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La saison fiscale va être compliquée cette année, raison de plus pour l'alléger !

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Catégorie : Actualité des métiers du chiffre
Période fiscale : quelle est la priorité et les solutions à mettre en place ?

Les saisons fiscales se suivent... et se ressemblent ! L'année dernière encore, vous aviez terminé la saison précédente en vous disant « plus jamais ça ». Cette année, la situation est encore plus compliquée. Entre l'obligation d'utiliser les liasses millésimées 2020 et le confinement, rien ne va plus ! Alors comment faire pour s'en sortir ?

Il n'est pas question, à cette époque de l'année où les cabinets croulent déjà sous les bilans, de suggérer de revoir tous ses process, de rédiger de nouvelles procédures, etc. Le temps manque, nous sommes tous d'accord sur ce point. Mais est ce que tout est perdu pour autant pour cette saison ? Non, bien évidemment !

Voyons ensemble quelles solutions rapides et efficaces, à effet immédiat, peuvent être envisagées dès la fin de la lecture de cet article pour faire en sorte de réduire la charge de travail de toute l'équipe sur les bilans, sans impact évidemment sur la qualité et la conformité des bilans.

 

La priorité : gagner du temps

Faire une (petite) pause, en pleine période fiscale pour « réfléchir à comment gagner du temps » ? Un peu tard direz-vous ! Et pourtant... Prenons un exemple : imaginons un bûcheron qui, en plein milieu de la coupe d'un arbre, s'aperçoit que sa lame n'est plus assez affûtée. A-t-il intérêt à s'acharner à poursuivre son travail avec un outil mal aiguisé ou bien est-il préférable pour lui de « perdre » cinq minutes pour aiguiser sa lame et repartir de plus belle avec un outil opérationnel et qui lui permettra de terminer plus vite son travail et avec beaucoup moins d'effort ?

Alors, prêt à aiguiser votre lame ?

Même si la saison fiscale est déjà bien entamée, cela ne doit pas empêcher les cabinets de se poser quelques instants pour se donner les moyens de mettre en place quelques techniques de travail visant à alléger la charge de travail des collaborateurs en supprimant certains travaux inutiles.

Les cabinets ont souvent de mauvaises habitudes ancrées : comptabilité d'engagement, écritures d'inventaire pour des montants ridicules, culte des comptes « justes », primauté de la comptabilité sur l'entreprise... Sans s'en rendre compte, les collaborateurs appliquent des règles et méthodes de travail en place depuis des décennies dans le cabinet et qui n'ont jamais été remises en cause.

Pour autant, tout ce travail est-il indispensable ? obligatoire sur tous les dossiers ? imposé par des normes ?

Il existe deux manières de gagner du temps sur un dossier :

  • La première manière consiste à s'équiper d'outils modernes permettant d'automatiser la saisie comptable dans les cabinets. Tous ces outils font gagner un temps précieux aux collaborateurs qui n'ont plus à saisir les factures, les opérations bancaires... On remplace ainsi le temps « homme » par du temps « machine ». Mais l'époque est peut-être mal choisie pour en parler. Mettre en place de nouveaux outils en pleine période fiscale (ce qui implique en plus de revoir de manière approfondie ses process de production) n'est peut-être pas la meilleure solution aujourd'hui...

  • L'autre méthode, plus facile à mettre en place, consiste à supprimer des tâches réalisées sur les dossiers qui n'apportent rien aux comptes, ni au client. C'est là tout l'enjeu pour les semaines restantes de la période fiscale en cours. Bien sûr, on ne va pas repenser les process aujourd'hui. Mais en identifiant ces travaux qui font perdre du temps et qui consomment une énergie considérable aux collaborateurs, on peut y mettre fin dès à présent et gagner ainsi un temps précieux.

 

Quelles solutions mettre en place ?

Les travaux inutiles (ou gaspillages) sont des opérations qui pourraient être évitées car non seulement elles n'apportent rien au client, mais ils ne sont imposés ni par les normes professionnelles, ni par la réglementation fiscale. En voici quelques illustrations.

Eviter les interruptions inopinées

Principe

La gestion des appels téléphoniques et des mails est indispensable. Les collaborateurs sont sans cesse dérangés par des clients qui appellent ou envoient des mails pour demander un document ou poser une question. Or en période de bilan, la concentration est absolument essentielle.

Ces multiples interruptions ne présentent très souvent aucun caractère d'urgence. Or elles obligent le collaborateur à abandonner le dossier en cours pour ouvrir le dossier du client qui appelle avant de se replonger dans le dossier initial. Tout ceci constitue autant de pertes de temps et de risques d'erreurs. En outre, quand les bureaux sont partagés, la gêne est contagieuse ! Tous les collaborateurs du bureau sont dérangés.

Solution

Pour éviter la gêne permanente, le cabinet doit fixer des plages horaires au cours desquelles les collaborateurs sont disponibles pour les clients (par téléphone ou par mail) et des plages horaires réservées au travail sur les dossiers.

Par exemple, les collaborateurs ne répondent au téléphone et aux mails que le matin de 9h à 11h.

Il faut, par contre, informer les clients (et si possible les prévenir en amont). Cela peut se faire au travers d'un pied de mail qui annonce la couleur en précisant que le collaborateur ne sera disponible par mail ou téléphone que le matin, ou que l'après-midi, etc.

Faire bien du premier coup

Principe

Imaginez-vous un instant commencer à cuisiner un gâteau sans vous être assurés à l'avance que vous avez bien tous les ingrédients ?

Pour les bilans ou la saisie, c'est pareil (avec la gourmandise en moins soyons honnête) ! Bien sûr, on n'est jamais à l'abri d'une facture manquante au moment de la saisie ou de la révision. Mais il faut s'assurer que, a priori, les éléments nécessaires ont été reçus :

  • les factures d'achats et de ventes ont été envoyées/scannées par le client ou mises à disposition sur une box ;
  • les relevés bancaires ont été transmis par le client (fichier pdf, export à partir du site, récupération des relevés via une plateforme dédiée, etc.).

Se mettre à travailler sur un dossier et constater qu'il manque la moitié des pièces, c'est se condamner à s'y remettre en plusieurs fois et donc perdre un temps précieux pour se replonger dans le dossier à chaque fois.

Solution

Une règle d'or : ne pas commencer un travail sans s'être assuré d'avoir reçu toutes les pièces. Pour parer à ces situations, le meilleur moyen consiste à anticiper la réception des pièces comptables avant de se mettre sur le dossier.

Il est indispensable de mettre en place un contrôle des pièces arrivées pour s'assurer que tous les éléments a priori attendus (factures d'achats, ventes, relevés bancaires, etc.) nous sont bien parvenus. Ce n'est pas la veille ou le matin de se mettre sur le dossier que l'on constate que le client n'a pas transmis toutes les pièces.

Bien évidemment, ces contrôles doivent être anticipés plusieurs semaines à l'avance. Et si les documents ne sont pas arrivés, le dossier doit être décalé. Vous intercalez un dossier a priori complet et le dossier incomplet sera traité plus tard. Et vous n'oubliez pas de relancer pour les pièces manquantes !

Astuce

Ce contrôle à l'arrivée ne relève d'ailleurs pas nécessairement du collaborateur responsable du dossier mais peut être fait par une autre personne en fonction des disponibilités de chacun. Mais ça, ça ne s'organise pas en pleine saison !

 

Gérer les pièces manquantes

Parmi les situations qui font perdre beaucoup de temps, figure en bonne place l'absence de certaines pièces comptables. En effet, le client a transmis la plupart de ses factures d'achat, mais il en manque. Que faire ?

La plupart des cabinets comptabilisent les opérations dans un compte d'attente et relancent le client pour qu'il envoie les pièces manquantes. Cependant, l'expérience montre que le client envoie rarement les pièces manquantes pour la simple et bonne raison qu'il ne les a pas ! Il a oublié de les demander ou il les a tout simplement perdues... Le résultat est le même, il ne peut rien faire pour nous. Or, la plupart du temps, non seulement ces factures portent sur quelques centaines voire quelques dizaines d'euros, mais, en outre, on dispose de l'information sur le relevé bancaire du nom du fournisseur.

Quel risque prendrait le cabinet à comptabiliser directement une facture en charge sans même l'avoir vue lorsque le relevé indique « SFR », « Leroy Merlin », « Carrefour », etc. ?

Autrement dit, le cabinet doit définir des règles de comptabilisation instantanée des factures manquantes en dessous d'un certain seuil et à partir du moment où l'information disponible sur le relevé bancaire est suffisante pour identifier la nature de la charge en rapport avec l'activité du client.

L'instauration de telles règles présente le double intérêt de permettre au collaborateur de ne pas laisser traîner en compte d'attente des factures pendant plusieurs mois, avec relances multiples au client, et de soulager le client dans ses recherches de justificatifs pour quelques centaines d'euros dont il n'a que faire. D'autant que s'il ne les a pas fournis, en règle générale, c'est qu'il ne les avait pas et qu'il ne les aura pas davantage six mois après !

Bien entendu, ces règles de comptabilisation « sans facture » ne concernent que les petites factures. D'autres règles doivent être définies pour les dépenses plus conséquentes. Et, bien entendu, ces règles ne sont à appliquer que s'il manque un petit nombre de factures. Si la comptabilité est globalement lacunaire, le cabinet doit s'interroger sur son rôle et sa capacité à établir des comptes annuels.

Supprimer (ou au moins réduire) la surqualité

Principe

N'y a-t-il pas des actions réalisées par le cabinet qui outrepassent les attentes et besoins du client ? Cela passe par des travaux trop précis, des contrôles exagérés, des contrôles réalisés « au cas où » on détecterait une anomalie qui n'arrive finalement... jamais ! Ces surcontrôles, qui vont au-delà de ce qui est utile, n'apportent aucune valeur ajoutée, consomment du temps et empêchent le cabinet d'aider vraiment les clients.

Comme le dit l'adage : Le mieux est l'ennemi du bien. Il est encore temps d'identifier certaines actions qui peuvent être allégées... dès demain.

Solutions

Commencer par mettre en place un seuil de signification. Le seuil de signification est le montant à partir duquel les opérations deviennent significatives c'est-à-dire qu'elles sont susceptibles d'influencer le jugement d'un lecteur des comptes (dirigeant, associé, banquier, etc.). En-dessous de ce montant, les écritures mal imputées ou non comptabilisées n'ont pas d'impact « visible » sur le résultat de l'entité ou sur les comptes annuels dans leur ensemble et n'altèrent donc pas l'opinion du lecteur des comptes.

Rappelons que le seuil de signification est explicitement prévu dans la norme de présentation, alors pourquoi s'en priver lors de la révision des comptes ?

La mise en place d'un tel seuil va permettre aux collaborateurs (mais également à l'expert-comptable dans sa révision des comptes annuels), d'éviter un examen inutile de certains postes non significatifs au regard des comptes de l'entreprise.

Ensuite, il faut arrêter de passer des écritures de fin d'année pour quelques dizaines ou quelques centaines d'euros sur des postes de frais généraux (téléphone, électricité, assurance, loyers, abonnements, etc.). Ces écritures de cut-off (charges constatées d'avance, charges à payer, ...) doivent être réservées aux opérations significatives, c'est-à-dire qui impactent vraiment le résultat. N'oublions pas que ces opérations sont passées chaque année pour des montants très proches d'une année sur l'autre et contre-passées en début d'année... Que de travail inutile ! Alors pourquoi s'obstiner à les passer ?

Supprimer les photocopies injustifiées dans le dossier de travail. Il n'est pas question de repenser le dossier de travail en profondeur. Ce n'est pas l'époque ! En revanche, il n'est pas inutile de rappeler aux collaborateurs que ce n'est pas la taille qui compte ! Le bilan ne sera pas plus juste si le dossier de travail est plus épais. Le dossier de travail ne doit contenir que des informations utiles et nécessaires à la compréhension du dossier. Toute copie d'un document permanent déjà disponible ailleurs ou d'un justificatif d'un montant de faible valeur ne sert tout simplement à rien. Faire une photocopie d'un document qui ne sert à rien est donc une pure perte de temps.

Enfin, il faut supprimer les contrôles inutiles. Il faut faire le point avec les collaborateurs sur les contrôles incontournables (rapprochement des ventes avec la comptabilité, validation de la cohérence des encaissements en banque avec le chiffre d'affaires, etc.), et supprimer les contrôles chronophages qui n'apportent rien de plus à la qualité des comptes annuels (pointer certains postes de bilan ou de frais généraux sans enjeux, etc.).

Réfléchir à l'(in)utilité d'une comptabilité d'engagement

Principe

La question n'est pas ici de lancer le débat « comptabilité d'engagement versus comptabilité de trésorerie » et de l'utilité de telle ou telle solution pour le client. La comptabilité de trésorerie est autorisée en cours d'année pour les sociétés imposées au régime simplifié d'imposition, sous réserve d'arrêter les comptes annuels en engagement.

Autrement dit, pour ces sociétés, quelle différence peut-on faire entre un bilan tenu en comptabilité de trésorerie tout au long de l'année, puis en engagement à la clôture, et un bilan tenu en engagement tout au long de l'année ? Aucune !

La comptabilité de trésorerie, en pleine période fiscale, permet un réel gain de temps pour les cabinets dans la mesure où le nombre d'opérations est considérablement réduit.

Rappelons qu'une comptabilité à l'engagement nécessite davantage d'écritures comptables (écritures d'achats/ventes, écriture en banque, lettrage, etc.) ainsi que des rapprochements bancaires réguliers

Mais alors, pourquoi ne pas user de cette option ?

Solution

Entendons-nous bien. Il n'est pas question de renoncer à la comptabilité d'engagement, par principe. Avec les nouveaux outils de production, cette méthode d'enregistrement des opérations est de plus en plus facile à gérer. Toutefois, dans certaines situations, la comptabilité de trésorerie est préférable, notamment en période fiscale justement.

L'option pour la comptabilité de trésorerie n'est pertinente que dans les cas où :

  • le client dépose ses pièces une fois l'an, généralement à compter de février-mars N+1 ;
  • la comptabilité, par définition, n'a pas encore été commencée ;
  • le cabinet enregistre manuellement les écritures, sans passer par des outils de dématérialisation avec reconnaissance des caractères et imputation automatique des écritures

Le cabinet doit lister les clients remplissant les conditions ci-dessus. Pour ces clients, dans la mesure où la comptabilité de l'exercice n'est pas commencée, il est encore temps de tout comptabiliser en comptabilité de trésorerie.

 

En conclusion

La période fiscale est inéluctable. Elle fait partie du métier. Cependant, ce n'est pas une raison pour ne pas chercher à alléger cette période et rendre la vie plus sereine aux collaborateurs.

Au travers de ces exemples concrets, nous avons voulu montrer qu'il n'est jamais trop tard pour réfléchir à des moyens de gagner du temps.

Bien évidemment, ces illustrations ne sont que la première marche du vaste chantier de la refonte des process et des outils. Ce chantier, bien plus vaste, devra être lancé dans les cabinets pour repenser les process de production, mais il faudra attendre la fin de la période fiscale pour vous y pencher...

Alors, à vos marques ?

Fabien Bocci

Fabien Bocci
Expert-comptable et consultant chez B-ready

Fabien Bocci sur Twitter Fabien Bocci sur LinkedIn b-ready sur Youtube


La saison fiscale va être compliquée cette année, raison de plus pour l'alléger !


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