La charrue avant les bœufs ?

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Facture électronique : la profession était prête, les éditeurs étaient prêts, les PME étaient prêtes. Peut-être...

Pourtant, sans faire une analyse approfondie, de nombreux signes amènent à douter de la situation réelle, tout particulièrement pour les TPE, artisans, commerçants, professionnels libéraux et autres freelances (dont près de 1,5 millions de micro-entrepreneurs).

En ce qui me concerne, ce furent d'abord des factures de la vie courante. J'ai ainsi reçu cette facture d'une entreprise de climatisation mentionnant un taux de TVA de 20% mais calculée avec un taux de 10%. Erreur rapidement réparée par l'envoi d'une nouvelle facture... avec le même numéro ! Également, réception d'une facture d'un micro-entrepreneur dont plus des trois-quarts des mentions obligatoires manquaient...

Ensuite, je repère sur les réseaux sociaux une très intéressante vidéo d'Axonaut dans laquelle, à l'occasion d'un salon sont interrogés des créateurs de startups. Morceaux choisis :

  • « Comment je facture mes clients ? Directement en leur envoyant un PDF et avec un IBAN éventuellement.
    • Mensuellement.
    • Éditée moi-même avec un powerpoint.
    • Pour l'instant on les édite un peu à la main nous-même, comme ça... 
    • Un peu à l'ancienne comme ça, le petit Excel comme on aime bien... »

Quant à la réforme facture électronique :

  • « Non, je ne suis pas au courant de la réforme
    • Est-ce que vous connaissez Factur-X ?
    • Pas du tout.
    • Ah le ticket de caisse qui ne s'émet plus ? 
    • Celle qui dit que tout soit numérique, tout ça, quelque chose comme ça, non ? »

Certaines factures communiquées lors des examens menés par les OGA sont également... « intéressantes » !

Mais surtout, le principal : l'aveu même de certains confrères ! Et ce quelle que soit la taille de leur cabinet...

L'important est d'être intellectuellement honnête et conscient de la situation : avant de passer à la facture électronique il faut simplement que les chefs d'entreprise soient irréprochables en matière de facturation. Les outils existent pour atteindre cet objectif et sont de plus en plus performants. Le choix et leur mise en ½uvre est certainement la meilleure mission d'accompagnement qu'un expert-comptable puisse remplir aujourd'hui.

Première étape : rappeler la réglementation en matière de facturation comme les règles de numérotation et plus généralement les mentions obligatoires. Rappeler que tout professionnel qui utilise Excel, Word ou autre outil de bureautique, ne respecte pas la législation en matière de facturation. Il encourt des pénalités et même un rejet de sa comptabilité, etc.

Deuxième étape : convaincre les clients « qu'au-delà du respect de la loi, un logiciel de facturation leur apporte surtout de très nombreux avantages. S'équiper d'une solution de facturation est une question de sérieux, de démarche professionnelle et de volonté de bien gérer et piloter son activité. C'est une action responsable du chef d'entreprise par rapport à ses salariés et ses tiers. Facturer avec Excel ou Word est de l'amateurisme et une démarche peu responsable, souvent par manque d'accompagnement, méconnaissance de la gestion ou pire, pour économiser l'abonnement à un logiciel » (dixit Thomas White, dirigeant de NS2B).

Troisième étape : s'assurer que ces outils sont parfaitement adaptés aux besoins du chef d'entreprise :

  • de la facturation simple pour les consultants, les artisans : vente de services ou prestations 
  • à la gestion bâtiment : suivi de chantier, facturation à l'avancement des travaux, gestion des sous-traitants, retenue de garantie, gestion de stock, gestion des ressources, planification...
  • en passant par la gestion commerciale : base article, gestion de stock, emplacement, multi-dépôt, gestion de N° de série, de lot, facturation périodique, abonnement, gestion du SAV maintenance, solution de livraison déportée, tout commerces B2B ou B2C dans le négoce ou dans des prestations plus évoluées 
  • sans oublier tous types de commerce de détail (restaurant, soins et beauté, ventes sur les marchés, etc.) ainsi que ceux qui nécessitent un seul logiciel pour gérer plusieurs canaux (émission de facture, vente au comptoir et e-commerce)... liste non limitative !

Quatrième étape indispensable : s'assurer que ces outils sont parfaitement maîtrisés.

Alors ne mettons pas la charrue avant les b½ufs : ce n'est qu'à l'issue de cette ultime étape que tous ensemble (experts-comptables et chefs d'entreprise) nous pourrons dire : facture électronique ? Nous sommes prêts !


 

Serge Heripel est expert-comptable retraité et vice-président de l'organisme mixte de gestion agréé France Gestion.