Responsabilité pénale des entreprises : infractions, conditions et sanctions applicables

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Les sociétés sont aussi soumises à la responsabilité pénale, comme leur dirigeant. En effet, les personnes morales sont pénalement responsables des infractions commises pour leur compte, par leurs organes ou représentant selon les dispositions de l'article 121-2 du Code pénal.

Les sociétés « punissables » par le Code pénal 

L'article 121-2 du Code pénal prévoit la responsabilité pénale des entreprises qui possèdent la personnalité morale, ce qui exclut les sociétés de fait ou encore les sociétés en participation.

La société peut être responsable pénalement tout au long de sa durée de vie, peu importe qu'elle soit ultérieurement prononcée comme nulle. Par ailleurs, elle perdure même après la dissolution, étant donné que la personnalité morale continue pour les besoins des opérations de liquidation.

Les sociétés étrangères sont aussi soumises à la responsabilité pénale pour leurs infractions commises sur le territoire français, pour autant que leur personnalité morale soit reconnue. Il suffit qu'un des éléments constitutifs de l'infraction soit constaté pour qu'une sanction pénale soit appliquée.

Les infractions punissables

Toutes les infractions au sens du droit pénal français sont susceptibles d'engager la responsabilité des sociétés ayant la personnalité morale. Il existe des exceptions en matière de presse et de communication audiovisuelle qui ne seront pas envisagées.

Pour que la société soit reconnue coupable, encore faut-il que l'infraction lui soit imputable. Deux conditions cumulatives doivent être réunies :

  • l'infraction a été commise par les organes représentants ou dirigeants ; 
  • elle a été commise pour le compte de la société.

Infraction commise par les organes représentants ou les dirigeants

Pour que la responsabilité pénale de la société soit qualifiée, il faut que l'infraction soit imputable aux organes représentants ou dirigeants de ladite société.

Sont notamment concernées par la responsabilité pénale, les infractions commises par les personnes ou instances collégiales qui ont le pouvoir de prendre des décisions au nom de la société. Le Code pénal désigne expressément ( liste non exhaustive) :

  • conseil d'administration ou directoire ;
  • président du conseil d'administration ;
  • directeurs généraux ; 
  • conseil de surveillance ; 
  • président ;
  • assemblée générale ; 
  • administrateur provisoire.

En revanche, sont exclus les organes qui disposent seulement d'un titre honorifique.

La notion de « représentants » englobe toutes  les personnes qui ont reçu une délégation de pouvoir du représentant légal de la société, ou une subdélégation, et qui est pourvue, de la compétence, de l'autorité et des moyens pour accomplir ses fonctions. La délégation de pouvoir n'est pas nécessairement expresse, la responsabilité peut être engagée par des organes représentants de fait de la société.

Étant donné que la personne morale ne peut agir de façon matérielle, il faut que ses représentants réunissent les éléments constitutifs d'une infraction, à savoir un élément matériel (les agissements matériels), ainsi qu'un élément moral (la volonté ou l'intention délibérée de commettre une infraction).

Même si ces éléments sont réunis, il n'en reste pas moins que l'infraction doit être imputée aux représentants pour que la responsabilité pénale de la société soit retenue.

La responsabilité pénale de la personne morale n'exige pas que les faits reprochés soient distincts de ceux des organes représentants ou des dirigeants. Elle est engagée dès lors que les faits reprochés ont été commis pour le compte de la personne morale.

Infraction commise pour le compte de la société

La notion de « pour le compte » n'est pas définie par le Code pénal. Ainsi, cela implique que tout acte présentant un intérêt pécuniaire ou autre, direct ou indirect, est susceptible d'être accompli pour le compte de la personne morale.

L'infraction doit donc être rattachée à la société personne morale. Inversement, cela exclut les hypothèses dans lesquelles un représentant ou dirigeant en a retiré un avantage personnel ou que l'infraction a été commise en dehors de leurs fonctions. Dans ce dernier cas, seule la responsabilité pénale de l'organe ou des dirigeants sera retenue.

En effet, il est possible que la responsabilité pénale des personnes physiques soit aussi retenue par les juges. Le Code pénal ne parle pas à proprement parler de cumul des responsabilités, même si des poursuites sont engagées pour les mêmes faits reprochés.

Par ailleurs, la société doit être tenue responsable même lorsque l'organe représentant ou le dirigeant a délégué ses pouvoirs à un préposé (notamment les salariés).

Hypothèse des infractions non intentionnelles

Le Code pénal prévoit cette hypothèse à l'article 121-3 al 4.

Les infractions considérées comme non intentionnelles commises par les personnes physiques qui n'ont pas causé directement des dommages, mais qui ont créé ou contribué à causer le dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, ne sont responsables pénalement que s'il est établi qu'elles ont soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévu par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer.

Cela inclut notamment l'imprudence, la négligence et les manquements à une obligation de sécurité. 

Même non intentionnelle, la faute commise par la personne physique n'empêche pas d'engager la responsabilité pénale de la société.

Les sanctions applicables 

L'amende fait partie des peines pour crime, délit ou contravention applicables à une personne morale. Le taux maximal est le quintuple de celui prévu pour les personnes physiques, en fonction de l'infraction commise.

Lorsqu'il s'agit d'un crime pour lequel aucune peine d'amende n'est prévue pour les personnes physiques, le montant maximal atteint 1 000 000¤.

Le juge peut prononcer une peine inférieure notamment lorsqu'il prend en compte les ressources et les charges de l'auteur de l'infraction. Inversement, il peut majorer l'amende dans la limite de 10% de son montant pour financer les victimes, en prenant en compte la situation de l'auteur de l'infraction.

En outre, d'autres peines sont applicables à la société en cas de délit ou de crime commis par la personne morale (liste non exhaustive) :

  • la dissolution ; 
  • le placement sous surveillance judiciaire pendant 5 ans ; 
  • la fermeture de l'établissement pendant 5 ans ; 
  • l'interdiction définitive ou temporaire d'exercer des activités professionnelles ou sociales.