Principales mesures intéressant les personnes physiques du PLF pour 2019

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Le Gouvernement a présenté le 2 octobre dernier le projet de loi de finances pour 2019.

Les principales mesures concernant les personnes physiques, contenues dans ce projet, sont succinctement présentées ci-après.

A ce stade, il ne s'agit que d'un projet, dont l'ensemble des mesures doit encore être discuté devant le Parlement. Ce n'est donc qu'à la fin du mois de décembre que nous serons définitivement fixés sur les réformes introduites par ce texte.

Aménagement du dispositif du « pacte Dutreil »

En application du dispositif du « pacte Dutreil », les transmissions par décès ou entre vifs de parts ou actions de sociétés ayant une activité opérationnelle bénéficient d'une exonération de droits de mutation à titre gratuit à hauteur de 75% de la valeur des titres transmis (article 787 B du CGI). L'exonération est subordonnée à la prise d'un engagement collectif de conservation des titres par le défunt ou le donateur, pour lui et ses ayants-cause à titre gratuit, avec un ou plusieurs associés. Cet engagement, d'une durée minimale de deux ans, doit être en cours à la date de la transmission. Au moment de la transmission, chaque héritier ou donataire doit à son tour s'engager à conserver les titres transmis pendant une période de quatre ans, courant en principe à compter de la date d'expiration de l'engagement collectif de conservation des titres (engagement individuel).

Pour plus de détails concernant le dispositif actuellement en vigueur, veuillez consulter l'article suivant « Aspects fiscaux des donations de titres de sociétés - Régimes dérogatoires ».

Le projet de loi propose d'apporter les aménagements suivants à ce dispositif :

  • Sous certaines conditions, les héritiers ou donataires pourraient apporter à une holding les titres reçus au cours de l'engagement collectif de conservation et non plus seulement pendant la période d'engagement individuel.
    En outre, il ne serait plus requis de ladite holding qu'elle ait pour objet exclusif la gestion des participations qu'elle détient dans la société cible et les sociétés du même groupe ayant une activité similaire, connexe ou complémentaire. Cette condition serait remplacée par celle selon laquelle la valeur réelle de l'actif brut de la holding  devrait être, à l'issue de l'apport et jusqu'au terme des engagements collectif et individuel de conservation, composée à plus de 50% de participations dans la société cible. Enfin, il ne serait plus exigé que la holding soit détenue en totalité par les héritiers ou donataires, un seuil de détention ramené à 75% du capital et des droits de vote serait désormais requis.
  • La cession ou la donation partielle des titres objet de l'engagement collectif par l'un des héritiers ou donataires au profit d'un autre signataire du pacte n'entrainerait une remise en cause de l'exonération partielle de droits de mutation à titre gratuit qu'à hauteur des titres cédés ou donnés (et non plus une remise en cause intégrale, comme tel est le cas aujourd'hui).
  • Le bénéfice du dispositif du « pacte Dutreil » est subordonné au respect d'un certain nombre d'obligations déclaratives annuelles (production annuelle d'une attestation émise par la société, certifiant que l'ensemble des conditions d'application du dispositif ont été respectées de manière continue depuis la transmission). Ces obligations seraient supprimées. Une attestation telle que celle visée ci-avant demeurerait cependant exigée en fin d'engagement individuel.
  • Le projet de texte propose de légaliser la position de la doctrine administrative selon laquelle la cession par une société interposée, à l'issue de l'engagement collectif de conservation, des titres de la société cible entraîne pour les bénéficiaires de la transmission, la remise en cause du régime de faveur, même si ces derniers conservent pendant quatre ans les titres de la holding (i.e. les participations doivent demeurer inchangées à chaque niveau d'interposition, pendant toute la durée de l'engagement collectif et pendant la phase d'engagement individuel).

Ces aménagements entreraient en vigueur le 1er janvier 2019.

Elargissement du dispositif d'imposition étalée de la plus-value en cas de crédit vendeur

Actuellement, l'imposition de la plus-value à long terme constatée à l'occasion (i) de la cession à titre onéreux de l'ensemble des éléments de l'actif immobilisé affectés à l'exercice d'une activité professionnelle ou d'une branche complète d'activité et (ii) de la cession d'un fonds de commerce ou assimilé peut être étalée lorsque le vendeur accepte un paiement différé ou échelonné du prix (i.e. un crédit-vendeur) (article 1681 F du CGI).

Ce dispositif est réservé aux entreprises employant moins de dix salariés et dont le total du bilan ou le chiffre d'affaires n'excède pas 2m¤ au titre de l'exercice au cours duquel la cession intervient (i.e. les micro-entreprises).

Le projet de loi envisage d'étendre ce dispositif d'étalement de l'imposition aux gains réalisés à l'occasion de la cession à titre onéreux de droits sociaux représentant la majorité du capital social de la société cédée et d'élargir son application aux « petites entreprises » au sens communautaire du terme (i.e. celles qui emploient moins de cinquante salariés et ont un total de bilan ou réalisent un chiffre d'affaires n'excédant pas 10m¤ au titre de l'exercice au cours duquel intervient la cession). Le texte précise que, à l'issue de la cession, la société cessionnaire ne doit pas être contrôlée par le cédant.

Cette mesure concernerait les cessions intervenues à compter du 1er janvier 2019.

Réforme du dispositif de l'exit tax

Les personnes physiques quittant la France pour s'installer à l'étranger sont redevables d'une imposition sur les plus-values latentes accumulées à raison des titres de sociétés qu'elles détiennent à la date de leur transfert de résidence à l'étranger, sous réserve que ces participations dépassent certains seuils et à condition que les contribuables aient résidé en France pendant au moins 6 ans au titre des 10 dernières années précédant leur départ de France (article 167 bis du CGI).

En pratique, un dispositif de sursis de paiement permet, dans la plupart des cas, de ne pas acquitter cette imposition, celle-ci n'étant effectivement due qu'en cas de cession des titres objet de l'exit tax dans les quinze années suivant le transfert (délai applicable aux transferts intervenus depuis le 1er janvier 2014 ; pour les transferts intervenus entre le 3 mars 2011 et le 31 décembre 2013, ce délai était de huit ans).

En cas de transfert de résidence dans un Etat non membre de l'UE et non partie à l'accord sur l'Espace Economique Européen (EEE), ce sursis de paiement est accordé uniquement sur demande expresse du contribuable, en contrepartie de la constitution de garanties, de la désignation d'un représentant fiscal et du dépôt d'une déclaration dans les trente jours précédant le transfert de résidence hors de France (alors que ce sursis de paiement est accordé de manière automatique en cas d'installation dans un Etat membre de l'UE ou dans un Etat partie à l'EEE).

Pour plus de détails concernant le régime actuellement en vigueur de l'exit tax, veuillez consulter l'article suivant « L'exit tax : mode d'emploi synthétique ».

Le présent projet de loi propose de réduire ce délai de huit/quinze ans à deux ans.

En outre, les situations dans lesquelles le sursis de paiement de l'exit tax serait accordé de manière automatique, sans constitution de garanties, seraient élargies puisqu'elles couvriraient désormais les transferts de résidence dans tout Etat ou territoire ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscale, ainsi qu'une convention d'assistance mutuelle en matière de recouvrement, sous réserve que cet Etat ou territoire ne soit pas considéré comme non coopératif au sens de l'article 238-0 A du CGI.

Par ailleurs, les formalités déclaratives annuelles seraient allégées et les modalités de recalcul de l'exit tax susceptibles d'être mises en ½uvre lors de la survenance d'un évènement mettant fin au sursis de paiement seraient aménagées afin de tenir compte des opérations d'apport de titres à une société contrôlée répondant aux conditions de l'article 150-0B ter du CGI, intervenues postérieurement au transfert de résidence à l'étranger.

Ces nouvelles dispositions s'appliqueraient aux transferts de domicile hors de France intervenus à compter du 1er janvier 2019.



Clotilde Cattier, avocate spécialisée en fiscalité, inscrite au Barreau de Paris.
Contact : contact@clotilde-cattier.com

Après avoir passé deux ans chez STC Partners et six ans chez Taj (Deloitte), Clotilde a rejoint le cabinet Room Avocats, en Suisse. Elle partage son temps entre Paris et la Suisse.

Ses principaux domaines d'intervention, en fiscalité française et internationale, sont les suivants :

  • fiscalité patrimoniale (restructuration de patrimoine, transmission de patrimoine, acquisition/détention/cession de biens immobiliers, etc.) ;
  • fiscalité des particuliers (imposition des cadres internationaux et des dirigeants, traitement fiscal des pensions de retraite versées sous forme de capital, etc.) ;
  • installation en Suisse de personnes physiques et de sociétés ;
  • fiscalité générale des entreprises (restructurations, assistance à contrôle fiscale, intégration fiscale, problématiques de remontée des liquidités, etc.) ;
  • fiscalité immobilière (fiscalité des marchands de biens et des promoteurs immobiliers) ;
  • fiscalité internationale (transactions transfrontalières, traitement fiscal des flux internationaux, etc.) ;
  • opérations de fusions-acquisitions ;
  • régularisation de la situation fiscale des français détenant des avoirs non déclarés à l'étranger.