Automatisation : la profession comptable doit-elle s'inquiéter pour son avenir ?

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La prochaine grande révolution technologique sera robotique ou ne sera pas. Tel pourrait être le slogan de notre siècle et des entreprises et chercheurs innovants de notre monde.
Mais à quel prix ?
Les robots vont-ils remplacer les femmes et les hommes ?
Quand et comment ?

La question est bien entendu trop vaste pour être traitée intégralement dans cet article mais nous allons en aborder une partie en parlant de la profession comptable et de son risque d'être menacée à terme par la robotisation et l'automatisation du secteur.

Selon une étude menée par l'Université d'Oxford en 2015, la profession est l'une des plus menacée par la robotisation imminente du marché. Le risque est établi à 95% pour les experts-comptables et jusqu'à 97% pour les comptables en entreprise. La deuxième catégorie fait ainsi partie du top 10 des métiers les plus à risque.

Les cabinets d'audit ne sont pas épargnés : KPMG cherche ainsi depuis 2015 à s'automatiser et est pour cela à la recherche de logiciels et IA (Intelligence Artificielle) pour gagner en efficacité et en énergie.

Mais alors, quelle en est la signification ?
La profession comptable est-elle amenée à disparaître ? Intégralement ?
Et si oui : quand ?

Robotisation de la comptabilité : un risque réel pour les comptables d'aujourd'hui ?

Pour les experts du secteur et les recruteurs, l'automatisation apparaît comme une solution plus intéressante sur le long terme en comparaison du recrutement de nouveaux employés qui seraient amenés à effectuer des tâches répétitives.

Ainsi, EDF teste en 2017 trois robots comptables et Deloitte utilise Argus en audit. L'objectif ? Leur confier dès 2018 des missions chronophages et répétitives qui sont aujourd'hui effectuées par des employés.

Nous ne sommes d'ailleurs pas à l'aube de l'automatisation car de nombreux logiciels performants sont déjà utilisés dans les grands cabinets afin de gagner du temps pour confier des missions plus stratégiques aux employés. Ces technologies sont des « software as a service ».

Toutefois, Dominique Jourde, président de la Commission Numérique de l'Ordre des Experts-Comptables, ne se veut pas alarmiste :

On a transposé un peu vite à la situation française les conclusions d'études anglo-saxonnes, comme si tous les comptables et auditeurs étaient concernés.

Selon lui, seules certaines missions peuvent être automatisées, pas toutes et loin de là ! Un postulat rassurant pour celles et ceux qui prévoient d'intégrer le marché prochainement.

En effet, le risque de voir disparaître totalement la profession est extrêmement faible pour le moment car les robots ne sont actuellement pas capables de reconnaître 100% des documents comptables aujourd'hui utilisés.

Ainsi, l'humain est amené à conserver sa place dans ce secteur pour effectuer des missions complexes, vérifier que les robots effectuent correctement leurs tâches et établir une relation de confiance avec les clients, compétence pas encore à la portée de nos amis robotisés.

Sur le moyen terme, les métiers les plus à risque de la profession sont certainement ceux étant peu ou pas qualifiés (Bac ou moins) et qui se concentrent presque exclusivement sur la saisie de données et qui pourraient être repris par des machines.

Dans les prochaines années, il faudra repenser en profondeur les métiers comptables et orienter différemment les étudiants et jeunes salariés pour leur proposer de nouvelles missions et postes, en adéquation avec les innovations du moment.

Quelles sont les prochaines révolutions technologiques auxquelles nous devons nous préparer ?

De nombreuses innovations ont déjà vu le jour au cours des dernières années et commencent à se frayer un chemin parmi les technologies les plus en vogue du moment.

Nous pouvons bien entendu penser au Bitcoin, cette monnaie numérique qui tend à repenser complètement notre manière d'échanger de l'argent sur Internet. Le Bitcoin est né de la Blockchain qui est une chaîne de paiement sécurisée sur Internet. De ces deux technologies naît alors l'idée - non sans impact pour les métiers de la comptabilité - de la possibilité d'inscrire automatiquement les transactions effectuées directement dans les comptes d'une entreprise. Une petite révolution qui pourrait prochainement voir le jour.

Une conséquence de ces évolutions - qui s'avère sûrement plus réjouissante - est la clôture rapide des comptes. Il s'agit du Fast Closing. Cette méthode permet de réduire drastiquement les délais nécessaires à une entreprise ou un cabinet avant de présenter son bilan comptable de l'année passée.

Selon les professionnels du métier, la menace de l'automatisation est bien présente mais pas celle de l'ubérisation car les nouveaux entrants n'ont pas les clés pour s'intégrer efficacement sur le marché.

Pour s'armer face à la menace de l'automatisation, les futurs professionnels de la comptabilité devront davantage être éduqués à « consommer » l'information et la comprendre plutôt que la « produire ». C'est par exemple le cas de l'Université du Michigan où Cathy Shakespeare, directrice du programme des masters en comptabilité, évoque que les compétences basiques perdent de leur valeur sur le marché du travail mais que de nouvelles connaissances pourraient être enseignées aux étudiants afin de s'adapter au marché et aux innovations de notre siècle.



Sarah Gillot est Chef de Projet Online Marketing pour Makerist - start-up à Berlin - afin de développer le marché français.