Imputation des crédits d'impôt étrangers sur l'impôt sur les sociétés

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Le Conseil d'Etat, revenant sur sa jurisprudence antérieure, admet que les crédits d'impôts étrangers sont imputables sur l'impôt sur les sociétés dû au taux normal comme au taux réduit.

En application de la plupart des conventions fiscales internationales signées par la France, les revenus de capitaux mobiliers (notamment : dividendes et intérêts) de source étrangère perçus par des sociétés françaises sont imposables en France.

Cependant, l'Etat de la source des revenus (i.e. l'Etat étranger) est très souvent autorisé à prélever une imposition appelée retenue à la source, ce qui conduit à une double imposition.

Afin d'éliminer la double imposition, la retenue à la source acquittée à l'étranger ouvre en général droit à un crédit d'impôt d'imputable sur l'impôt sur les sociétés français.

S'agissant de l'imputation de ces crédits d'impôt, l'administration fiscale française, qui se fondait sur une décision antérieure du Conseil d'Etat (i.e. CE 29 octobre 2012, n°337253), précise dans sa doctrine que l'excédent de crédit d'impôt afférent aux revenus de capitaux mobiliers étrangers n'ayant pas pu être imputé sur l'impôt sur les sociétés au taux normal ne pouvait pas l'être sur l'impôt sur les sociétés dû au taux réduit (BOI-IS-RICI-30-10-20-20-20170201, n°70 et s.), alors que cela est admis pour les crédits d'impôt afférent à des revenus de capitaux mobiliers de source française (BOI-IS-RICI-30-10-20-20-20170201, n°1).

Dans un arrêt en date du 26 juin dernier, le Conseil d'Etat a remis en cause sa jurisprudence antérieure en jugeant que « l'imputation (...) de l'impôt retenu à la source sur les revenus de source française et sur les revenus de source étrangère perçus au cours d'un exercice s'opère sur l'impôt sur les sociétés à la charge du bénéficiaire de ces revenus au titre de cet exercice, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que cet impôt est dû au taux normal ou au taux réduit » (CE 9ème et 10ème  chambre réunies, 26 juin 2017, n°386269).

Exemple

Une société française relevant de l'impôt sur les sociétés dispose d'un stock de déficits en report de 200 000¤. Au titre de l'exercice N, elle réalise un bénéfice de 250 000¤, comprenant des revenus de capitaux mobiliers encaissés ouvrant droit à un crédit d'impôt de 30 000¤. La société remplit les conditions pour être imposée au taux réduit d'impôt sur les sociétés de 15%.

Après imputation de la totalité des déficits, le montant du bénéfice net de l'exercice N s'élève à 50 000¤. En application de la décision du Conseil d'Etat, l'intégralité du crédit d'impôt est imputable.

Sur la base de la doctrine administrative, seule une fraction du crédit d'impôt, correspondant au montant du résultat taxable au taux normal de l'impôt sur les sociétés (i.e. égale à 11 880¤, soit 50 000¤ - 38 120¤) aurait été imputable. Le solde non imputable du crédit d'impôt aurait été perdu.

Les sociétés intéressées peuvent déposer une réclamation contentieuse auprès de l'administration fiscale, afin de faire valoir leur droit à l'imputation du crédit d'impôt. Le délai de réclamation court jusqu'au 31 décembre de la deuxième année suivant la date de mise en recouvrement.

Plus d'infos

  • Conseil d'État 9è et 10è section, décision n°386269 du 26 juin 2017



Clotilde Cattier, avocate spécialisée en fiscalité, inscrite au Barreau de Paris.
Contact : contact@clotilde-cattier.com

Après avoir passé deux ans chez STC Partners et six ans chez Taj (Deloitte), Clotilde a rejoint le cabinet Room Avocats, en Suisse. Elle partage son temps entre Paris et la Suisse.

Ses principaux domaines d'intervention, en fiscalité française et internationale, sont les suivants :

  • fiscalité patrimoniale (restructuration de patrimoine, transmission de patrimoine, acquisition/détention/cession de biens immobiliers, etc.) ;
  • fiscalité des particuliers (imposition des cadres internationaux et des dirigeants, traitement fiscal des pensions de retraite versées sous forme de capital, etc.) ;
  • installation en Suisse de personnes physiques et de sociétés ;
  • fiscalité générale des entreprises (restructurations, assistance à contrôle fiscale, intégration fiscale, problématiques de remontée des liquidités, etc.) ;
  • fiscalité immobilière (fiscalité des marchands de biens et des promoteurs immobiliers) ;
  • fiscalité internationale (transactions transfrontalières, traitement fiscal des flux internationaux, etc.) ;
  • opérations de fusions-acquisitions ;
  • régularisation de la situation fiscale des français détenant des avoirs non déclarés à l'étranger.