Rémunérations des associés et dirigeants de SEL

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Modifié le 09/02/2024
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Dans une mise à jour BOFiP du 15 décembre 2022, l'administration fiscale avait fixé un nouveau régime fiscal pour les sociétés d'exercice libéral (SEL). Ce nouveau régime était en principe applicable à compter du 1er janvier 2023.

Toutefois, dans une nouvelle mise à jour BOFiP du 5 janvier 2023, l'administration fiscale prend acte du fait que « certains contribuables n'étaient pas en mesure de mettre en ½uvre ce régime d'imposition en BNC dès le 1er janvier 2023 » et tolère l'application des anciens régimes jusqu'au 31 décembre 2023.

Le 16 novembre 2023, l'administration fiscale a apporté des précisions à la suite d'un rescrit, concernant l'imposition des revenus d'associés à compter du 1er janvier 2024.

Enfin, le 27 décembre 2023, le BOFiP est actualisé une nouvelle fois. Des précisions sont apportées sur le régime fiscal applicable aux associés de SEL en matière d'impôt sur le revenu, de TVA et de CFE.

Les professionnels libéraux peuvent exercer leur activité sous forme de sociétés de capitaux, les sociétés d'exercice libéral (SEL). Les SEL peuvent prendre la forme de :

  • société d'exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) ou SELARL unipersonnelle ;
  • société d'exercice libéral à forme anonyme (SELAFA) ;
  • société d'exercice libéral par actions simplifiée (SELAS) ;
  • société d'exercice libéral en commandite par actions (SELCA).

En principe, ces sociétés sont soumises aux dispositions des sociétés commerciales concernées. Elles sont donc soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun.

Si le régime fiscal de la société est clair, le régime fiscal de la rémunération des associés nécessite quelques explications complémentaires. L'administration fiscale a en effet modifié sa doctrine le 15 décembre 2022 par une mise à jour de sa base BOFiP.

L'imposition des revenus d'associés de SEL 2022

Avant la mise à jour du 15 décembre 2022 l'administration fiscale considérait que :

  • les rémunérations des associés d'une société d'exercice libérale (SEL) qui exercent leur activité en son sein constituaient des traitements et salaires (voir BOI-RSA-GER-10-30, 12 sept. 2012) ;
  • les rémunérations des dirigeants de SELARL gérants majoritaires et des associés gérants de SELCA, devaient être imposées selon l'article 62 du Code général des impôts (CGI).

Le premier point allait à l'encontre de deux décisions du Conseil d'État des 16 octobre 2013 (décision n°339822) et 8 décembre 2017 (décision n°409429).

L'imposition des revenus d'associés à compter du 1er janvier 2023

Pour déterminer le régime d'imposition, il convient de distinguer la rémunération relative au mandat social de celle relative à l'activité libérale (« rémunération technique »).

Attention

Dans une mise à jour BOFiP du 5 janvier 2023, l'administration fiscale prend acte du fait que certains contribuables ne sont pas en mesure de mettre en ½uvre l'application du régime BNC dès le 1er janvier 2023, prévue par la mise à jour BOFiP du 15 décembre 2022. Elle admet donc que les contribuables concernés se prévalent des règles antérieures jusqu'au 31 décembre 2023. Cette tolérance concerne :

  • rémunérations des associés de SEL perçues au titre de l'exercice de leur activité libérale dans ces sociétés imposées auparavant dans la catégorie des traitements et salaires ;
  • rémunérations des associés gérants majoritaires de SELARL et d'associés gérants de SELCA, imposées auparavant dans les conditions prévues à l'article 62 du CGI.

Rémunération au titre du mandat social

Le régime d'imposition de la rémunération versée au titre du mandat social dépend de la forme juridique :

  • dans les SELARL, la rémunération du gérant majoritaire relève de l'article 62 du CGI (c'est à dire assimilé aux traitements et salaires) ; 
  • dans les SELAS/SELAFA, la rémunération versée au titre du mandat social relève de la catégorie des traitements et salaires.

Rémunération au titre de l'activité libérale (« rémunération technique »)

La détermination du régime d'imposition des rémunérations relatives aux fonctions techniques doit ici prendre en compte un critère supplémentaire, celui de l'existence d'un lien de subordination avec la société :

  • en l'absence de lien de subordination avec la société, la rémunération au titre de l'activité libérale doit être imposée dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC ; BOI-RSA-GER-10-30, 15 déc. 2022).

Une exception : le cas du gérant majoritaire de SELARL et des associés gérants de SELCA dont les fonctions sont indissociables du mandat. Dans ce cas, la rémunération sera imposée selon l'article 62 du CGI, c'est-à-dire assimilé aux traitements et salaires).

  • en présence d'un lien de subordination avec la société, la rémunération au titre de l'activité libérale doit être imposée dans la catégorie des traitements et salaires.

Source : compte Linkedin de Lionel Canesi, président CNO

Conséquences pratiques

Certains associés de sociétés d'exercice libéral doivent donc passer d'un régime de traitements et salaires ou assimilé à un régime d'imposition BNC.

L'impact est lourd, car ces derniers sont tenus, lorsqu'ils sont imposés selon un régime réel, de tenir une comptabilité présentant le détail de leurs recettes et de leurs dépenses professionnelles (CGI, art. 99). La question de l'imposition à TVA doit également être examinée, alors qu'elle ne l'était pas auparavant.

C'est notamment la raison pour laquelle certaines professions libérales, dont le Conseil national des barreaux, réclamaient de longue date l'imposition des associés exerçant dans les SEL selon les dispositions de l'article 62 du CGI. Un amendement en ce sens avait d'ailleurs été rejeté lors de la discussion du projet de loi de finances 2023.

Quel impact sur le régime fiscal et social des rémunérations des associés de SEL ?

L'administration fiscale a revu sa doctrine en date du 27 décembre 2023. A compter du 1er janvier 2024, les rémunérations perçues par les associés d'une société d'exercice libéral (SEL) au titre de l'exercice de leur activité libérale dans cette société sont imposables en principe dans la catégorie des BNC.

Elles peuvent toutefois être imposées dans la catégorie des traitements et salaires lorsqu'il existe un lien de subordination à l'égard de la société. Aucune modification n'a été apportée au régime social des associés de SEL.

L'imposition des revenus d'associés à compter du 1er janvier 2024 : les dernières précisions de l'administration fiscale

En réponse à un rescrit formulé par un organisme membre de l'UNAPL, la direction de la législation fiscale (DLF) a apporté en réponse, quelques précisions dans un courrier du 16 novembre 2023.

À ce stade, voici les points clés à retenir :

  • les professionnels doivent préparer la déclaration 2035 ;
  • ils pourront bénéficier du régime micro-BNC ;
  • les cotisations sociales dites « Madelin » ne seront pas déductibles de la base de traitements et salaires ;
  • ces professionnels ne seront pas assujettis à la TVA ;
  • concernant la CFE, elle sera applicable pour les SEL, mais pas pour les associés individuellement pour leur activité au sein de ces SEL ;
  • il ne sera pas possible d'opter pour l'IS.

D'autres rescrits, émis par d'autres membres de l'UNAPL, sont actuellement en cours d'examen, promettant de futures clarifications.

Dans une mise à jour BOFiP du 27 décembre 2023, le nouveau régime est entré en vigueur. Ainsi, à compter de l'imposition des revenus 2024, les rémunérations des associés de SEL sont en principe imposées dans la catégorie des BNC. Ce n'est que si l'existence d'un lien de subordination entre l'associé et la société caractérisant une activité salariale est constaté, que les rémunérations relèvent de la catégorie des traitements et salaires. Si les associés de SEL sont aussi gérant (gérant majoritaire SELARL ou SELCA), les sommes perçues sont imposées dans la catégorie des BNC et non plus celle de l'article 62 du CGI, à condition que ces sommes puissent être distinguées de celles perçues au titre de leur fonction de gérant de société. Les gérants peuvent apporter la preuve par tout moyen de la distinction entre les sommes de l'activité libérale et au titre des fonctions de gérant. En tout état de cause, l'administration considère que 5% des revenus perçus par les gérants relèvent de l'article 62 du CGI.

Par ailleurs, les associés de SEL peuvent relever du régime micro-BNC à la condition qu'ils respectent le seuil de chiffre d'affaires et qu'ils ne soient pas exclus expressément du régime (article 102 ter du CGI). En revanche, ils ne peuvent opter pour le régime de l'assimilation à une EURL (entraînant l'assujettissement à l'IS).