Principales mesures du projet de loi de finances pour 2019 concernant les entreprises

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Le Gouvernement a présenté le projet de loi de finances pour 2019 le 2 octobre 2018.

Les principales mesures de ce projet intéressant les entreprises sont succinctement présentées ci-après.

A ce stade, comme son nom l'indique, il ne s'agit que d'un projet, dont l'ensemble des mesures doit encore être discuté devant le Parlement. Ce n'est donc qu'à la fin du mois de décembre que nous serons définitivement fixés sur les réformes introduites par ce texte.

Aménagement du régime de l'intégration fiscale

L'intégration fiscale est un dispositif de consolidation des résultats  pour le paiement de l'impôt sur les sociétés. Ce régime implique qu'un résultat d'ensemble des sociétés membres, servant de base au calcul de l'impôt sur les sociétés dû par le groupe, soit calculé. Dans ce contexte, un certain nombre d'opérations intragroupe étaient neutralisées.

Pour plus de détails au sujet de ce régime, nous vous invitons à consulter les articles suivants :

Le présent projet propose que ne soient plus neutralisés pour le calcul de ce résultat groupe :

  • les subventions et abandons de créance intragroupe ;
  • la quote-part de frais et charges afférentes aux plus-values de cession de titres participation réalisées au sein d'un groupe (plus-values bénéficiant du « régime du long terme » visé ci-dessous).

Par ailleurs, le projet envisage également d'ajuster le traitement fiscal des distributions versées au sein du groupe fiscal, inéligible au régime des sociétés mères et filiales, pour le rendre équivalent à celui applicable aux dividendes intragroupe éligibles à ce régime (neutralisation de la distribution, pour le calcul du résultat d'ensemble, à hauteur de 99% de son montant).

Enfin, le projet de texte propose d'étendre certains avantages du régime de l'intégration fiscale relatifs aux dividendes  à certaines situations (i) où une société membre du groupe perçoit des distributions de filiales établies dans un autre Etat de l'UE qui, si elles étaient établies en France rempliraient les conditions pour être membres du groupe et (ii) où une société non membre du groupe perçoit des distributions de filiales établies dans un autre Etat membre qui, si elles étaient établies en France, rempliraient les conditions pour former un groupe fiscal.

Ces aménagements s'appliqueraient aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2019.

Aménagement du dispositif d'exonération des plus-values de cession de titres de participation (i.e. « régime du long terme »)

Les plus-values de cession de titres de participations détenus depuis plus de deux ans, réalisées par des sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés, bénéficient d'une exonération dudit impôt, à l'exception d'une quote-part de frais et charges égale à 12% du montant brut des plus-values (taux effectif d'imposition de 4% pour un taux d'impôt sur les sociétés de 33,33%).

Pour plus de détails concernant le régime actuel, veuillez consulter l'article suivant :

Le projet de loi propose de réduire le montant de la quote-part de frais et charges devant être réintégrée au résultat fiscal à un taux de 5%.

Ces aménagements s'appliqueraient aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2019.

Réforme des dispositifs de limitation à la déduction des charges financières

La réglementation fiscale actuellement en vigueur contient un certain nombre de dispositifs visant à limiter la déductibilité des charges financières (taux maximum d'intérêts déductibles visé à l'article 39, I-3° du CGI, dispositif de lutte contre la sous-capitalisation de l'article 212, II du CGI, rabot fiscal prévu à l'article 212 bis du CGI, etc.).

Pour plus de détails concernant ces dispositifs, nous vous invitons à consulter le dossier suivant :

Le présent projet de texte envisage de transposer l'article 4 de la directive « ATAD » (directive (UE)2016/1164 du Conseil du 12 juillet 2016) en introduisant un plafond de déduction des charges financières nettes égal à 30% de l'EBITDA, lui-même plafonné à 3m¤ (i.e. montant maximum de charges financières pouvant être déduites au titre d'un exercice de douze mois).

Le dispositif du rabot fiscal (articles 212 bis et 223 B du CGI), celui dit de l'amendement Carrez (article 209, IX du CGI), ainsi que celui de lutte contre la sous-capitalisation (article 212 II du CGI) seraient supprimés.

Ces aménagements s'appliqueraient aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2019.

Réforme du régime d'imposition des produits de concession et de brevets

Actuellement, les redevances de concession et plus-values de cession tirés des droits de la propriété intellectuelle (brevets, marques, etc.) bénéficient d'un taux réduit d'imposition (15% pour les entreprises passibles de l'impôt sur les sociétés et 12,8% pour les entreprises relevant de l'impôt sur le revenu), que les brevets et assimilés aient été développés par l'entreprise ou acquis par elle.

Le présent projet vise à mettre cette réglementation en conformité avec l'approche dite « Nexus » consacrée par l'OCDE et l'UE.

Dans ce contexte, le projet propose de proportionner les revenus bénéficiant des taux réduits précités au niveau des dépenses de recherches et développement réalisées en France par le contribuable pour créer ou développer l'actif incorporel. En outre, le champ d'application du taux réduit serait corrigé (exclusion des inventions brevetables non brevetées mais extension aux logiciels originaux protégés par le droit d'auteur) et unifieé à 15%. Ce nouveau régime serait optionnel.

Ces aménagements s'appliqueraient aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2019 pour la plus grande partie d'entre eux.

Modification des règles de calcul du dernier acompte d'impôt sur les sociétés des grandes entreprises (« 5ème acompte »)

Alors que la généralité des entreprises fonde le calcul du dernier acompte d'impôt sur les sociétés  sur les résultats du dernier exercice clos, les sociétés dont le chiffre d'affaires du dernier exercice clos est égal ou supérieur à 250m¤ déterminent le montant de cet acompte par référence au bénéfice estimé de l'exercice, lorsque celui-ci a augmenté de manière significative par rapport à l'exercice précédent. Le calcul du montant du dernier acompte d'impôt est modulé en fonction du chiffre d'affaires réalisé au titre de l'exercice précédent.

Pour plus de détails concernant le régime actuel, nous vous invitons à consulter cet article :

Le projet de loi propose que, pour les exercices ouverts entre  le 1 er janvier et le 31 décembre 2019, le dernier acompte soit calculé dans les conditions suivantes :

  • le dernier acompte d'IS des sociétés dont le chiffre d'affaires est compris entre 250m¤ et 1md¤ et dont le bénéfice estimé a augmenté de plus de 25% par rapport à l'exercice précédent, s'élèverait à la différence entre 95% (et non plus 80%) du montant de l'impôt calculé sur le bénéfice estimé et le montant des trois acomptes déjà versés ;
  • le dernier acompte des sociétés dont le chiffre d'affaires est situé entre 1md¤ et 5md¤ et dont le bénéfice estimé a augmenté de plus de 11,1% par rapport à l'exercice précédent, correspondrait à la différence entre 98% (et non plus 95%) du montant de l'impôt calculé sur le bénéfice estimé et le montant des trois acomptes déjà versés ;
  • le dernier acompte des sociétés dont le chiffre d'affaires est supérieur à 5md¤ et dont le bénéfice estimé a augmenté de plus de 2,04% par rapport à l'exercice précédent, demeurerait égal à la différence entre 98% du montant de l'impôt calculé sur le bénéfice estimé et le montant des trois acomptes déjà versés.

Mise en place d'une révocabilité possible en cas de passage à l'impôt sur les sociétés

En l'état actuel de la réglementation, l'option pour l'assujettissement de ses résultats à l'impôt sur les sociétés, par une société de personnes, est irrévocable.

Pour plus de détail en ce qui concerne le régime actuel de l'option des sociétés de personnes pour leur assujettissement à l'impôt sur les sociétés, veuillez consulter l'article suivant :

Le présent projet de loi envisage de créer une exception à ce principe d'irrévocabilité de l'option pour l'impôt sur les sociétés en autorisant les sociétés ayant opté pour cet impôt à renoncer à leur option, à condition que celles-ci interviennent au plus tard avant la fin du mois précédant la date limite de versement du premier acompte d'impôt sur les sociétés du cinquième exercice suivant celui au titre duquel l'option a été exercée. Passé cette date, l'option pour l'impôt sur les sociétés deviendrait irrévocable. En cas de renonciation à l'option, il ne serait plus possible pour la société d'opter à nouveau, dans le futur, pour l'impôt sur les sociétés.

En l'absence de précision sur leur date d'entrée en vigueur, ces aménagements s'appliqueraient à compter de la publication de la loi de finances.

Insertion d'une clause anti-abus générale en matière d'impôt sur les sociétés

Le présent projet de texte propose d'introduire une clause anti-abus générale en matière d'impôt sur les sociétés, dont la rédaction est similaire à celle prévue dans le cadre du régime des sociétés mères et filiales (article 119 ter, 3 du CGI).

Pour plus de détail au sujet de cette clause anti-abus applicable dans le cadre du régime des sociétés mères et filiales, veuillez consulter l'article suivant :

Plus précisément, il ne serait pas tenu compte, pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés, des montages ou séries de montages qui, ayant été mis en place pour obtenir, à titre d'objectif principal ou au titre de l'un des objectifs principaux, un avantage fiscal allant à l'encontre de l'objet ou de la finalité du droit fiscal applicable, ne sont pas authentiques compte tenu de l'ensemble des faits et circonstances pertinents. Un montage ou une série de montages serait considéré comme non authentique dans la mesure où il ne serait pas mis en place pour des motifs commerciaux valables, reflétant la réalité économique.

Cette disposition s'appliquerait aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2019.



Clotilde Cattier, avocate spécialisée en fiscalité, inscrite au Barreau de Paris.
Contact : contact@clotilde-cattier.com

Après avoir passé deux ans chez STC Partners et six ans chez Taj (Deloitte), Clotilde a rejoint le cabinet Room Avocats, en Suisse. Elle partage son temps entre Paris et la Suisse.

Ses principaux domaines d'intervention, en fiscalité française et internationale, sont les suivants :

  • fiscalité patrimoniale (restructuration de patrimoine, transmission de patrimoine, acquisition/détention/cession de biens immobiliers, etc.) ;
  • fiscalité des particuliers (imposition des cadres internationaux et des dirigeants, traitement fiscal des pensions de retraite versées sous forme de capital, etc.) ;
  • installation en Suisse de personnes physiques et de sociétés ;
  • fiscalité générale des entreprises (restructurations, assistance à contrôle fiscale, intégration fiscale, problématiques de remontée des liquidités, etc.) ;
  • fiscalité immobilière (fiscalité des marchands de biens et des promoteurs immobiliers) ;
  • fiscalité internationale (transactions transfrontalières, traitement fiscal des flux internationaux, etc.) ;
  • opérations de fusions-acquisitions ;
  • régularisation de la situation fiscale des français détenant des avoirs non déclarés à l'étranger.