Santé : venir au travail en étant malade

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Aller travailler tout en étant malade s'appelle le surprésentéisme. Qui ne l'a pas déjà pratiqué ? Qui avait un arrêt maladie de son médecin et qui est tout de même allé travailler ? La France est le pays avec le plus de surprésentéisme car 55% des français vont travailler au moins une fois dans l'année en étant malade alors que l'Europe comptabilise 40%.

Pourquoi pratiquer le surprésentéisme ? Quels sont les effets ? Quel type de surprésentéiste êtes-vous ?

L'absentéisme est un sujet souvent évoqué comme étant un problème dans les entreprises et dont les solutions sont recherchées. Le surprésentéisme est un comportement des personnes dont la présence au travail est anormale compte tenu de leur état de santé. Ces 2 thèmes, qui font partie de la santé au travail, se rejoignent car il génèrent du stress au travail et ont des effets à retardement.

Selon une étude récente, les français sont de plus en plus nombreux à ne pas respecter un arrêt de travail prescrit par leur médecin. En effet, 23% des salariés renoncent à un arrêt maladie pour venir au travail en 2018, contre 19% en 2016.

Selon cette même étude, la moitié des personnes regrettent ce choix car ils ont senti qu'ils étaient moins performant et que leur maladie a duré plus longtemps. Mais pourquoi mettre sa qualité de travail et sa santé au second plan ?

Pourquoi pratiquer le surprésentéisme ?

Les personnes qui sont malades et qui viennent travailler malgré leur état de santé le font principalement par crainte, ce qui leur met la pression.

Peur des représailles

Elles peuvent avoir peur des représailles. Le doute subsiste toujours lorsque le collaborateur se met en arrêt maladie. Par crainte d'avoir des représailles de la part de ses supérieurs hiérarchiques, le salarié va venir travailler même en étant malade. Ainsi, il prouve qu'il n'est réellement pas en forme et qu'il peut rentrer chez lui si vraiment il lui devient impossible de travailler.

Culpabilité

La peur des représailles rejoint également le sentiment de culpabilité. Le collaborateur culpabilise de laisser ses collègues et son équipe seuls sur un dossier en cours ou avec une surcharge de travail. Son absence implique que ses collègues vont devoir traiter son travail en plus du leur et les représailles peuvent ainsi venir des collègues en lieu et place des supérieurs hiérarchiques.

Commérages

Le salarié peut également avoir peur des suppositions des gens. Les « on dit » qu'il n'est pas vraiment malade car c'est la deuxième fois qu'il est en arrêt maladie pendant l'hiver (même si, le pauvre, il a subit la grippe et la gastro !), qu'il devient fainéant, qu'à cause de lui le retard sur le traitement des dossiers s'allonge, qu'il n'est pas là et que le travail doit être fait par les autres. Le collaborateur malade peut commencer à craindre la vision des gens face à sa maladie et se mettre en stress, ce qui ne l'aide pas à récupérer paisiblement.

Par obligation

De plus, le salarié peut s'obliger à venir travailler car il a une masse de travail et qu'il ne veut pas cumuler le retard du traitement. Dès lors, il va préférer venir au travail en n'étant pas en pleine capacité de son état de santé plutôt que de récupérer tranquillement quelques jours pour revenir en forme. Il est vrai que depuis la crise, les salariés ont peur de ne pas bien faire leur travail et ne souhaite pas prendre le risque de se faire remarquer dans leur retard. Par conséquent, ils font du surprésentéisme au risque de mettre en péril leur santé.

Sentiment d'être indispensable

D'autres personnes ont l'impression d'être indispensables dans leur travail et que personne ne peut les remplacer pendant leur absence. Partir en vacances et traiter les suspens oui, mais tout laisser en plan pour les collègues, cela ne fonctionnera pas ! C'est pour cette raison qu'il est important de travailler en binôme afin qu'un collègue soit informé des dossiers en cours. Cela évite un stress pendant une absence non programmée. Puis, certaines personnes malades aiment venir au travail pour montrer leur côté héroïque, leur courage de venir travailler alors qu'ils sont diminués physiquement.

Perte de salaire

Enfin, en France, il existe un délai de carence de 3 jours avant de toucher des indemnités journalières. Cette perte de salaire peut être problématique dans le budget du collaborateur. Par conséquent, il ne peut pas toujours se permettre 3 jours de délai de carence.

Quels sont les effets du surprésentéisme ?

Evidemment que le surprésentéisme engendre divers effets sur le travail, sur l'entreprise et sur la santé du collaborateur.

Sur le travail

Concernant son travail, le collaborateur surprésentéiste ne peut pas obtenir la même qualité du travail qu'en étant au meilleur de sa santé. Lorsque nous sommes malades, le traitement des dossiers, la réflexion, la mémoire sont plus lents. La fatigue est plus importante et nous nous sentons engourdis. La motivation n'est également pas au rendez-vous, le travail est bâclé et peut contenir de nombreuses erreurs de concentration et d'inattention. Venir travailler en étant malade n'est pas la solution car la performance est minimale. Puis, le risque de devoir revenir sur ce qui a été entrepris dans un état de santé médiocre est plus grand, ce qui n'est pas la définition de l'efficience.

Sur l'entreprise

Pour l'entreprise, il est important de ne pas avoir un trop grand pourcentage d'absentéisme, c'est indéniable. Toutefois, venir travailler en toutes circonstances a également des effets sur la productivité. Comme évoqué ci-dessus, le collaborateur est présent à sa place de travail mais il n'est pas en pleine capacité et la qualité de son travail est altérée. L'inattention, les erreurs, le risque que sa santé se détériore sont tout autant d'effets à retardement pour la productivité de l'entreprise. De plus, un collaborateur malade peut transmettre ses microbes aux autres collaborateurs. Il n'existe pas de pire situation pour une entreprise qu'un service entier en état de santé amoindri ! Rester chez soi en étant malade permet de penser à ses collègues et au bien-être de son entreprise !

Sur la santé du collaborateur

Au niveau de la santé du collaborateur, le surprésentéisme peut être nocif, surtout lorsqu'il est fréquemment pratiqué. Il peut notamment conduire à des accidents tels qu'un infarctus si le collaborateur connaît des problèmes cardiaques. Ne pas se soigner et se reposer comme il se doit a pour effet de guérir moins vite et de traîner la fatigue pendant de nombreuses semaines. De manière générale, continuer de venir travailler génère une dégradation générale du niveau de santé et de l'épuisement. Cet état de fatigue conduit à puiser toute son énergie pour faire face à la charge de travail et peut, à terme, engendrer de l'absentéisme. Dans les cas les plus graves, les habitués du surprésentéisme peuvent subir tous les symptômes psychologiques et physiques du burn out.

Attention aux alertes que votre corps peut vous signaler...

Quel type de surprésentéiste êtes-vous ?

Il a été dénombré 7 grands types de surprésentéistes.

Le cadre

Vous êtes un dirigeant d'un service ou d'une entreprise et vous souhaitez montrer l'exemple à vos collaborateurs. Etre en arrêt maladie peut signifier un aveu de faiblesse et le patron absent pour un arrêt maladie, cela ne se fait pas ! Vous avez également le sentiment que les décisions ne pourront pas être prises pendant votre absence et que le service ou l'entreprise risque d'être à l'arrêt pendant votre absence. Vous estimez également que des longs arrêts ou répétés pourraient être un frein à votre carrière ou que vous ne seriez pas considéré à votre place dans le poste que vous occupez.

En CDD ou en intérim

Votre contrat de travail ne vous permet pas forcément des absences si vous êtes en recherche d'un emploi en CDI. Vous devez prouver que vous êtes compétent et que vous êtes en pleine capacité de travail afin de mettre toutes les chances de votre côté. De plus, vos revenus ne sont pas toujours en adéquation avec vos dépenses donc vous ne pouvez pas vous permettre un délai de carence de 3 jours.

Le passionné

Vous aimez votre travail et vous le considérez comme un équilibre dans votre vie. Vous vous sentez investi et vous ne souhaitez pas que vos interlocuteurs, qu'ils soient vos collègues ou vos clients, pâtissent d'une faiblesse de votre état de santé. Vous faites preuve d'un professionnalisme sans faille et vous vous sentez engagé dans votre entreprise, vos supérieurs hiérarchiques peuvent compter sur vous à la moindre occasion.

L'indépendant

Le statut d'indépendant ne vous laisse pas trop le choix lorsque vous êtes malade. Si vous n'allez pas travailler et que vous êtes seul dans votre entreprise, personne ne pourra le faire à votre place. Par conséquent, vous risquez des pertes financières plus ou moins conséquentes pour votre activité. De plus, vous devez prouver que vous êtes présent pour vos clients et vos fournisseurs, dans n'importe quelle situation et qu'ils peuvent compter sur vous.

Le solidaire

Vous travaillez dans une société dans laquelle tout le monde est soudé et vous ne souhaitez pas que vos collègues subissent votre absence. Dès lors, il est impensable pour vous, par solidarité, que votre travail soit réparti entre les personnes présentes.

Le contraint

A l'inverse de la personne solidaire, vous travaillez dans une entreprise qui pratique le surprésentéisme et vous ne vous sentez pas à l'aise si vous devez vous absenter. Un arrêt maladie ne serait pas bien considéré et vous sentez une pression sur vos épaules à votre retour donc il est préférable que soyez présent à toute épreuve.

Le malade chronique

Vous avec une petite santé physique et au moindre changement de température vous tombez malade, ou vous attrapez le moindre microbe qui passe. Vos absences sont toutes importantes car vous n'êtes pas en état de travailler. Vous devez donc osciller entre vos absences et vos présences pour ne pas éveiller des animosités avec vos collègues.

Pour résumer, en règle général, pour guérir mieux vaut bien se reposer que travailler !



Adeline Rocci
Rédactrice sur Compta Online, média communautaire 100% digital destiné aux professions du Chiffre depuis 2003.
Je suis passionnée par les ressources humaines et la vie en entreprise, thématiques de prédilection que je traite sur mes articles.
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