74e congrès : l'expert-comptable au cœur des flux

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Le 74e congrès de l'ordre des experts-comptables, qui se tiendra à Paris du 25 au 27 septembre 2019, aura pour thème « L'expert-comptable au c½ur des flux ».

Dans ce cadre, LexisNexis et Compta Online ont rencontré les trois rapporteurs du congrès, Sanaa Moussaid, Fabrice Heuvrard et Dominique Perier.

Nous souhaitions en savoir plus sur le thème choisi pour le prochain congrès, les innovations de l'ordre qui y seront présentées et leur analyse des incidences de la Loi Pacte sur la profession.

Pouvez-vous nous en dire plus sur les grandes thématiques qui seront abordées lors du 74e Congrès, « L'expert-comptable au c½ur des flux ».
En quoi se distinguera-t-il des congrès précédents ?


Dominique Perier

L'expression « au c½ur des flux » ne s'applique pas uniquement aux flux numériques. Il ne faut donc pas s'attendre à un Congrès centré uniquement sur le digital et le numérique. Nous allons aussi parler d'humain, de stratégie, de nouveautés. L'idée est d'emmener les confrères à la découverte de ce qu'est le flux.

Par exemple, aujourd'hui nous travaillons sur des documents tels que des factures ou des relevés de banque. Mais demain nous devrons progresser encore sur l'utilisation de la donnée et particulièrement celle des flux, avec l'objectif d'obtenir une comptabilité en temps réel. Nous sommes également là pour montrer aux congressistes que le flux donnera de la donnée qui nous permettra d'avancer sur des sujets pas forcément traités actuellement.


Fabrice Heuvrard

Nous avons aussi la volonté d'ouvrir l'esprit des confrères avec trois temporalités :

  • tout d'abord en observant ce qui se fait actuellement pour qu'ils puissent s'adresser aux différents prestataires ;
  • puis en regardant ce qui se fera demain, à 3 ans ou 5 ans, ce qui implique déjà une vision stratégique du cabinet ;
  • et enfin en essayant d'imaginer à plus long terme ce qui pourrait bouleverser notre profession. Et ce n'est pas forcément « bouleverser » dans le mauvais sens du terme. Il s'agira d'innovations positives qu'il faudra intégrer au sein du cabinet.


Sanaa Moussaid

Ces trois temps s'adaptent également à la typologie de cabinet que l'on peut rencontrer, car tous n'ont pas atteint le même degré de maturité.

Par exemple, certains cabinets pourront repartir du congrès avec un kit de dématérialisation, et des fiches sur les fonctionnalités Excel pour les accompagner dans leur transition numérique. Les plus matures souhaitant accompagner leurs clients dans la digitalisation des fonctions management et marketing, pourront le faire avec un kit dédié. L'idée est vraiment de toucher tous les confrères par cette temporalité. Une des différences avec le congrès de l'année dernière, qui était axé sur la stratégie, est l'accent mis sur les flux qu'ils soient financiers, humains, de données, numériques, virtuels, réels ou physiques et l'expert-comptable au c½ur de l'entreprise.

Quels seront les principaux flux de données qui devront être gérés par les experts-comptables dans les prochaines années ?


Sanaa Moussaid

Beaucoup plus de flux de données qu'aujourd'hui. Actuellement, nous gérons essentiellement les données comptables et sociales. Demain, nous pourrons aussi gérer les données qui proviennent de CRM, des réseaux sociaux, de sites internet... En fait, nous pourrons connecter tous les flux de données du client pour pouvoir analyser d'une manière pertinente, par exemple, sa clientèle. Nous pourrons également faire de la prédiction, pour pouvoir l'accompagner dans une analyse encore plus poussée. Autant de choses qui ne sont pas faites actuellement, mais demain nous aurons les outils qui le permettront. Les experts-comptables sont d'ailleurs de plus en plus en accord avec cette démarche.


Fabrice Heuvrard

Par exemple, s'agissant de la responsabilité sociétale et environnementale (RSE), la facture fait apparaître des données de consommation électrique. Pour l'instant, seules les données en euros sont traitées, mais il serait possible d'ajouter des champs libres dans la saisie de nos écritures pour renseigner la consommation électrique. Cela permettrait de faire des restitutions assez intéressantes.

Le but est vraiment que la comptabilité soit au centre de l'information. Pour l'instant, on gère principalement de la donnée financière mais on tend à avoir une donnée beaucoup plus complète et structurée.


Dominique Perier

L'idée est d'utiliser toutes les données contenues dans les documents que nous avons à disposition. Aujourd'hui, la comptabilité sert dans un premier temps à traduire des actes et des flux juridiques. Ensuite, il s'agit de faire du fiscal et du social. Mais désormais, il s'agira aussi de faire en sorte que la comptabilité soit au c½ur de la gestion des entreprises, que ce soit l'outil principal et non pas un outil de comptabilisation a posteriori. L'enjeu, c'est d'essayer de travailler a priori, pour faire du prédictif, non pas seulement sur les chiffres hors-taxes, la TVA, ou ce type d'informations mais sur d'autres informations, comme les consommations électriques. Nous pourrions aussi prendre l'exemple des boulangeries et de la consommation de farine. En résumé, c'est prendre en compte un maximum d'informations pour aider nos clients à mieux gérer leurs entreprises et les accompagner dans leur développement.

Nous pouvons également évoquer la partie sociale. Aujourd'hui, les professionnels établissent des bulletins de paye. C'est très bien, mais il s'agit uniquement de déclaratif. Et à mon sens, on en fait beaucoup trop, sans utiliser les données disponibles en amont : heures de travail, heures supplémentaires, absences, etc. Ce type d'informations, peut aider nos clients à faire de la vraie gestion d'entreprise, et même selon la taille du client, de la gestion RH.

Le projet de plateforme de facturation électronique annoncée par Charles-René Tandé sera-t-il particulièrement mis en lumière lors de ce congrès ? Et si oui, de quelle façon ?


Dominique Perier

Oui. L'objectif de cette plateforme est d'aider les confrères à rester au c½ur des flux d'achat et de vente. Le projet est bien avancé.

C'est la structure ECMA qui est en train de gérer ce dossier avec pour objectif une présentation au Congrès, comme la signature électronique l'année dernière : un prototype avec déjà des premiers usages destinés à évoluer dans les années à venir.


Sanaa Moussaid

Pour compléter ce que tu as dit, en termes de projet. Le CSOEC lance un POC « proof of concept » ou Prototype d'inscription des diplômes dans la Blockchain qui sera présenté au congrès.

Ce sera un moyen pour les professionnels de toucher du doigt la technologie blockchain.

La loi PACTE étend le champ d'exercice des professionnels de l'expertise comptable en prévoyant notamment dans l'ordonnance de 1945 un accompagnement en matière de numérique.
Quelle incidence cela pourrait-il avoir dans la réalisation de prochaines missions ?


Sanaa Moussaid

Ces dispositions vont peut-être nous permettre d'élargir notre champ d'action, d'intervenir en matière de numérique et de renforcer la position de la profession, justement, au c½ur des flux. Au niveau du Conseil supérieur de l'Ordre, nous cherchons à accompagner les cabinets à développer les nouvelles missions en matière numérique.

Comme vous le savez, le Gouvernement aussi compte sur nous pour accompagner les entreprises. Cette reconnaissance au niveau de la loi PACTE le confirme.


Dominique Perier

Je pense même que certains cabinets vont réellement se spécialiser dans le domaine.


Sanaa Moussaid

Je me suis en effet totalement spécialisée dans ce domaine, partageant ainsi l'envie de certains confrères qui souhaitent développer ce type de mission.


Fabrice Heuvrard

L'avantage de notre profession, c'est d'avoir la confiance des clients. Nous avons une déontologie, et sommes reconnus pour notre sérieux. Et nous devons profiter de cette place de choix pour aller vite et éviter que cette clientèle soit captée par des consultants externes qui n'ont pas forcément notre vision de l'entreprise.


Sanaa Moussaid

Effectivement, aujourd'hui, ce sont les consultants externes qui délivrent du conseil en numérique. Et il est vrai que sur ce type de missions, certains confrères peuvent penser que le fait d'être expert-comptable est un frein. Maintenant, c'est à nous de nous positionner. Cette loi PACTE, cet article, nous aide à nous positionner dans l'accompagnement numérique de nos clients mais aussi, à montrer nos compétences, parce que nous sommes les seuls sur le marché à connaître vraiment l'entreprise en l'accompagnant au quotidien. Pourquoi ne pas étendre cette compétence au numérique ? Dire à nos clients : « voilà tels outils dont vous avez besoin », parce qu'on les connaît, qu'on connaît leur business model, et qu'on les accompagne depuis des années. Finalement je pense sincèrement que le fait d'être expert-comptable devrait être une force pour conseiller en matière de numérique.


Fabrice Heuvrard

Je suis tout à fait d'accord. Nous avons des compétences en matière sociale, fiscale, qui peuvent nous servir, par exemple, en matière de « RGPD ». Nous avons déjà un vernis, des réflexes, et je doute que les consultants externes qui interviennent aient nos compétences comptables, fiscales, juridiques, sociales, informatiques...


Sanaa Moussaid

Nous avons aussi la « casquette » auditeur.


Fabrice Heuvrard

Donc on a aussi des réflexes professionnels. Je pense même que c'est un rôle naturel qu'on ne connait pas encore, qu'on n'a pas forcément endossé.


Sanaa Moussaid

Et que nous n'avons pas valorisé pour le moment.


Dominique Perier

Pour cela il faut sortir du quotidien et arrêter de produire des chiffres.

La loi Pacte reconnait par ailleurs le statut d'expert-comptable en entreprise.
La présentation de produits spécifiques à ce public est-elle prévue lors du prochain congrès ?


Sanaa Moussaid

Nous allons nous rapprocher des experts-comptables en entreprise, notamment des Directeurs administratifs et financiers (DAF), parce qu'ils sont en grande partie DAF. Une conférence importante sur l'accompagnement et les besoins d'accompagnement d'entreprises est prévue. Cela nous permettra aussi de les interroger pour comprendre un peu les deux facettes de l'entreprise.


Fabrice Heuvrard

Il est naturel d'incorporer les experts-comptables en entreprise. Dans les pays anglo-saxons, il n'y a pas de différence : ils peuvent aller aux mêmes congrès, ont les mêmes conférences, les mêmes obligations. C'est dans le sens de l'histoire de le faire, de pouvoir les reconnaître. L'inverse serait un peu dommage, ils ont passé leur stage, rédigé leur mémoire, obtenu le même diplôme. Ils ont simplement fait le choix d'aller en entreprise. Pourquoi cela ne leur donnerait pas le droit, une légitimité pour être assis aux mêmes tables des discussions ? Ils ont les mêmes problématiques fiscales que nous, certains avec des problématiques parfois plus importantes lorsqu'ils gèrent des dossiers très significatifs.


Dominique Perier

L'idée c'est aussi d'agrandir « la famille », d'avoir des échanges au quotidien avec eux. On en a avec certains mais nous avons du mal à le mettre réellement en pratique au quotidien, parce que lorsque nous travaillons avec des DAF en entreprise, c'est assez surprenant : nous ne sommes pas sur la même longueur d'onde sur certains sujets alors que nous avons la même formation, que nous faisons le même « métier », parce qu'ils sont, en général, sur des structures un peu plus conséquentes.


Fabrice Heuvrard

A mon petit niveau j'ai eu l'occasion de travailler avec des DAF à temps partagé, sur certains dossiers. Nous n'avons pas du tout les mêmes réflexes, ni les mêmes enjeux, et nous ne vivons pas dans la même temporalité, c'est ce que disait Dominique. Nous sommes toujours en train de rattraper le passé, alors qu'ils sont dans le prospectif.

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