Lorsque l'interprofessionnalité permet de répondre à un besoin du marché

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L'interprofessionnalité entre différents professionnels du droit et du chiffre peut réussir, même lorsque le cabinet d'expertise comptable réalise des missions juridiques. Les cabinets n'ont même pas besoin d'avoir la même taille ou des chiffre d'affaires équivalents.

L'important est de mettre l'intérêt et la satisfaction du client au centre de la relation.

Témoignage de Tristan de La Rivière, avocat associé et gérant.

La Compagnie du Droit est une société d'exercice libéral à responsabilité limitée ou SELARL, détenue par des experts-comptables et des avocats. C'est une forme d'interprofessionnalité dite capitalistique puisque c'est le capital de la SPFPL qui est détenu par les deux professions. La SPFPL détient les parts de la SELARL.

En un peu moins de deux ans, la Compagnie du Droit fondée le 1er avril 2017 est passée d'un avocat unique à une équipe de 15 avocats et juristes, preuve que l'interprofessionnalité fonctionne. Après Bordeaux, un second bureau a été ouvert en 2018, à Pau.

La plupart de ses clients « n'avait jamais eu accès à un avocat d'affaires auparavant alors qu'ils faisaient tous appel à un expert-comptable » précise Tristan de La Rivière.

Dépasser les rivalités et définir le rôle de chacun, gage de réussite de la relation interprofessionnelle

Experts-comptables et avocats ont un attachement très fort à leur profession, à des valeurs, à une déontologie qui ne sont pas identiques. Elles ont aussi des méthodes de travail complètement différentes mais des compétences qui les amènent à intervenir sur le même dossier.

Une absence de communication entre les professionnels peut amener le client à payer deux fois la même prestation sans le savoir ou à choisir l'un des interlocuteurs de manière arbitraire.

Parce que la réussite d'un tel projet « ressemble beaucoup à un mariage » selon Tristan de La Rivière, les deux professions « doivent dépasser leurs rivalités » et « accepter de travailler ensemble pour le plus grand bénéfice du client ».

L'interprofessionnalité a permis « d'adresser un marché nouveau, pas forcément investi par les avocats et surtout de répondre à des besoins non satisfaits ».

Améliorer la pertinence du conseil donné et faire gagner du temps au client

Les clients de la Compagnie du Droit sont adressés par le cabinet d'expertise comptable partenaire, mais pas seulement. « Nous avons certes un nombre important de clients qui viennent de la Compagnie Fiduciaire mais nous avons aussi des clients dont l'expert-comptable n'est pas la Compagnie Fiduciaire » témoigne Tristan de La Rivière. L'inverse est vrai également puisque « tous les clients du cabinet d'expertise comptable ne sont pas clients de l'avocat ». La Compagnie Fiduciaire reste un prescripteur pour d'autres avocats, notamment pour les matières non couvertes par la Compagnie du Droit.

Quoi qu'il arrive, le client reste libre de choisir son conseil et autorise le partage d'informations. La rétention d'informations disparaît et tous peuvent travailler sereinement sans avoir à solliciter le client en permanence. Experts-comptables et avocats travaillent avec le même niveau d'information sur le dossier du client.

Chaque professionnel porte ses propres missions dans l'intérêt de tous

Il n'y a, à ce stade, jamais de lettre de mission commune entre experts-comptables et avocats à La Compagnie du Droit.

Pour Tristan de La Rivière, en-dehors des particularités propres à chaque profession, cela « s'explique par le fait qu'un professionnel valorisera toujours mieux ses propres missions, sans jamais être tenté de vendre un package global à son propre avantage ».

« Les clients viennent pour une prestation, une plus-value, un conseil, jamais pour un prix ». Chaque professionnel vend ses prestations à son propre prix.

« Le cabinet d'avocat a été créé pour apporter de la plus-value ». Différentes missions, par exemple de secrétariat juridique, « restent gérées par les juristes de la Compagnie Fiduciaire ».

Avec ce système, « le client aura toujours un service réalisé par la personne la plus compétente pour le faire, au juste prix » parce qu'experts-comptables et avocats détectent les besoins chez le client et lui proposent de s'adresser à leur partenaire.

La Compagnie du Droit fait partie des pionniers de l'interprofessionnalité. Dans quelques années, l'automatisation et l'intelligence artificielle prenant toujours plus de place, « d'autres cabinets se rapprocheront, parfois contraints et forcés ». Et contrairement à un rapprochement voulu, le « rapprochement forcé peut être régi par la loi du plus fort, souvent au détriment du partenaire, moins solide financièrement » conclut Tristan de La Rivière.



Sandra Schmidt
Rédactrice sur Compta Online de 2014 à 2022, média communautaire 100% digital destiné aux professions du Chiffre depuis 2003.