Les principes de l'effectuation et le projet entrepreneurial

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Tout commence avec les travaux de Saras SARASVATHY qui pose la question de la logique suivie par les entrepreneurs. Elle s'intéresse aux entrepreneurs qui ont réussi à créer plusieurs fois des entreprises : les entrepreneurs experts.

Il en ressort 4 grands principes et une autre vision du processus entrepreneurial.

Il existe deux méthodes d'approche des situations :

  • Les objectifs choisis définissent les ressources nécessaires (ex : je définis mon menu, et partant des recettes je définis les ingrédients nécessaires) : c'est l'approche causale (on recherche les causes qui provoquent un effet) ;
  • Les ressources définissent les objectifs (ex : j'établis le menu en fonction des ingrédients dont je dispose) : c'est l'approche effectuale (on détermine les effets possibles d'une cause donnée.

Les quatre grands principes de l'approche effectuale

Les travaux de Saras SARASVATHY qui se fondent sur l'approche effectuale ont mis en évidence quatre grand principes.

Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras

Les ressources dont je dispose aujourd'hui sont plus utiles et plus importantes que des ressources hypothétiques dont je ne dispose pas.

La recette pose un postulat implicite qui veut que l'on peut toujours trouver les ingrédients dont on a besoin. Mais il s'agit d'un cas idéal car les entrepreneurs sont rares à pouvoir mobilier n'importe quelle ressource.

L'effectuation est donc plus réaliste puisque elle part des ressources acquises.

Ce sont les ressources actuelles qui déterminent les objectifs.

Quelles sont les ressources que chaque entrepreneur détient ?

Tout entrepreneur détient 3 ressources :

  • le MOI : l'entrepreneur en tant que personne est une ressource ;
  • les connaissances qui résultent de l'expérience, de la formation, de l'éducation... ;
  • le réseau.

Toute personne peut devenir entrepreneur puisque tout le monde dispose de trois ressources universelles, qui doivent permettre d'accéder à celles qui pourraient faire défaut.

Le raisonnement en perte acceptable

Le principe de la perte acceptable consiste à être prêt à perdre quelque chose de défini pour gagner quelque chose d'indéfini.

Les entrepreneurs experts misent leur progression sur un contrôle de ce qu'ils sont prêts à perdre davantage que sur une anticipation du gain attendu.

La maîtrise du risque passe par des limites établies et le partage du risque : les entrepreneurs s'appuient sur d'autres pour leur aventure entrepreneuriale.

Le patchwork fou

Le principe du patchwork est que le résultat final (motif) n'est pas connu à l'avance.

Le résultat est imprévisible et dépend de la contribution des volontaires.

Ce sont les ressources mises en commun qui orientent le résultat final.

Un projet entrepreneurial est un processus social qui nécessite l'engagement de parties prenantes, dont les ressources permettent de faire avancer le projet. Les ressources apportées ouvrent de nouvelles perspectives.

La réussite, la progression du projet dépend de la capacité de susciter l'envie de parties prenantes, qui apportent de nouvelles ressources.

Plus de ressources = plus de buts possibles

L'idée devient le fruit de ce processus continu (ce qui bat en brèche le mythe de l'idée visionnaire). L'objectif n'est donc pas de planifier mais de fédérer.

La progression se fait par l'engagement d'un nombre croissant de parties prenantes. L'augmentation des parties prenantes, augmentent les ressources et donc les objectifs.

Le principe de la limonade : bien réagir en cas de surprise

Le principe de la limonade repose sur la survenue d'un évènement inattendu qui provoque une innovation grâce à la bonne réaction de l'entrepreneur.

Ce principe est basé sur un proverbe anglais dont une mauvaise traduction serait : « si la vie vous envoie des citrons, faîtes de la citronnade ».

Ce principe repose sur les effets positifs de la surprise. Or les principes des apprentissages en management reposent sur la nécessité d'éviter les surprises.

L'objectif est donc de ne pas dépenser son énergie à chercher à éviter les surprises et risquer de se tromper mais à se préparer à y répondre.

Il faut être réceptif aux signaux du marché et accueillir les évènements positifs ou négatifs pour y détecter d'éventuelles opportunités. Il faut être capable de redéfinir ses objectifs (qui émergent en fonction des ressources mais également des surprises).

L'entrepreneur doit être réceptif aux signaux du marché

Le processus entrepreneurial



Le processus entrepreneurial selon l'approche effectuale

L'approche effectuale permet de réaliser des projets qui semblent impossible à réaliser lorsqu'ils sont appréhendés de manière causale :

  • les ressources sont mises en ½uvre progressivement (moyens faibles) ;
  • Cette mise en ½uvre s'appuie sur un réseau croissant qui constitue une barrière à l'entrée pour des concurrents arrivés plus tard mais qui disposeraient de ressources importantes ;
  • la démarche effectuale permet d'aller très vite en créant un effet de levier sur les ressources via les parties prenantes.

Comment sont mis en ½uvre les principes de l'effectuation ?

Il est assez évident de comprendre que cette approche effectuale est à la base d'un cercle vertueux : le rôle des parties prenantes est primordial car elles apportent de nouveaux moyens qui permettent de définir de nouveaux buts augmentant de facto l'ambition.

La notion de projet viable

La dynamique d'un projet définit sa viabilité.

Le point de départ c'est l'individu. Une idée n'est rien sans action. L'idée peut être banale et basée sur de l'information accessible par tous.

Ce qui détermine la viabilité du projet c'est la dynamique d'engagement des parties prenantes.

Les parties prenantes : un levier clé de progression

L'art de l'entrepreneur est fondamentalement celui de l'intéressement : une partie prenante ne s'engagera que si elle y trouve son intérêt.

La caractéristique d'un entrepreneur est d'être capable de donner une valeur à une ressource grâce à un usage inattendu.

L'effectuation pose le postulat qu'il vaut mieux travailler avec le client que l'on a sous la main plutôt que de perdre des ressources à en trouver un mieux.

Effectuation : travailler avec son client vaut mieux que de perdre des ressources à en trouver un meilleur.



Maxime SOULIGNAC est expert-comptable diplômé inscrit auprès du conseil régional de l'ordre des experts-comptables de Rouen Normandie.

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