Combien peut facturer un expert-comptable à son client ?

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La question de la facturation est une question récurrente que se posent souvent les jeunes professionnels de l'expertise comptable. Ils ne sont pas les seuls.

A chaque fois qu'un expert-comptable propose un nouveau type de prestation ou signe une nouvelle lettre de mission, la question se pose à nouveau. Combien faut-il facturer ?

Philippe Barré répond à cette question lors des Estivales de l'ANECS et du CJEC avec humour et pédagogie. Voici quelques grands principes qui ont leur importance, déjà appliqués dans son cabinet qui fait environ 80% de conseil depuis plus de 20 ans.

« Quand la vie ne tient qu'à un fil, c'est fou le prix du fil » Daniel Pennac

Comprendre cette phrase et la garder en mémoire, c'est « comprendre toute la problématique du prix ». Le client n'est pas prêt à payer pour une prestation qui n'a pas de valeur à ses yeux. En revanche, il paie volontiers pour une prestation qui lui procure satisfaction.

Cette simple phrase explique en partie la baisse de rentabilité des cabinets aujourd'hui et la raison pour laquelle les clients ne veulent plus payer pour leur comptabilité.

A l'heure où tout s'automatise, pourquoi payer plus cher pour faire faire le travail à un être humain qui le fera généralement plus lentement et parfois avec quelques erreurs ?

« L'expertise s'acquiert lentement et se décharge en un éclair »

Que vaut le conseil d'un expert-comptable ? Peut-on le compter en minutes de travail, en temps passé avec le client ?

Peut-on utiliser la valeur des matières premières utilisées, le salaire des collaborateurs impliqués et rajouter une marge ?

Ou faut-il faire comprendre au client que le conseil de l'expert-comptable, c'est beaucoup plus que cela ?

L'image utilisée ici est celle de Christian Dior et d'une de ses clientes dans les années 50 à New York. Pour satisfaire une cliente qui cherchait un chapeau, Christian Dior utilisa un ruban de tissu et quelques épingles pour lui faire une coiffure somptueuse et unique au monde.

Trouvant que le prix était démesuré par rapport au prix du ruban et des épingles, elle refusa de payer la facture. Christian Dior lui ôta alors le ruban et les épingles et les lui offrit en cadeau.

La valeur ajoutée ici est « le service qu'on a rendu au client, la valeur que lui va en tirer, l'apport que cela représente pour lui etc... » précise Philippe Barré. « C'est toute la problématique du prix, de l'utilité, du service, des missions, des nouvelles missions... »

« Quand le prix est le problème, cela signifie que le problème est ailleurs »

Si l'expert-comptable est créateur de valeur, le prix ne sera pas un problème. Soit le prix est réellement cher et donc supérieur à la valeur créée soit il ne correspond pas à la satisfaction du client.

« Le plaisir ou la satisfaction du client n'est jamais une question de prix. » Il faut « comprendre l'articulation entre la satisfaction, le prix payé par le client, la qualité du travail qui est perçue, la qualité du travail qui a été fait ...».

« Le client n'est pas prêt à payer certaines choses qui coûtent à l'expert-comptable. Il est prêt à payer des choses qui l'intéressent lui. »

« Le bon prix est celui qui permet à l'expert-comptable d'équilibrer son budget et de gagner sa vie et qui correspond à ce que le client est prêt à payer »

Pour renouer avec la rentabilité, les cabinets doivent « repenser beaucoup de choses, le métier, l'utilité, l'organisation, la création de valeur... » pour arriver à proposer une prestation qui permette de satisfaire les deux parties.

Une étude relative au conseil a montré que le prix n'était un frein que pour les TPE/PME qui n'avaient jamais fait appel à ce type de prestations. Une fois qu'une entreprise a franchi le pas et sait ce que le conseil peut lui apporter, le prix devient secondaire.

Le client ne regarde le prix que lorsqu'il n'est pas satisfait.

« Ce n'est pas la somme des coûts + une marge »

« Le prix est obligatoirement lié au client, à la mission, au positionnement que veut adopter le cabinet. C'est un élément clé de la stratégie du cabinet qui ne peut pas être une moyenne ».

Le prix doit être suffisant pour permettre à l'expert-comptable d'être rentable et de se rémunérer sans être au-dessus du marché et l'empêcher de trouver des clients.

« Le prix n'est pas un problème comptable ». La comptabilité sert juste à vérifier le prix plancher pour ne pas travailler à perte.

Pour facturer au tarif souhaité, l'expert-comptable ne doit pas vendre la même chose que tous ses confrères. Il gagnera à se différencier pour facturer en fonction de la qualité de la prestation.

Enfin, parce que toutes les prestations ne sont pas forcément facturées de la même manière, il est possible de facturer au forfait pour certaines prestations et à la tâche ou au succès pour d'autres prestations.

Le minimum consiste à prévoir un prix suffisamment élevé pour se rémunérer. Cette rémunération passe par le nombre d'heures facturables, un nombre d'heures et un tarif qui varie selon les personnes.

L'associé facture 50% de son temps alors que le collaborateur débutant facture généralement 80 à 90% de son temps de travail.

Les heures non facturables seront imputées sur les coûts fixes et les charges fixes, partagées non en fonction des heures facturables, mais de la participation de chacun au chiffre d'affaires global.



Sandra Schmidt
Rédactrice sur Compta Online de 2014 à 2022, média communautaire 100% digital destiné aux professions du Chiffre depuis 2003.