Projet Everest : EY fait marche arrière sur la scission des activités d'audit et de conseil

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EY, un des quatre plus grands cabinets mondiaux met fin à son projet de scission de ses activités d'audit et de conseil, après des mois de désaccord interne et l'opposition de certains dirigeants aux États-Unis. Retour sur les raisons de cet abandon et les enjeux pour l'entreprise.

Un projet de restructuration avorté

« Le comité exécutif américain a décidé de ne pas poursuivre la conception [du projet Everest.] Compte tenu de l'importance stratégique [de la branche d'EY aux États-Unis pour le mener à bien] « nous arrêtons les travaux sur le projet ».

C'est par ces mots que la direction mondiale d'EY a annoncé la fin du gigantesque projet de scission de ses activités d'audit et de conseil, dans une note transmise à l'AFP et signée notamment par le PDG d'EY, Carmine Di Sibio.

Pourtant, le projet de scission, baptisé Projet Everest et lancé fin 2021, aurait constitué la plus grande réorganisation de l'industrie comptable depuis plus de deux décennies.

Réduire les conflits d'intérêts pour générer de la croissance

Le Projet Everest avait été défendu par le PDG mondial d'EY, Carmine Di Sibio, comme une solution pour libérer les deux parties de l'entreprise des règles de conflit d'intérêts qui empêchent les consultants de vendre bon nombre de leurs services aux clients de la branche audit.

Le calendrier avait même été fixé : les 13 000 associés d'EY dans le monde (hors Chine) devaient se prononcer sur ce projet au cours du 2e trimestre 2023, chaque branche nationale étant indépendante juridiquement au sein du réseau. L'introduction en bourse de l'activité de conseil aurait ensuite eu lieu d'ici la fin de l'année 2023.

Des désaccords internes liés notamment aux activités fiscales

Cependant, les dirigeants de la filiale américaine n'étaient pas convaincus de la pertinence de diviser l'activité fiscale d'EY en deux et doutaient de la solidité financière de la future entité axée sur l'audit.

Julie Boland, qui dirige la filiale américaine, avait ainsi semé le doute sur l'avenir du projet en demandant une « pause » du projet. Lorsqu'on sait que la branche américaine d'EY pèse 40% du chiffre d'affaires mondial du réseau, on comprend que son avis compte.

Quel avenir pour EY après l'abandon du Projet Everest ?

Selon le Financial Times, qui a révélé cette décision avant sa confirmation par la direction mondiale, la fin du Projet Everest soulève des interrogations sur l'avenir de Carmine Di Sibio, qui devait diriger l'activité de conseil après la scission.

Dans la note transmise à l'AFP, le PDG monde d'EY précise toutefois que la direction mondiale d'EY « reste déterminée à aller de l'avant avec la création de deux organisations de classe mondiale qui font encore progresser la qualité de l'audit, l'indépendance et le choix des clients ». Sous quelle forme ? La question reste ouverte. Une chose est sûre : la fin du projet Everest a un coût pour le géant mondial. Le Financial Times estime qu'EY a d'ores et déjà dépensé « des centaines de millions de dollars » dans sa conception, et que « plus de 2 000 membres de son personnel ont participé à la planification »[1].

[1] EY scraps break-up plan after months of internal dissent, 11 avr. 2023



Julien Catanese Aubier
Diplômé d'expertise comptable, après 7 ans en tant que rédacteur en chef puis directeur de la rédaction Fiscalistes et experts-comptables chez LexisNexis, Julien rejoint l'équipe Compta Online en tant que Directeur éditorial de juin 2020 à octobre 2023.