La procédure de mandat ad-hoc, solution préventive en cas de difficultés financières

Article écrit par (1328 articles)
Publié le
Modifié le 16/07/2024
1 301 lectures

L'entreprise qui se trouve en difficulté financière peut agir pour prévenir et traiter la situation avant de devoir entamer une procédure collective.

Outre la prévention par l'alerte qui peut être réalisée par le commissaire aux comptes, les associés ou actionnaires, le président du tribunal de commerce ou du tribunal judiciaire ou encore le comité social économique, l'entreprise peut également solliciter une procédure de mandat ad-hoc dont nous allons étudier les contours.

A qui s'adresse la procédure de mandat ad-hoc ?

Toutes les entreprises, y compris les micro-entrepreneurs, peuvent recourir au mandat ad hoc, indépendamment de leur taille ou de leur chiffre d'affaires.

Qu'est-ce qu'un mandat ad-hoc ?

La procédure de mandat ad-hoc est un dispositif de prévention des difficultés économiques, financières et sociales d'une entreprise. Cette procédure est réservée uniquement aux entreprises qui ne sont pas en cessation de paiement dans le but de redresser la situation de celle-ci en toute confidentialité. En effet, le secret de la procédure ouverte est gardé puisque les tiers et les salariés ne sont pas tenus d'être informés de la mise en ½uvre du mandat ad-hoc comme le mentionne l'article L611-3 du Code de commerce : « Le débiteur n'est pas tenu d'informer le comité social et économique de la désignation d'un mandataire ad hoc. »

Comment est déclenchée la procédure de mandat ad hoc ?

La mise en place du mandat ad-hoc peut être initiée par l'entreprise elle-même ou par le président du tribunal de commerce ou du tribunal judiciaire. Le mandat ad-hoc est encadré par le Code de commerce et abordé dans la partie relative à la prévention des difficultés des entreprises.

Un arrêté du 5 juillet 2024 (NOR : JUSB2418778A) désigne 12 tribunaux de commerce qui deviendront les tribunaux des activités économiques (TAE) dès le 1er janvier 2025.

Cette expérimentation de 4 ans s'inscrit dans la loi de programmation 2023-2027 du ministère de la Justice. Les conditions d'application sont précisées par le décret n°2024-674 du 3 juillet 2024.

Les TAE auront compétence pour gérer les procédures amiables, collectives, et les contestations relatives aux baux commerciaux liés aux procédures de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire.

Les parties seront dispensées de l'obligation d'avoir un avocat pour les demandes inférieures à 10 000¤.

Les dispositions relatives aux compétences des TAE en matière de procédure amiable et collective ne concernent pas les débiteurs exerçant une profession du droit réglementée.

La demande de désignation par l'entreprise

Le représentant légal de l'entreprise qui n'est pas en état de cessation des paiements peut faire la demande de désignation d'un mandataire ad-hoc au moyen d'un formulaire mis à disposition. Ce formulaire est à adresser au président du tribunal de commerce pour les activités commerciales et artisanales et au président du tribunal judiciaire pour les activités libérales.

La demande formulée s'accompagne de documents justifiants de la situation actuelle de l'entreprise :

Le président du tribunal étudie alors la demande en recevant le dirigeant de l'entreprise et recueille ses observations. S'il juge nécessaire la mise en place d'un mandat ad-hoc, il rend une ordonnance de nomination d'un mandataire ad-hoc.

La demande de désignation par le tribunal

Dans le cadre de la prévention par l'alerte, le président du tribunal de commerce ou judiciaire peut convoquer le représentant légal de l'entreprise en difficulté afin de s'entretenir avec lui de la situation économique de l'entité. Cet entretien permet ensuite au président du tribunal de mettre en ½uvre, le cas échéant, une procédure permettant de prévenir ces difficultés. Ainsi, à l'issue de l'entretien, le président du tribunal peut choisir d'ouvrir une procédure de mandat ad-hoc mais également une procédure de conciliation, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire.

En cas de demande d'ouverture par le président du tribunal, les formalités à remplir sont identiques à celles évoquées ci-dessus.

Le mandataire ad-hoc

L'article L611-3 du Code de commerce indique que « Le président du tribunal peut, à la demande d'un débiteur, désigner un mandataire ad hoc dont il détermine la mission. Le débiteur peut proposer le nom d'un mandataire ad hoc. La décision nommant le mandataire ad hoc est communiquée pour information aux commissaires aux comptes lorsqu'il en a été désigné ».

L'ordonnance de nomination du mandataire ad-hoc est strictement confidentielle. Elle a pour objectif de nommer un mandataire afin de lui confier la mission. L'ordonnance de nomination fixe les modalités de réalisation de la mission en précisant notamment la durée de la mission (généralement 3 mois pouvant être renouvelés), le montant des honoraires alloués ainsi que l'objet de la mission.

Le choix du mandataire

L'ordonnance de nomination sera notifiée au demandeur, au mandataire désigné ainsi qu'au commissaire aux comptes si l'entreprise en a désigné un. Le président du tribunal désigne librement le mandataire ad-hoc. Il s'agit généralement d'un administrateur judiciaire. A noter que le dirigeant peut également proposer le nom d'un mandataire. Néanmoins des conditions relatives à l'implication de celui-ci dans la société concernée s'appliquent et cette proposition ne s'impose pas au président du tribunal.

La mission

L'objectif du mandataire ad-hoc au travers de son intervention est de mettre en ½uvre un dispositif permettant d'éviter à l'entreprise d'être en état de cessation des paiements. Ainsi, le mandataire ad-hoc va avoir pour principale mission de renégocier les contrats en cours et de négocier à l'amiable des accords ou des rééchelonnements des dettes avec les différents partenaires de l'entreprise (fournisseurs, établissements bancaires, organismes sociaux et fiscaux...).

Durant la mission du mandataire, le dirigeant ou l'exploitant continue de gérer l'entreprise. Il travaille en partenariat avec le mandataire afin de trouver des solutions adéquates permettant de résorber les difficultés financières rencontrées.

Quelles issues pour une procédure de mandat ad-hoc ?

La mission du mandataire ad-hoc prend fin lorsque la procédure est une réussite : lorsqu'une entente sur les échéances de règlement a pu être trouvée avec les partenaires de l'entité et qu'un accord est signé.

En cas d'échec de la procédure notamment parce que les négociations pour revoir les échéanciers n'ont pu aboutir à une réponse favorable de la part des créanciers, la mission prend également fin et le représentant légal de l'entreprise a la possibilité de demander l'ouverture d'une procédure de conciliation.

Il est également important de noter que l'exploitant individuel ou le dirigeant a la possibilité de mettre fin à tout moment à la procédure de mandat ad-hoc puisque durant celle-ci il reste décisionnaire au sein de son entreprise.