Régime des sociétés mères et filiales et prêt de titres

Article écrit par (310 articles)
Modifié le
4 509 lectures

En application du régime des sociétés mères et filiales, les dividendes perçus par une société mère peuvent bénéficier d'une exonération d'impôt sur les sociétés, à l'exception d'une quote-part de frais et charges de 5% de leur montant brut (exonération à hauteur de 95% du montant des dividendes reçus).

Ce régime spécial est subordonné au respect d'un certain nombre de conditions et notamment à une obligation de conservation des titres pendant deux ans, qui, avant 2006, prenait la forme d'un engagement express de conservation [1]. Le non respect de cette obligation entraîne la déchéance du régime, c'est-à-dire la taxation de la fraction du montant des dividendes perçus qui a bénéficié de l'exonération (i.e. 95% de leur montant).

Pour mémoire, le régime des sociétés mères et filiales peut être appliqué immédiatement après l'acquisition des titres de la filiale, c'est-à-dire avant l'expiration de ce délai de conservation de deux ans. Toutefois, le bénéfice du régime pourra être remis en cause si un transfert de la propriété des titres de la filiale intervient pendant ce délai de deux ans.

Le Conseil d'Etat a rappelé, dans une décision du 26 septembre 2014, que le fait, pour la société mère, de prêter les titres de sa filiale [2] pendant le délai de conservation de deux ans entraîne un transfert de la propriété des titres et, corrélativement, la rupture de l'obligation de conservation des titres.

En l'espèce, une société mère avait appliqué le régime des sociétés mères et filiales au titre des dividendes perçus de la part d'une filiale acquise depuis moins de deux ans. Peu après cette distribution et moins de deux ans après l'acquisition des titres de la filiale, la société mère a conclu une convention de prêt desdits titres. L'administration fiscale a remis en cause l'application du régime des sociétés mères et filiales pour rupture du délai de conservation des titres. Le Conseil d'Etat a validé la position administrative, sur le fondement de l'article 145 du CGI [3] (CE 26 septembre 2014, n°363555, 3ème et 8ème s.-s., Sté Artemis Conseil).

Cette décision a été rendue au titre d'une période où l'obligation de conservation prenait la forme d'un engagement express de conservation des titres mais elle garde tout son intérêt aujourd'hui, les conditions d'appréciation de la continuité de la détention n'ayant pas été impactées par cette modification des conditions formelles de l'obligation de conservation des titres.

[1] Avant 2006, les sociétés devaient prendre un engagement écrit de conservation des titres pendant deux ans. Cet engagement de conservation a été remplacé par une obligation de conservation des titres.

[2] Un prêt de titres est "une opération pratiquée sur les marchés financiers consistant à prêter, respectivement emprunter, des titres contre la promesse de restituer des titres de même nature à une date future, généralement dans quelques jours ou quelques semaines, et moyennant une commission payée par l'emprunteur au prêteur" (Wikipédia).

[3] L'article 145 du CGI prévoit expressément que les titres prêtés ne peuvent pas être pris en compte pour l'application du régime des sociétés mères et filiales.



Clotilde Cattier, avocate spécialisée en fiscalité, inscrite au Barreau de Paris.
Contact : contact@clotilde-cattier.com

Après avoir passé deux ans chez STC Partners et six ans chez Taj (Deloitte), Clotilde a rejoint le cabinet Room Avocats, en Suisse. Elle partage son temps entre Paris et la Suisse.

Ses principaux domaines d'intervention, en fiscalité française et internationale, sont les suivants :

  • fiscalité patrimoniale (restructuration de patrimoine, transmission de patrimoine, acquisition/détention/cession de biens immobiliers, etc.) ;
  • fiscalité des particuliers (imposition des cadres internationaux et des dirigeants, traitement fiscal des pensions de retraite versées sous forme de capital, etc.) ;
  • installation en Suisse de personnes physiques et de sociétés ;
  • fiscalité générale des entreprises (restructurations, assistance à contrôle fiscale, intégration fiscale, problématiques de remontée des liquidités, etc.) ;
  • fiscalité immobilière (fiscalité des marchands de biens et des promoteurs immobiliers) ;
  • fiscalité internationale (transactions transfrontalières, traitement fiscal des flux internationaux, etc.) ;
  • opérations de fusions-acquisitions ;
  • régularisation de la situation fiscale des français détenant des avoirs non déclarés à l'étranger.