contrats de travail 

Le transfert des contrats de travail d'un salarié protégé est automatique, en cas de transfert total de l'entreprise.

Lors d'un transfert partiel, le transfert du contrat de travail est soumis à autorisation de l'inspection du travail. En cas de refus de la part de l'administration, le salarié doit être réintégré sans délai.

Protection contre les discriminations 

Le Code du travail prévoit plusieurs dispositifs pour lutter contre les discriminations envers les salariés protégés au titre de leur mandat.

Outre une interdiction générale des discriminations, certaines interdictions sont précisées par la jurisprudence afin d'éviter tout risque. A titre d'exemple, nous pouvons citer l'interdiction de toute mention relative à l'exercice d'un mandat dans le compte-rendu d'entretien d'évaluation.

Par ailleurs, la charge de la preuve est allégée en matière de discrimination. Il suffit pour le salarié victime de présenter des faits laissant supposer l'existence d'une discrimination.

Quels sont les moyens de protection des représentants du personnel dans la rupture du contrat de travail ?



Rupture conventionnelle 

Toute rupture conventionnelle avec un salarié protégé requiert obligatoirement la consultation préalable du CSE pour avis.

Une demande d'autorisation doit également être soumise à l'inspecteur du travail qui dispose d'un délai de 2 mois pour rendre sa décision. L'absence de réponse à l'issue du délai vaut refus.

Licenciement 

Le licenciement d'un salarié protégé requiert obligatoirement la consultation préalable du CSE pour avis, dans les entreprises de 50 salariés et plus.

Par ailleurs, à l'instar de la rupture conventionnelle, une demande d'autorisation doit également être soumise à l'inspection du travail disposant d'un délai de 2 mois pour rendre sa décision. L'absence de réponse à l'issue du délai vaut refus.

Enfin, en cas de licenciement annulé d'un salarié protégé par la juridiction, les effets produits sont ceux d'un licenciement nul.

À cet égard, lorsqu'un salarié est licencié après autorisation administrative, le juge judiciaire peut accorder des indemnités de licenciement au titre de la discrimination syndicale antérieure au licenciement.

En revanche, la Cour de cassation a jugé que le salarié licencié ne pouvait pas demander la nullité du licenciement pour discrimination syndicale.

En effet, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé, l'Administration est tenue de vérifier si la mesure envisagée n'est pas en rapport avec le mandat détenu, sollicité ou antérieurement exercé par le salarié.

Par conséquent, en présence d'une autorisation devenue définitive (donc absence de lien), le juge ne peut annuler le licenciement sur le fondement d'une discrimination syndicale (Cour de cassation, chambre sociale, 17 janvier 2024, n°22-20.778).

Prise d'acte et résiliation judiciaire 

Lorsqu'un salarié protégé prend acte de la rupture de son contrat de travail et que la juridiction valide, cette rupture produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur.

Il en est de même pour la résiliation judiciaire.