IA : la feuille de route pour les cabinets comptables

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C'est probablement l'un des sujets les plus brûlants dans l'actualité de la profession comptable : la montée en puissance de l'IA et ses conséquences sur l'organisation et le modèle d'affaires des cabinets sont dans tous les esprits.

Chez les experts-comptables, comme chez les collaborateurs, la nécessité de mener une réflexion de fond et de dresser un plan d'action concret sur le sujet ne fait plus débat.

Mais par où commencer ? Et surtout, quelles étapes suivre pour entrer concrètement dans l'ère de l'IA ?

Voici donc une proposition de feuille de route à l'attention des cabinets comptables, élaborée à partir des travaux réalisés par le groupe de réflexion sur les usages de l'IA en finance et comptabilité, lancé par Regate à l'automne 2023.

« Dans le cadre de cette démarche, nous avons rencontré de nombreux experts de l'IA, aussi bien au sein de la profession comptable que chez les éditeurs de logiciels, les cabinets de conseils, les organisations professionnelles côté expert-comptable... Cela nous a permis d'avoir une vision d'ensemble des enjeux et de mieux réfléchir à l'accompagnement de nos clients experts-comptables », explique Laura Pallier, co-fondatrice de Regate.

La Data, pierre angulaire d'une stratégie IA réussie

En matière d'IA, peu importe le secteur d'activité ou la dimension du projet : tout part de la Data ! Disposer de données de qualité en quantité suffisante est indispensable. En effet, pour bien fonctionner, les modèles d'IA ont besoin d'être entraînés sur un volume important de données pertinentes. Pour les cabinets comptables, cela signifie donc qu'il faut s'assurer de disposer de données en quantité et en qualité suffisantes.

« Les entreprises ont en effet tout intérêt à récolter et à centraliser le plus de données possible. C'est une problématique que l'on connaît déjà, car elle est au c½ur du bon fonctionnement de nombreux systèmes d'information aujourd'hui, mais l'IA accentue très clairement cette tendance à la centralisation de grands volumes de data », explique Vincent Bonnivard, chef d'équipe IA chez Probayes, société spécialisée en conduite de projets liés à l'intelligence artificielle – qui a notamment construit le modèle utilisé pour le rapprochement bancaire intelligent dans la plateforme Regate.

La collecte de la donnée est donc un sujet à maîtriser le plus tôt possible. Dans les cabinets comptables, cette étape devrait prochainement être facilitée par l'arrivée de la facture électronique, qui va placer la profession au c½ur des flux et faciliter l'accès à une data fiable en temps réel. Mais cette collecte s'accompagne aussi d'enjeux éthiques et réglementaires : il faudra s'assurer de préserver la confidentialité des données, ce qui n'est pas toujours facile : les grands modèles d'IA américains sont par exemple assez peu transparents sur l'utilisation qui est faite de la data fournie par les utilisateurs. Heureusement il existe des alternatives en Europe, et en particulier en France, qui sont davantage compatibles avec les obligations liées au respect du RGPD ou de la déontologie de la profession comptable.

Par où commencer ? Les conseils de Regate :

  • cartographier les flux de données, au sein du cabinet et avec les clients ;
  • réaliser un diagnostic pour connaître la qualité de la donnée : fréquence de mise à jour, fiabilité de la source, accessibilité en temps réel, conformité réglementaire, etc. ;
  • réfléchir aux cas d'usage intéressants en fonction de la donnée disponible.

Quels cas d'usage adresser en priorité ?

Une fois la Data disponible connue, les cabinets pourront avoir une meilleure vision des cas d'usage de l'IA dont ils peuvent s'emparer. Les applications de l'intelligence artificielle en cabinet comptable sont déjà nombreuses, comme le montre le Panorama réalisé par le groupe de réflexion porté par Regate.

Voici les grandes familles de cas d'usage à investir en priorité, classées par ordre de priorité :

  • automatisation poussée de la saisie comptable : lecture automatique des pièces, rapprochement intelligent, imputation comptable ;
  • productivité quotidienne des collaborateurs : assistance à la rédaction de mails, comptes-rendus automatiques de réunions ou de rendez-vous clients, traduction, tri d'informations,... ;
  • relation client : prise en charge d'un premier niveau de réponse aux demandes clients, routage des demandes entrantes, chatbots intelligents... ;
  • lutte contre la fraude et conformité : prévention des risques de défaillances clients, détection des faux documents, assistance à la production de documents juridiques... ;
  • gestion prédictive : construction de prévisionnels intelligents, évaluation des risques, mise en forme automatique de reporting,...

Ces différents cas d'usage ne sont pas tous arrivés au même stade de maturité : si l'automatisation de la saisie ou la productivité quotidienne sont déjà bien ancrées dans les habitudes de nombreux professionnels, la gestion prédictive ne s'est pas encore réellement imposée sur le marché par exemple. Mais le potentiel est bien réel et il est important pour les experts-comptables et leurs équipes d'identifier sans perdre de temps les utilisations qu'il faudra implémenter en priorité pour rester compétitif. Pour cela, ils peuvent s'appuyer notamment sur les critères suivants :

  • la valeur ajoutée apportée par la solution : quels gains de productivité, quelle efficacité opérationnelle ou quel niveau d'amélioration des conditions de travail ?
  • le retour sur investissement : évaluer le rapport bénéfices / coûts, en prenant en compte les coûts d'implémentation (y compris en matière de ressources humaines) et les économies ou gains générés.
  • la faisabilité : les outils déjà utilisés vont-ils être compatibles ? Les équipes sont-elles capables de gérer le nouveau cas d'usage ? La réglementation française permet-t-elle de déployer ces nouvelles applications ?

Le défi des compétences

Étape suivante dans la concrétisation des projets d'IA en cabinet comptable : la transformation des compétences. La profession va en effet se retrouver confrontée à un double défi RH. En effet, il faudra intégrer les compétences nécessaires pour exploiter le potentiel de l'IA, mais il faudra aussi faire évoluer les équipes pour qu'elles puissent assurer les nouvelles missions que les gains de productivité apportés par l'intelligence artificielle vont rendre possibles.

Concrètement, cette étape va passer par des plans de formation ambitieux, menés à l'échelle du cabinet entier.

« Chez CECCA, nous avons déjà commencé à former nos équipes sur ces sujets. Nous avons choisi de le faire à grande échelle, car nous nous sommes aperçus que former les gens au compte-goutte ne fonctionnait pas. Il faut une vision d'ensemble fortement incarnée par le management. C'est évidemment plus facile à mettre en ½uvre dans les grands cabinets que dans les plus petites structures, mais ces dernières peuvent toutefois se tourner vers les ressources mises à disposition par l'Ordre des experts-comptables dans le cadre du plan Profession Comptable 2030 », explique Jonathan Khlafa, expert-comptable chez Cecca.

Ces plans de formation ne sont pas destinés uniquement à permettre aux collaborateurs d'acquérir un savoir-faire technique. Il faudra surtout travailler sur la posture dans la relation avec le client et les « soft skills » : communication, travail en équipe, adaptabilité, capacité d'analyse,... Et pour certaines missions, les cabinets devront également recruter de nouveaux profils. Cela pourra par exemple être le cas pour la gestion de la data – avec l'arrivée de data analysts ou data controllers, pour la relation client - avec des chargés de clientèle ou des consultants spécialisés, ou pour mener à bien les nouvelles missions - les DAF externalisés commencent déjà à faire leur apparition dans les effectifs des cabinets !

Par où commencer ? Les conseils de Regate :

  • désigner un référent au sein du cabinet pour piloter la transformation des compétences ;
  • évaluer quels sont les profils en interne qui peuvent évoluer vers de nouvelles responsabilités ;
  • lancer des plans de formation à l'échelle du cabinet, si besoin avec l'aide d'intervenants extérieurs ;
  • identifier et lancer le recrutement des profils manquants (par exemple : Data Controller, Chargé de Relation Client ou Référent Digital).

Quels outils pour l'IA ?

Après les compétences, la mise en ½uvre des projets d'IA dans les cabinets comptables passe aussi par le choix ou la mise à niveau des outils pour qu'ils intègrent correctement les nouvelles technologies aujourd'hui disponibles. Une nouvelle génération de plateformes collaboratives - dont Régate fait bien sûr partie - intègre déjà l'IA pour faciliter les processus de gestion financière et la collaboration entre l'expert-comptable et son client. Cela passe par exemple par l'utilisation du machine learning pour l'automatisation de la lecture des pièces comptables et le rapprochement bancaire, une technologie intégrée dans la plateforme Regate depuis septembre 2023.

Mais dans la panoplie de nouvelles offres, sur quels critères choisir les outils d'IA du cabinet ? Plusieurs facteurs doivent être pris en compte, comme l'intégration avec les autres outils déjà en place, et en particulier le logiciel de production comptable, mais aussi la capacité de ces plateformes à rendre l'IA utilisable au quotidien pour les équipes.

« Vous pouvez avoir les meilleurs modèles d'IA au monde, si l'expérience utilisateur n'est pas bonne ensuite, ils seront rejetés. C'est pourquoi nous attachons beaucoup d'importance à ce que tout ce que nous fabriquons soit simple d'utilisation », explique François Fanuel, Directeur Technique de Regate.

Comment s'y prendre ? Les conseils de Regate :

  • désigner un référent IA dans le cabinet en charge de la veille technologique ;
  • réaliser un inventaire / audit des outils déjà utilisés (coût, fonctionnalités, performances, comptabilité...) et mesurer leur niveau d'intégration de l'IA ;
  • teste r de nouveaux outils d'IA et vérifier leur pertinence dans l'architecture du cabinet
  • choisir de nouvelles solutions d'IA. Planifier leur implantation ;
  • Mettre en place un suivi post-implantation de nouveaux outils et recueillir les retours d'expérience des équipes pour mieux mesurer ce que leur apporte l'IA au quotidien.

En conclusion : un nouvel état d'esprit à adopter

Ainsi, comme pour toute disruption majeure, avant d'être un sujet technique, l'implémentation de l'IA dans les cabinets comptables est un sujet d'organisation, de gestion du changement et de leadership. La profession comptable doit s'emparer de cette thématique pour rester compétitive, augmenter ses marges et conserver sa place de conseiller clé pour ses clients, notamment dans la perspective de l'arrivée de la facture électronique. L'erreur à ne pas commettre est en effet de rester attentiste et de laisser passer le train de l'IA. Comme dans tout contexte de changement fort, adopter un état d'esprit proactif sera un facteur clé pour réussir la transformation de la profession et pour saisir les nombreuses opportunités qui se profilent ! Sans oublier bien-sûr d'échanger régulièrement avec ses pairs pour nourrir sa réflexion et s'inspirer des bonnes pratiques déjà en place. C'est d'ailleurs toute l'ambition du groupe de réflexion porté par Regate.


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