La réduction d'ISF pour souscription au capital de PME

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Les redevables qui investissent dans des PME ou qui souscrivent des parts de certains fonds d'investissement peuvent, sous certaines conditions, imputer sur leur ISF une somme correspondant à 50% du montant de leur investissement, dans la limite de 45 000¤ (réduction dite "ISF-PME").

Initialement introduit en 2007, ce dispositif, visé à l'article 885-0 V bis du CGI, a été réaménagé par l'article 24 de la loi de finances rectificative pour 2015, afin de le mettre en conformité avec les règles européennes d'encadrement des aides d'Etats en faveur du financement des risques (règlement (UE) n°651/2014 de la Commission du 17 juin 2014). Les nouvelles dispositions s'appliquent aux souscriptions effectuées à compter du 1er janvier 2016.

Ce dispositif est également ouvert aux souscriptions de parts de fonds de placement dans l'innovation (FCPI) et de fonds d'investissement de proximité (FIP). Toutefois, les conditions d'application de la réduction d'ISF, dans ce contexte, ne sont pas abordées dans la présente note.

Nature des souscriptions ouvrant droit à réduction d'ISF-PME

D'un point de vue général, le champ des souscriptions éligibles a été réduit par la loi de finances rectificative pour 2015.

Sont désormais éligibles à la réduction ISF-PME les apports, en numéraire, effectués lors de la constitution ou à l'occasion d'augmentations de capital de PME.

Les apports en nature de biens nécessaires à l'exercice de l'activité, qui, avant l'entrée en vigueur de la loi de finances rectificative pour 2015, ouvraient droit au bénéfice de la réduction ISF-PME, sont désormais exclus du dispositif.

Les souscriptions peuvent être réalisées :

  • au capital initial, lors de la constitution de la société ;
  • aux augmentations de capital de sociétés dont le souscripteur n'est ni associé ni actionnaire. Une exception est cependant prévue à l'égard des investissements de suivi qui peuvent être souscrits par une personne déjà associée ou actionnaire tout en ouvrant droit au dispositif de l'article 885-0 V bis du CGI. Avant l'entrée en vigueur de la loi de finances rectificative pour 2015, toute personne participant à l'augmentation de capital pouvait bénéficier du dispositif de réduction ISF-PME ;
  • aux augmentations de capital postérieures à la constitution de la société qui constituent des investissements "de suivi". Tel est le cas lorsque (i) le redevable a bénéficié, au titre de son premier investissement, d'une réduction d'ISF, (ii) de possibles investissements de suivi étaient prévus dans le plan d'entreprise de la société bénéficiaire de la souscription et (iii) cette dernière société n'est pas devenue liée à une autre entreprise au sens de l'article 3, §3 du règlement précité en introduction.

La souscription peut être effectuée directement ou indirectement, par l'intermédiaire d'une société holding, dans une PME. Dans cette dernière hypothèse, la présente réduction ISF-PME ne s'applique qu'aux souscriptions en numéraires effectuées dans la holding. Un seul niveau d'interposition est autorisé (i.e. il ne peut y avoir qu'une seule holding entre le redevable et la PME).

Les souscriptions au capital de la société doivent conférer aux souscripteurs les seuls droits résultant de la qualité d'actionnaire ou d'associé de la société, à l'exclusion de toute autre contrepartie, notamment sous la forme de tarifs préférentiels ou d'accès prioritaire aux biens produits ou aux services rendus par la société. Cette condition s'apprécie de manière continue jusqu'au 31 décembre de la cinquième année suivant celle de la souscription.

 

Conditions relatives à la société bénéficiaire des souscriptions

La loi de finances rectificative a reconduit la plupart des conditions relatives à la société bénéficiaire des souscriptions, avec, pour certaines d'entre-elles, quelques réaménagements.

Souscription directe au capital social d'une société opérationnelle

La réduction ISF-PME est réservée aux sociétés remplissant un certain nombre de conditions dont les principales sont les suivantes :

  • La société est une PME au sens du règlement (UE) n°651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 : elle doit employer moins de 250 salariés et réaliser un chiffre d'affaires n'excédant pas 50 m¤ ou avoir un total de bilan annuel n'excédant pas 43 m¤. Lorsque la société est considérée comme une "entreprise partenaire" ou une "entreprise liée" au sens du règlement précité, les conditions de seuil ci-dessus s'apprécient en agrégeant les données de l'entreprise bénéficiaire de la souscription et celles des entreprises partenaires ou des entreprises liées. Cette condition s'apprécie à la date du versement et n'est pas remise en cause en cas de perte de la qualité de PME communautaire postérieurement à la libération de la souscription ;
  • Le siège de la société est situé en France ou dans certains Etats européens (i.e. Union européenne (UE) ou Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre l'évasion fiscale (EEE)). Cette condition s'apprécie de manière continue jusqu'au 31 décembre de la cinquième année suivant celle de la souscription ;
  • Elle exerce une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, à l'exclusion des activités financières, des activités de gestion de patrimoine mobilier, des activités de construction d'immeubles en vue de leur vente ou de leur location (nouvelle exclusion ajoutée par la loi de finances rectificative pour 2015), des activités immobilières et des activités procurant des revenus garantis en raison de l'existence d'un tarif réglementé de rachat de la production ou bénéficiant d'un contrat offrant un complément de rémunération. Cette condition s'apprécie de manière continue jusqu'au 31 décembre de la cinquième année suivant celle de la souscription ;
  • La société est soumise à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun ou à un impôt équivalent si l'activité n'est pas exercée en France ;
  • La société doit compter au moins deux salariés (ou un seul si elle est soumise à l'obligation de s'inscrire à la chambre des métiers et de l'artisanat) à la clôture de l'exercice qui suit celui de la souscription ;
  • Elle n'est pas qualifiable d'entreprise en difficulté au sens du règlement précité (nouvelle condition introduite par la loi de finances rectificative pour 2015) ;
  • Le dispositif est recentré sur les PME de moins de sept ans, alors qu'il s'appliquait sans limite d'âge jusque là. Dans ce contexte, la société doit remplir au moins l'une des conditions suivantes au moment de l'investissement initial :
    - elle n'exerce son activité sur aucun marché,
    - elle exerce son activité sur un marché, quel qu'il soit, depuis moins de sept ans après sa première vente commerciale (le seuil de chiffre d'affaires caractérisant la première vente commerciale sera fixé par décret, le chiffre de 250 k¤ étant avancé),
    - elle a besoin d'un investissement en faveur du financement des risques qui, sur la base d'un plan d'entreprise établi en vue d'intégrer un nouveau marché géographique ou de produits, est supérieur à 50% de son chiffre d'affaires annuel moyen des cinq années précédentes ;
  • La société possède des actifs qui ne sont pas constitués, de façon prépondérante, de métaux précieux, d'½uvres d'art, d'objets de collection, d'antiquités, de chevaux de course ou de concours, ou de vins ou alcool sauf si l'objet même de son activité consiste en leur consommation ou en leur vente au détail. Cette condition s'apprécie de manière continue jusqu'au 31 décembre de la cinquième année suivant celle de la souscription ;
  • Les titres de la société ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé ou un système multilatéral de négociation français ou étranger, sauf, et c'est une nouveauté introduite par la loi de finances rectificative pour 2015, si ce marché est un système multilatéral de négociation où la majorité des instruments admis à la négociation sont émis par des PME au sens du règlement précité (i.e. Enternext) ;
  • Le montant total des versements qu'elle a reçus au titre des souscriptions ouvrant droit à la réduction ISF-PME et à la réduction d'impôt sur le revenu au titre de la souscription au capital de PME, ainsi que des aides dont elle bénéficie au titre du financement des risques sous la forme d'investissement en fonds propres ou quasi-fonds propres, de prêts, de garanties ou d'une combinaison de ces instruments, n'excède pas 15 m¤ sur la durée de vie de la société. Auparavant, ce plafond s'élevait à 2,5 m¤ par période glissante de douze mois ;
  • La société bénéficiaire des souscriptions ne doit pas avoir procédé, dans les douze mois précédant la souscription, au remboursement de tout ou partie des apports reçu antérieurement (i.e. hypothèse de coup d'accordéon).

Souscription indirecte, par l'intermédiaire d'une holding, au capital social d'une société opérationnelle

Cette société doit remplir les mêmes conditions que celles exigées des sociétés opérationnelles, à l'exception de celle relative à la nature de l'activité ainsi que celle tenant à l'âge de la société. Elle est également dispensé du respect de la condition relative au plafond de 15 m¤ des versements reçus de souscriptions et d'aides.

Elle doit, en outre, satisfaire les conditions suivantes :

  • La société ne doit pas déjà être actionnaire ou associée de la PME bénéficiaire de la souscription, sauf en cas d'investissement de suivi ;
  • La société holding doit avoir pour activité exclusive la détention de parts ou actions de sociétés (holding passive). Toutefois, les holdings actives non animatrices de leur groupe, qui outre la détention de titres d'autres sociétés, poursuivent une activité supplémentaire juridiquement autonome par rapport à l'activité de ces sociétés, peuvent également bénéficier du dispositif ;
  • La société holding doit avoir pour objet exclusif de détenir des participations dans des sociétés opérationnelles. Cette condition est réputée remplie lorsque la société holding détient au moins 90% de son actif brut comptable en titres de sociétés opérationnelles. Cette condition s'apprécie à la date du versement puis au 1er janvier de chaque année d'imposition ;
  • La société holding doit avoir exclusivement des personnes physiques pour mandataires sociaux.

Remarque : depuis 2015, la condition tenant au nombre maximum d'associés (i.e. 50) et à l'effectif salarié minimum, ne s'applique plus. Pour plus de détail à ce sujet, veuillez consulter l'article « Aménagement du dispositif de réduction d'IR et d'ISF pour souscription au capital de PME ».

Taux de la réduction ISF-PME

La loi de finances rectificative pour 2015 n'a pas touché au montant et aux modalités de calcul de la réduction d'impôt.

Cette dernière est égale à 50% du total des versements effectués par le redevable au titre de souscriptions au capital de sociétés éligibles. Cet avantage ne peut excéder 45 000¤.

En cas de souscriptions indirectes par l'intermédiaire d'une société holding, le montant des versements retenu pour l'assiette de la réduction d'impôt est proportionnel aux versements effectués par la société holding au titre des souscriptions au capital de PME. Ce montant est calculé en appliquant la formule suivante.

A x (B/C)

A : montant des versements effectués par le redevable

B : montant total des versements effectués par la holding au titre de souscriptions éligibles, entre la date limite de dépôt de la déclaration d'ISF de l'année précédente et la date limite de dépôt de la déclaration de l'année d'imposition

C : montant total des capitaux reçus par la société holding au cours de la période précitée


Les versements pris en compte sont ceux effectués entre la date limite de dépôt de la déclaration de l'année précédant celle de l'imposition et la date limite de dépôt de la déclaration de l'année d'imposition.

Obligation de conservation des titres et reprise de la réduction d'impôt

L'acquisition définitive de la réduction d'impôt est subordonnée au respect de plusieurs conditions :

  • la conservation des titres reçus lors de la souscription jusqu'au 31 décembre de la cinquième année qui suit celle de la souscription (sauf exceptions limitées prévues par la loi) ;

La loi de finances rectificative pour 2016 a assoupli cette obligation de conservation des titres en cas de cession desdits titres au moins trois ans après leur souscription, suivie du réinvestissement intégral du produit de cession (net des impôts et taxes générés par la cession), dans un délai maximum de douze mois, dans la souscription de titres éligibles au dispositif. Dans cette situation, le bénéfice de la réduction d'ISF n'est pas remis en cause, à condition que les nouveaux titres soient conservés jusqu'au terme du délai de conservation initial. La souscription réalisée dans le cadre du réinvestissement ne peut pas donner lieu au bénéfice de la réduction ISF-PME.

  • le respect de certaines des conditions d'octroi de l'avantage de manière continue jusqu'au 31 décembre de la cinquième année qui suit celle de la souscription, à savoir celles relatives à l'absence de contrepartie pour les souscripteurs, à la nature de l'activité, à la localisation du siège de la société et à la composition des actifs ;
  • l'absence de remboursement, par la société bénéficiaire de la souscription, des apports aux souscripteurs avant le 31 décembre de la septième année suivant celle de la souscription (abaissement de ce délai de dix ans à sept ans par l'article 143 de la loi n°2015-990 du 6 août 2015), sauf si le remboursement fait suite à la liquidation judiciaire de la société.

A défaut de respecter ces conditions, la réduction d'ISF est reprise au titre de l'année en cours et des années précédentes.

Obligations déclaratives

Le bénéfice de la réduction d'impôt est subordonné au respect de certaines obligations déclaratives.

Notamment, la société bénéficiaire des souscriptions doit délivrer un état individuel aux souscripteurs mentionnant un certain nombre d'informations obligatoires. Cet état doit être joint à la déclaration d'ISF des souscripteurs.

Non-cumul de la réduction d'ISF avec d'autres dispositifs

La réduction ISF-PME n'est pas applicable à la fraction des versements réalisés au titre de souscriptions ayant ouverts droit au bénéfice de certaines réductions d'impôt sur le revenu, telles que la réduction d'impôt outremer, la réduction d'impôt au titre des emprunts contractés au plus tard le 31 décembre 2011 pour la reprise d'une PME, etc.

Par ailleurs, les titres dont la souscription a ouvert droit à la réduction ISF-PME ne peuvent pas figurer dans un PEA classique ou un PEA PME-ETI, ni sur un plan d'épargne entreprise (PEE) ni dans un plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco).



Clotilde Cattier, avocate spécialisée en fiscalité, inscrite au Barreau de Paris.
Contact : contact@clotilde-cattier.com

Après avoir passé deux ans chez STC Partners et six ans chez Taj (Deloitte), Clotilde a rejoint le cabinet Room Avocats, en Suisse. Elle partage son temps entre Paris et la Suisse.

Ses principaux domaines d'intervention, en fiscalité française et internationale, sont les suivants :

  • fiscalité patrimoniale (restructuration de patrimoine, transmission de patrimoine, acquisition/détention/cession de biens immobiliers, etc.) ;
  • fiscalité des particuliers (imposition des cadres internationaux et des dirigeants, traitement fiscal des pensions de retraite versées sous forme de capital, etc.) ;
  • installation en Suisse de personnes physiques et de sociétés ;
  • fiscalité générale des entreprises (restructurations, assistance à contrôle fiscale, intégration fiscale, problématiques de remontée des liquidités, etc.) ;
  • fiscalité immobilière (fiscalité des marchands de biens et des promoteurs immobiliers) ;
  • fiscalité internationale (transactions transfrontalières, traitement fiscal des flux internationaux, etc.) ;
  • opérations de fusions-acquisitions ;
  • régularisation de la situation fiscale des français détenant des avoirs non déclarés à l'étranger.