Chaque année, l'association française des trésoriers d'entreprises (AFTE) récompense le meilleur mémoire en finance et trésorerie. Cette distinction valorise les travaux d'étudiants qui apportent des idées nouvelles et utiles pour le métier de trésorier d'entreprise.
Lors de l'événement 2023, tenu au Palais Brongniart à Paris les 14 et 15 novembre derniers, Kamal Hasnaoui-Amri s'est distingué avec son mémoire sur le suivi budgétaire et la gestion des coûts de cession dans les opérations de détourage, offrant un guide pratique pour les experts-comptables. Il nous en dit plus dans cet article.
Quel est votre parcours ?
Expert-Comptable et titulaire d'un double Master en Finance, je possède plus de 10 ans d'expérience dans l'accompagnement des directions générales et des directions financières dans leurs grands projets de transformation. Du design de la solution cible au déploiement de la stratégie opérationnelle, j'ai réalisé différentes missions auprès de grands groupes français et internationaux comme la définition d'un Target Operating Model, l'intervention dans les programmes de fusion/acquisition/cession (PMI), la refonte des processus au sein de la direction financière et le management de transition.
Si des lecteurs souhaitent en savoir plus et échanger sur leurs projets, ils peuvent me joindre directement via Linkedin.
Comment présenter le sujet de votre mémoire à un non-initié ?
Mon mémoire répond à une problématique rencontrée par les entreprises qui gèrent plusieurs activités interconnectées et qui souhaitent céder l'une d'elles. Un telle opération nécessite une réorganisation du groupe, pour que l'activité destinée à être vendue devienne totalement autonome.
Mon mémoire est en fait un guide pratique à destination des cabinets, et notamment des collaborateurs, afin qu'ils puissent accompagner les clients dans ce type d'opération dite de carve-out, ou opération de détourage en français.
Cette mission de conseil va nécessiter la mise en place de différentes étapes. Mon mémoire va notamment aider les collaborateurs à :
- identifier les différents coûts de cession ;
- proposer une démarche de suivi budgétaire actualisée ;
- répondre au besoin du COMEX ;
- apporter une aide à la direction financière, notamment sur les normes en vigueur.
Il est vrai aussi que la mise en place de cette mission peut nécessiter une réorganisation du cabinet. Mon mémoire propose donc également une méthodologie afin d'aider l'expert-comptable à réorganiser son équipe à cette fin.
Pourquoi avoir choisi ce sujet ?
J'ai toujours été intéressé par le monde des fusions-acquisitions et comment cela impacte les entreprises, d'un point de vue économique.
J'ai décidé d'ailleurs d'en faire mon métier, je conseille actuellement des entreprises qui souhaitent réaliser ce type d'opérations.
C'est un sujet très actuel. En temps de crise, beaucoup d'entreprises souhaitent se séparer de l'activité la moins rentable ou la moins stratégique. D'après mes recherches, ce type de transactions, impliquant des sociétés françaises (vendeuses ou acheteuses), représentent chaque année un marché de 150 à 300 milliards d'¤.
Pourtant les experts-comptables français ne se sont pas encore positionnés sur ce secteur alors que, de part leur formation, ils sont les mieux placés pour répondre à ce besoin de conseil, qui selon moi va s'accroître.
Que représente pour vous ce prix de l'AFTE ?
Personnellement, je suis très fier de ce prix qui récompense 18 mois de travail.
Mais c'est aussi une reconnaissance pour l'ensemble de la formation de l'expertise comptable. Pour rappel, mon mémoire était en concurrence, au niveau national, avec ceux d'étudiants d'autres filières, appartenant à des écoles prestigieuses comme HEC, l'EDHEC, Dauphine ou La Sorbonne.
Ce prix confirme que les études d'expert-comptable représentent l'excellence au plus haut niveau.
C'est aussi la récompense d'un travail collectif. M. Carlier, directeur de l'ENOES, a d'abord cru en mon mémoire en décidant de le présenter à ce concours. J'ai également pu bénéficier de l'accompagnement de toute l'équipe pédagogique de l'ENOES, en particulier des précieux conseils de M. Pinero Vargas, qui m'a accompagné pour préparer ma soutenance.
Quelles sont les principales difficultés rencontrées dans la rédaction de votre mémoire ?
La principale difficulté est la nature confidentielle de ce type d'opérations, donc l'information et la documentation spécialisée sont très limitées. Je n'avais donc pas à ma disposition de ressources spécifiques auxquelles me référer. Je n'ai pas trouvé de confrère pour m'orienter sur le sujet stratégique de la gestion des coûts de cession.
Je me suis donc basé principalement sur mon expérience professionnelle et sur mon sens du business.
Comme axe d'amélioration possible, j'ai également constaté qu'il y avait peu d'informations concernant les spécificités sectorielles.
En quoi selon vous, cette distinction peut-elle être bénéfique pour l'image de la profession ?
L'attractivité de la profession est un vrai sujet. Je pense que les personnes extérieures à la filière n'ont pas conscience à quel point la formation de l'expert-comptable est technique, exigeante, complexe et sélective, mais tellement enrichissante.
Malheureusement le cliché de l'expert-comptable, cantonné uniquement à la réalisation de missions comptables, persiste. Selon moi, il faudrait peut-être changer l'intitulé même de la profession. « Expert-comptable » est trop réducteur. J'utilise souvent le terme « docteur des entreprises » ou alors « expert CFM (Compta-Finance-Management) » ou encore « expert CJFM (Compta-Juridique-Finance-Management) » [rire].
Ce prix permet justement de mettre en lumière les autres facettes de la profession et l'étendue de nos compétences.
Retrouvez les formations DEC à l'ENOES (éligibles au CPF).