Responsabilité civile et pénale du dirigeant de société : ce que vous devez savoir

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Être dirigeant de société implique que sa responsabilité civile et ou pénale puisse être engagée dans l'exercice de ses fonctions.

On oppose la responsabilité civile dont l'objet est de réparer le préjudice subi par une victime, à la responsabilité pénale dont l'objet est de punir l'auteur d'une infraction. Il est possible que le chef d'entreprise engage simultanément sa responsabilité civile et pénale pour les mêmes faits.

La responsabilité civile du chef d'entreprise

La responsabilité des dirigeants à l'égard de la société ou des associés est engagée à raison de leurs fautes commises dans la gestion de la société. Les cas de mise en cause de la responsabilité civile des dirigeants étant très large, il est courant que les dirigeants décident de souscrire à une assurance responsabilité civile.

Ils peuvent également engager leur responsabilité s'ils contreviennent à des obligations légales ou réglementaires telle que l'omission de formalité lors de la constitution de la société par exemple, ou à des dispositions statutaires.

Les fautes de gestion 

Le dirigeant de société engage sa responsabilité s'il commet une faute de gestion. Il existe d'innombrables cas dans lesquels la responsabilité du dirigeant est retenue. Le législateur n'ayant pas prévu de cas précis, ce sont les juges qui statuent sur la qualification d'une faute de gestion ou non. Voici une liste non exhaustive de cas engageant la responsabilité civile du dirigeant de la société :

  • manquement à l'obligation de loyauté ;
  • négligence ou défaut de surveillance ;
  • défaut de consultation des associés ;
  • mauvais résultat dans la gestion ;
  • politique commerciale ou financière contestable ;
  • octroi d'une rémunération abusive pour le dirigeant ;
  • concentration des pouvoirs de direction ;
  • engagement contractuel au nom de la société. 

Les autres fautes engageant la responsabilité civile du dirigeant

Le chef d'entreprise engage également sa responsabilité lorsqu'il contrevient à des dispositions statutaires, comme le non-respect d'un accord préalable des associés pour certaines décisions.

Plus largement, le dirigeant doit respecter les obligations légales et réglementaires qui incombent aux sociétés. S'il contrevient à ses dispositions, il engage aussi sa responsabilité.

Par ailleurs, le chef d'entreprise est responsable à l'égard de l'impôt, à savoir qu'il engage sa responsabilité concernant les obligations fiscales qui lui incombent, notamment lorsqu'il rend impossible le paiement de l'impôt sur les sociétés.

Il a également des obligations en matière sociale, le paiement des cotisations sociales notamment qui peut impliquer des pénalités en cas de non versement auprès des organismes de Sécurité sociale.

L'étendue de la responsabilité civile 

La responsabilité du dirigeant est individuelle lorsque la faute est commise par le dirigeant unique, ou lorsque la faute peut être imputée individuellement à un dirigeant, en cas de pluralité.

Toutefois, la responsabilité peut être solidaire lorsque la faute est commise par plusieurs dirigeants, par un organe collégial tel que les administrateurs ou les membres du directoire d'une société anonyme (SA). Il reste possible pour chaque membre d'écarter sa propre responsabilité en établissant qu'il s'est opposé à la décision par exemple.

Dans le cas d'une cogérance, ce n'est pas un organe collectif, ainsi la responsabilité de chaque gérant doit être établie individuellement, sauf si tous les gérants participent à la faute.

La solidarité implique que tous les dirigeants doivent payer l'intégralité du montant de la réparation à la victime. Le juge a la faculté de déterminer la part contributive de chaque dirigeant au préjudice.

De manière générale, il est possible pour le dirigeant de s'exonérer de sa responsabilité lorsqu'il prouve qu'il n'a pas influencé le comportement de l'auteur des faits reprochés, ou lorsqu'il a délégué ses pouvoirs à une personne pourvue des compétences, de l'autorité et des moyens pour faire respecter la réglementation.

Qui est compétent pour engager la responsabilité du dirigeant ? 

L'action sociale en réparation contre les dirigeants est engagée lorsque la société a subi un préjudice, par la société elle-même, par l'intermédiaire de ses représentants légaux ou encore par les associés. Elle peut être engagée librement par les personnes intéressées, toute clause contraire étant réputée non écrite.

Le préjudice de la société doit être actuel, ce qui exclut les risques fiscaux ou financiers.  Un lien de causalité entre la faute et le préjudice subi doit être établi et ce préjudice devra être réparé en intégralité. La charge de la preuve incombe à la société, elle doit apporter la preuve du préjudice subi.

Par ailleurs, le Code de commerce prévoit des règles particulières pour les dirigeants de SARL et de SA. Le législateur autorise un associé ou un actionnaire d'agir individuellement (action sociale ut singuli), quelle que soit la fraction du capital qu'il représente. Cette action est subsidiaire, à savoir qu'elle s'exerce en cas de carence des organes sociaux, lorsque la société n'a pas agit par le biais de son représentant légal notamment.

L'exercice de l'action sociale peut se faire aussi par le biais de groupe d'associés ou d'actionnaires, le groupe devant représenter au moins 10% du capital dans le cadre d'une SARL et 5% dans le cadre des SA (ces dernières font l'objet de seuils particuliers au delà de 750 000¤ de capital social). Dans ce cas, un mandataire commun doit être désigné pour exercer l'action sociale.

L'action en responsabilité se prescrit par 3 ans à compter du fait dommageable ou s'il a été dissimulé, de sa révélation, sauf dans le cas d'un crime où la prescription est de 10 ans.

Par ailleurs, une action individuelle peut être engagée contre les dirigeants, tout associé ou actionnaire peut demander la réparation d'un préjudice qu'il a subi personnellement.

Enfin, un chef d'entreprise peut également engager sa responsabilité pour un préjudice à l'égard d'un tiers, lorsqu'il a commis une faute séparable de ses fonctions, imputable personnellement. Par exemple, commet une faute considérée comme séparable, le dirigeant qui a volontairement trompé un fournisseur sur la solvabilité de la société.

La responsabilité pénale du chef d'entreprise

La responsabilité pénale du dirigeant peut être engagée même lorsqu'il n'a pas personnellement participé à l'infraction (du fait d'autrui), voire même si aucun préjudice n'a été constaté. Il suffit que le dirigeant contrevienne à un texte pénal pour que sa responsabilité soit mise en cause. Les infractions peuvent être caractérisées par le Code pénal, le Code de commerce ou encore la législation du travail.

De par sa nature (procédure accusatoire, que l'on oppose à la procédure inquisitoire en matière civile), c'est le ministère public qui poursuit le chef d'entreprise pour les faits litigieux qui lui sont reprochés.

Les victimes de l'infraction peuvent aussi se constituer parties civiles, c'est-à-dire demander la réparation du préjudice subi (responsabilité civile). 

Plusieurs types d'infractions sont prévues par le Code pénal pour mettre en cause la responsabilité pénale du dirigeant :

  • fraude fiscale ;
  • le faux et usage de faux en écriture ;
  • le détournement de fonds ;
  • la négligence des règles de sécurité ;
  • les infractions douanières ;
  • les infractions environnementales ;
  • infractions au code de la route ;
  • les tromperies sur la qualité du produit vendu.

En revanche, les dirigeants peuvent s'exonérer de responsabilité pénale en cas de force majeure, ou s'ils prouvent qu'ils n'étaient pas en mesure d'influencer le comportement de l'auteur de l'infraction. Autre cas, en déléguant ses pouvoirs à une personne, pourvue de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires pour faire respecter la réglementation. Le chef d'entreprise peut aussi prouver l'absence de faute d'imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement.

Si le dirigeant est reconnu coupable de l'infraction dont il est accusé, les sanctions peuvent être : une peine de prison, une amende, un jour-amende ou encore une contrainte pénale.