Rencontre avec Sanaa, expert-comptable libérale et digital native

Article écrit par (1270 articles)
Modifié le
10 551 lectures

Devenir un expert-comptable numérique, ce n'est pas uniquement proposer tous ses services à distance à un maximum de clients, loin du cabinet. C'est aussi utiliser les nouveaux outils pour améliorer l'expérience client, bien au-delà de la satisfaction des obligations déclaratives.

Pour Sanaa Moussaid, jeune expert-comptable indépendante, « La recette du succès est de mettre la relation client au centre des préoccupations ».

Témoignage d'une jeune diplômée d'expertise comptable, récemment élue « The young accountant of the year » par le magazine international « The Accountant ».

Bonjour Sanaa, vous êtes expert-comptable « numérique » à Paris, fondatrice en 2013 du cabinet MSSO.
Pouvez-vous vous présenter en retraçant votre parcours ? Pourquoi avoir ajouté « numérique » dans votre présentation sur Linkedin ?

Ayant su très vite que je voulais devenir expert-comptable, j'ai suivi le parcours traditionnel de formation : DPECF, DECF et DESCF. J'ai eu la chance de travailler dans des secteurs divers et variés auprès de structures de tailles différentes de la TPE, PME à la société cotée.

J'ai également été amenée à travailler sur des projets d'automatisation, d'harmonisation des process comptables et de mise en place d'outils dédiés aux métiers du Real Estate (NDLR : métiers de l'immobilier).

Digital native, j'ai toujours porté un grand intérêt à la technologie et au digital. Quand j'ai créé mon cabinet, il était évident pour moi de l'axer sur un modèle totalement connecté.

Je n'ai pas besoin de voir mes clients pour la partie déclarative qui se fait aisément à distance. Nous privilégions les rencontres physiques au conseil et à la valeur ajoutée que je peux leur procurer.

Je suis convaincue que cette révolution technologique va pousser la profession à développer des missions de conseil à forte valeur ajoutée, à condition de compléter par l'acquisition de compétences supplémentaires.

Vous êtes également très impliquée dans la profession avec notamment la présidence du Comité Transition Numérique au CSOEC et la présidence de la Commission Femmes de l'OEC Paris.
Comment arrivez-vous à conjuguer votre vie personnelle, vos obligations professionnels au cabinet MSSO et votre engagement auprès des instances ?

Je dirais qu'il s'agit d'une question d'organisation et d'optimisation des process de production.

Je dispose au sein de mon cabinet aussi bien de procédures de fonctionnement en interne à destination des collaborateurs que de process de fonctionnement des outils du cabinet à destination des clients. La chance d'exercer à titre libéral est un atout pour gérer son temps librement. Etant maman d'un petit garçon,  j'accorde énormément d'importance à ma vie privée. Le mode d'exercice de notre profession me permet de moduler mes horaires de travail librement pour passer plus de temps avec mon enfant. Je peux vous dire que j'ai des journées bien remplies mais passionnantes.

Vous indiquez dans un récent billet sur LinkedIn que votre activité libérale vous apporte une très grande liberté. Quels en sont les avantages ?

Les avantages sont de pouvoir gérer son temps librement sans contrainte, et de pouvoir travailler de n'importe quel endroit dans le monde si l'on dispose des outils adéquats.

La profession nous permet d'accomplir un large éventail de missions très stimulantes intellectuellement.

La formation, l'accompagnement des startups dans leur levée de fonds, l'accompagnement stratégique, la conduite du changement,... sont autant de missions que peut offrir notre métier.

Cette liberté s'apprécie autant par l'aménagement et organisation de son travail, que par l'éventail des missions proposées.

Vous avez remporté en juillet 2017 le prix « the Young accountant of the Year » délivré par le site anglais The Accountant.
Racontez-nous l'histoire de cette distinction anglo-saxonne ?

The Accountant, fondé en 1874, est l'un des magazines professionnels les plus anciens et les plus prestigieux au monde. Le seul magazine mondial couvrant les professionnels de l'expertise comptable, il présente des informations provenant des institutions, réseaux et associations comptables à l'échelle mondiale.

The Accountant & International Accounting Bulletin ont organisé une journée qui a débattu de l'impact accru de la technologie sur la profession comptable et sa pratique. Lors de cette 6ème édition annuelle qui s'est tenue, le 4 octobre dernier à Londres, 17 catégories ont été nominées.

Les prix célèbrent les meilleurs acteurs du marché de la comptabilité à l'échelle mondiale, tant ceux qui servent leurs clients par l'innovation et le leadership, que ceux qui renforcent la pertinence de la profession, briguant des mandats pour servir l'intérêt public.

J'avais été approchée en 2016 par The International Accounting Bulletin pour répondre à une interview sur le thème de l'ascension d'une jeune expert-comptable française. Pour la journée de la femme 2017, le magazine m'a sollicité à nouveau pour contribuer à un numéro spécial sur les femmes dans le monde professionnel.

A la suite de ces diverses publications, j'ai reçu un appel de l'équipe éditoriale du magazine m'annonçant  que j'étais nominée parmi de jeunes experts comptables du monde entier, dans la catégorie « Young accountant of the Year ».

Cette distinction représente un immense honneur pour moi, étant la seule de ma catégorie à exercer dans un cabinet indépendant.

Les professionnels du Chiffre sont en pleine remise en question de leur Business Model avec l'automatisation de la saisie comptable, mais aussi l'arrivée de technologies comme l'IA et la Blockchain.
Quelle sera la recette du succès de votre cabinet ? Conseil, spécialisation... ?
Avez-vous des conseils pour les futurs experts-comptables qui souhaitent créer leur cabinet ? Et pour ceux qui sont déjà installés et s'interrogent sur leur avenir ?

Aujourd'hui le comportement des clients a changé, notre environnement a changé.

Il y a une diversité d'offres en ligne, un flux d'informations accru qui rend nos clients exigeants, souhaitant une réponse rapide à leur demande.

Au sein de mon cabinet, j'ai un mode de fonctionnement très agile. J'interagis régulièrement avec mes clients par mail mais aussi par d'autres moyens de communications en fonction de leur préférence : sms, Skype, WhatsApp, LinkedIn, Twitter...

La recette du succès est de mettre la relation client au centre des préoccupations.

Au-delà du déclaratif (TVA, DSN, liasse fiscale,..), je propose à mes clients une démarche d'accompagnement, dans leur stratégie, leur développement,  l'optimisation de leur process, et leur système d'information.

Il est primordial pour tout cabinet, déjà installé ou en cours, d'apporter du conseil à leurs clients. Échanger régulièrement avec eux, nous permet d'identifier des besoins auxquels ils n'auraient pas pensé seuls. Nous sommes des interlocuteurs indispensables pour guider nos clients dans leurs démarches et servir au mieux leurs intérêts.

Aussi dans un monde qui change à une très grande vitesse, il est important d'afficher des domaines de compétences. Notre profession souffre d'une grande méconnaissance de son champ d'intervention par le grand public. Nous sommes régulièrement assimilés à des comptables qui ne font que du déclaratif, ces mêmes tâches qui tendent à disparaître dans quelques années.

Lorsque l'on étudie les offres des cabinets en général, nous constatons que nous avons tous les mêmes offres généralistes. Se différencier c'est aussi savoir communiquer sur nos domaines de compétences et apporter des outils en complément qui permettent une optimisation des services proposés. Il est indispensable de se doter d'outils novateurs pour pouvoir répondre de façon optimale à toutes les demandes de nos clients qui sont de plus en plus exigeants.