Expert-comptable : de la feuille blanche à la facture client

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Après une première étude remarquée sur l'uberisation de la profession, Les Moulins, le think tank de la profession comptable, se sont attelé à une nouvelle question fondamentale pour l'avenir des cabinets : quelles missions demain ?

Les auteurs reviennent dans cet article sur les grandes conclusions de cette étude [1].

La première partie de cet article avait pour ambition de présenter une démarche d'analyse et de classification des nouvelles missions susceptibles d'être développée par les cabinets.

Dans cette deuxième partie, nous nous intéresserons à la mise en ½uvre au sein d'un cabinet ou, autrement dit, comment identifier les missions qui correspondent effectivement à un cabinet.

La démarche générale

Rappelons que le développement de missions de conseil n'est absolument pas une question de chance ou même d'opportunité, mais le fruit d'un long travail de définition, de construction, de modélisation et de commercialisation d'une offre, d'adaptation du cabinet... Un cabinet qui n'a pas structurellement organisé cette activité de conseil ne peut, du jour au lendemain, s'improviser sur ce nouveau métier.

C'est pourquoi, tout cabinet qui souhaite développer de telles missions doit impérativement suivre une démarche structurée. La démarche générale qui permet de mener à bien ce projet peut être ainsi résumée :

  • En amont de la démarche : diagnostic du cabinet, définition d'une stratégie, élaboration et formalisation d'un projet de cabinet, mise en place d'un plan de déploiement opérationnel du projet de cabinet
  • Définition de l'offre : quelles missions ? Pour quels clients ? A quel prix ? Avec quelles ressources ?
  • Modélisation de la mission : définition et formalisation précise de la mission, modélisation des process, création des outils.
  • Vente de la mission : marketing et communication externe, communication interne.
  • Organisation et adaptation du cabinet : gestion du changement au sein du cabinet, organisation de l'activité conseil, adaptation des compétences aux nouvelles missions, pilotage de l'activité.

Si les phases de modélisation et de commercialisation de l'offre, d'une part, et d'organisation du cabinet, d'autre part, ont été assez bien couvertes par la littérature professionnelle, la phase de construction de l'offre a été largement oubliée. C'est pourquoi, l'étude des Moulins n'a pas vocation à aborder l'ensemble du processus de déploiement des missions de conseil, mais de se concentrer sur la partie largement ignorée de la démarche qu'est l'identification des missions pertinentes.

De la feuille blanche à l'idée

Cette étape d'identification des missions, souvent considérée comme une évidence, est pourtant une vraie difficulté concrète et donc un frein au développement de ces missions.

Sur le papier, c'est simple. Pour construire l'offre, il suffit de « choisir » les missions que le cabinet souhaite développer parmi les innombrables listings de « missions possibles » et le tour est joué. En pratique, c'est une tout autre histoire.

  • Pour développer de nouvelles missions qui ont une chance de réussir, celles-ci doivent être en symbiose parfaite avec le cabinet. Or, une mission n'est pertinente qu'en fonction de son degré d'intégration dans son environnement : le cabinet, ses clients, ses collaborateurs, sa stratégie (enfin, pour les cabinets qui en ont une, il paraît que ça existe...), son implantation géographique, sa concurrence... Plus une mission « ressemble » au cabinet, plus elle est naturelle, cohérente, évidente, légitime et plus son potentiel de succès est élevé.
  • La difficulté ne consiste pas à trouver « des » missions, ce qui est d'une facilité déconcertante, mais à trouver les bonnes ! Chaque cabinet doit donc faire sa propre démarche pour trouver SES bonnes missions [2]. Chaque cabinet doit donc engager une démarche personnelle de recherche de SES missions.

La démarche d'identification des missions pertinentes, condition sine qua non de succès du développement de ces missions, se déroule en trois étapes dont nous présentons ici les grandes lignes.

  • La recherche d'idées proprement dite.
  • Cette étape est nécessairement collective. Son succès repose en bonne partie sur la mise en commun, l'échange, le partage. La méthode n'est pas pertinente [3] pour un dirigeant de cabinet, seul dans son bureau.
  • C'est de la confrontation, de l'échange, de la mise en commun que naîtront les idées les plus pertinentes. Toute idée proposée a un double intérêt : être une idée en tant que telle et déclencher d'autres idées chez les autres.
  • La sélection des idées.
  • Après la première phase de divergence, la deuxième étape du processus créatif consiste à évaluer la pertinence des pistes de missions identifiées. On parle de phase de convergence.
  • Rappelons que l'objectif n'est pas d'évaluer les missions en tant que telles (la plupart des pistes sont intéressantes), mais bien leur potentiel de succès au sein du cabinet.
  • La priorisation des idées.
  • A l'issue des deux premières phases, le cabinet dispose de la liste des pistes de missions les plus prometteuses qui vont être explorées (c'est-à-dire approfondies, enrichies, modélisées, testées...).
  • Dans la mesure où il n'est pas raisonnable et efficace de lancer tous les chantiers simultanément, il faut déterminer l'ordre dans lequel ces pistes vont être explorées. C'est l'objectif de ce troisième temps.

De l'idée à la facture

Une fois les missions les plus pertinentes identifiées et priorisées, vient alors la phase de création de la mission proprement dite, qui comprend les étapes suivantes : finalisation de l'offre, modélisation de la mission, vente de la mission et, enfin, organisation et adaptation du cabinet [4].

L'étude des Moulins n'a pas vocation à aborder cet aspect méthodologique largement traité dans les différents travaux et études de la profession. Le lecteur intéressé pourra se reporter aux ouvrages, articles et actes de congrès qui sont légion sur la question.

Les conditions de la réussite

Inutile de se mentir, la démarche qui consiste à repenser l'offre du cabinet ne sera ni facile, ni rapide. D'ailleurs, si elle l'avait été, la plupart des cabinets auraient développé des offres de conseil depuis fort longtemps. Cela dit, c'est loin d'être impossible, mais pour y parvenir, les cabinets devront notamment : en avoir vraiment envie, être ambitieux, audacieux, opportunistes et agiles, mais aussi accepter l'échec...

Pour en savoir plus sur la démarche d'identification de nouvelles missions, rendez-vous sur le site des Moulins pour télécharger l'étude.

Téléchargez l'étude du Think Tank Les Moulins : « quelles missions demain ? »

Philippe Barré
Expert comptable et Commissaire aux Comptes    
b-ready - Conseil et accompagnement des professions réglementées

Ludovic Melot
Consultant de la profession comptable
b-ready - Conseil et accompagnement des professions réglementées

[1] Librement téléchargeable à l'adresse suivante : www.lesmoulins.club

[2] Au risque de ne pas être très original, rappelons qu'une « bonne mission » est une mission, qui est utile au client (et dont le prix est en rapport avec l'utilité qu'il en perçoit), tout en permettant au cabinet de réaliser un chiffre d'affaires rentable.

[3] Sauf pour les personnes ayant une grande expérience de la méthode.

[4] L'étude des Moulins n'a pas vocation à aborder cet aspect méthodologique largement traité dans les différents travaux et études de la profession. Le lecteur intéressé pourra se reporter aux ouvrages, articles et actes de congrès qui sont légion sur la question et notamment dans « Les missions d'accompagnement et de conseil : mode d'emploi », Ordre des experts-comptables.