IFC : tout comprendre de la nouvelle méthode de l'ANC !

Article écrit par (17 articles)
Modifié le
7 017 lectures

Le cadre comptable relatif aux indemnités de fin de carrière (IFC) est régi par la recommandation n° 2013-02 de l'ANC pour les comptes annuels et les comptes consolidés établis selon les normes comptables françaises.

En novembre 2021, l'ANC a mis à jour cette recommandation et, désormais, à côté de la méthode classique « rétrospective prorata temporis », une autre méthode de calcul de la dette actuarielle peut être retenue !

Alors, comme dirait l'autre, « la nouvelle méthode de l'ANC, comment ça marche ? »...

Contexte lié à l'IAS19

Au niveau international, les règles comptables relatives aux IFC sont encadrées par l'IAS19, « Employee Benefits ».

En mai 2021, l'IASB (International Accounting Standards Board) a validé la position prise par le Comité d'interprétation des normes IFRS (IFRIC) concernant le cas d'un régime à prestations définies conditionnant l'octroi d'une prestation à la fois en fonction de l'ancienneté, pour un montant maximal plafonné et au fait qu'un membre du personnel soit employé par l'entité lorsqu'il atteint l'âge de la retraite.

 

Évolution par ricochet en France

En novembre 2021, l'ANC a intégré cette position dans sa recommandation n° 2013-02.

Elle a ainsi introduit un choix de méthodes relatif à la répartition des droits à prestations pour les régimes à prestations définies conditionnant l'octroi d'une prestation à la fois en fonction de l'ancienneté, pour un montant maximal plafonné.

Évidemment, sous réserve, d'une part que le salarié soit employé par l'entité lorsqu'il atteint l'âge de la retraite, et d'autre part, que les « années de services » prises en compte, c'est-à-dire toute la période d'emploi, soient consécutives.

 

Principe de la nouvelle méthode

En pratique, avec la nouvelle méthode, la constitution de la dette actuarielle n'est plus lissée sur la totalité de la période d'emploi, mais sur la période qui couvre les (dernières) années de services rendus par le salarié qui correspondent à l'ancienneté lui octroyant l'indemnité maximale plafonnée (ou entre la date d'emploi et la date de départ en retraite, si la durée ainsi déterminée est inférieure).

Ainsi, cette nouvelle méthode a un impact sur le montant de la dette actuarielle notamment :

  • si les conventions collectives ou accords d'entreprise applicables prévoient des indemnités de fin de carrière plafonnées, telles que 0,5 mois de salaire au titre de chaque année d'ancienneté, plafonnées à 10 mois ;
  • pour la dette actuarielle des salariés dont l'ancienneté au terme sera supérieure à l'ancienneté donnant droit à l'indemnité maximale plafonnée.

Par contre, le montant de la dette actuarielle avec la nouvelle méthode de l'ANC et la méthode classique « rétrospective prorata temporis » sera le même lorsque :

  • la convention collective ne plafonne pas les indemnités de départ à la retraite ;
  • et/ou les salariés ne pourront pas prétendre à l'indemnité plafonnée lors de leur départ à la retraite, en raison d'une ancienneté au terme inférieure à celle ouvrant à l'indemnité plafonnée.

 

Illustrations concrètes

Pour être concret, prenons un exemple...

A la date de son départ en retraite, fixé à 62 ans, sous réserve qu'il soit présent dans l'entité à cette date, le salarié bénéficiera d'une indemnité.

Cette indemnité forfaitaire est égale à 0,5 mois de salaire final acquis au titre de chaque année d'ancienneté et est plafonnée à 20 années de services, soit une indemnité de 10 mois maximum.

 

Cas n°1

Le salarié présente au jour du calcul une ancienneté de 13 ans.

La dette actuarielle (DA) n'est à constituer que sur la période qui couvre les 20 dernières années de services rendus par le salarié.

Dès lors, le prorata d'ancienneté appliqué pour la DA à la date de calcul est de (20 - 17) / 20, soit 3/20 et la constitution de la DA est lissée sur 20 ans.

NB : avec la méthode classique « rétrospective prorata temporis », le calcul de la DA serait réalisé avec un prorata d'ancienneté de 13/30 et avec un lissage sur 30 ans.

Cas n°2

Le salarié présente au jour du calcul une ancienneté de 21 ans.

Le prorata d'ancienneté appliqué pour la DA à la date de calcul est de (20 - 9) / 20, soit 11/20 et la constitution de la DA est lissée sur 20 ans.

NB : Avec la méthode classique « rétrospective prorata temporis », le calcul de la DA serait réalisé avec un prorata d'ancienneté de 21 / 30 et avec un lissage sur 30 ans.

Cas n°3

Le salarié présente au jour du calcul une ancienneté de 7 ans.

A la date de calcul, l'ancienneté non acquise étant supérieure à l'ancienneté pour allouer les droits max plafonnés, la DA est nulle. La constitution de la DA sera lissée sur 20 ans.

NB : Avec la méthode classique « rétrospective prorata temporis », le calcul de la DA serait réalisé avec un prorata d'ancienneté de 7 / 30 et avec un lissage sur 30 ans, y compris à la date de calcul de l'ancienneté de 7 ans acquise.

 

Impacts chiffrés sur l'effectif d'une entreprise

Pour appréhender l'impact de la nouvelle méthode de l'ANC au niveau d'une entreprise, il est possible de présenter des simulations avec des conventions collectives différentes.

Les données de l'exemple sont les suivantes :

  • effectif : 29 salariés ;
  • ancienneté moyenne actuelle : 17 ans ;
  • ancienneté moyenne non acquise : 18 ans ;
  • masse salariale 2021 : 971 674€ (bruts).

Les résultats obtenus pour la dette actuarielle (DA) à fin 2021 sont les suivants :

Conventions collectives

DA avec la méthode rétrospective prorata temporis

DA avec la nouvelle méthode de l'ANC

Commentaires

Industries pharmaceutiques

353427€

294068€

Plafond de 9 mois après 30 ans d'ancienneté

Hospitalisation privée à but non lucratif

230224€

190651€

Plafond de 6 mois après 30 ans d'ancienneté

Journalisme

195323€

162346€

Plafond de 5 mois après 30 ans d'ancienneté

Métallurgie

208004€

202844€

Plafond de 6 mois après 40 ans d'ancienneté

Architecture

229678€

229678€

Pas de plafond, donc aucun impact !

On constate bien que plus les indemnités sont plafonnées tôt et favorables en termes de droits, plus l'impact de la nouvelle méthode de l'ANC est important sur le montant de la dette actuarielle et, de fait, sur la dotation annuelle en cas de provision.

 

1ère application

La mise en «uvre de la première application de la nouvelle méthode de l'ANC est ouverte à compter de novembre 2021, soit la date de publication de la modification de la recommandation n° 2013-02.

Une application rétroactive est possible à compter des exercices clos à compter du 30 juin 2021.

Cette nouvelle méthode peut donc s'appliquer de fait aux comptes annuels des exercices clos le 31 décembre 2021.

 

Traitement du changement de méthode

Le changement résultant du choix de méthodes est assimilé à un changement de réglementation comptable qui se traduit par un changement de méthode comptable.

Si l'entreprise a provisionné la dette actuarielle, il s'agit :

  • à l'ouverture de l'exercice concerné, d'enregistrer en capitaux propres l'écart de la dette actuarielle entre l'ancienne méthode et la nouvelle méthode choisie ;
  • à la clôture, de comptabiliser au compte de résultat la variation la dette actuarielle déterminée selon la nouvelle méthode.

La provision constituée n'étant pas déductible fiscalement (et sa reprise non imposable), il n'y a pas lieu de tenir compte d'un effet d'impôt.

Si l'entreprise s'est limitée à une information en annexe de la dette actuarielle, elle devra actualiser le montant de celle-ci.

Dans tous les cas, une information complète appropriée sera à fournir en annexe des comptes annuels.


MyFides est une association créée par des experts-comptables pour les experts-comptables et leurs clients. Elle a développé initialement une solution exclusive de chiffrage et présentation des passifs sociaux de l'entreprise liés aux indemnités de fin de carrière : IFC by MyFides.

Retrouvez notre lexique des indemnités de fin de carrière et notre FAQ.