Évaluation et dépréciation monétaire : les écarts de change ont-ils réellement autant d'importance ?

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Dans des économies très imbriquées, il est très probable que les effets de variations des taux de change doivent globalement tendre à se compenser.

L'atout d'une dépréciation monétaire est généralement mis en avant dans la mesure où elle est censée rendre plus compétitives les exportations du pays dont la monnaie est dépréciée. Comme c'est souvent le cas dans les analyses présentées comme évidentes, il s'agit d'une approche très partielle sinon partiale et orientée.

Seules de rares entreprises dont l'activité est essentiellement orientée à l'exportation vont réellement en profiter (et quelques touristes).

Pour tous les autres, l'effet devrait être plutôt négatif en renchérissant les produits importés hors zone monétaire (zone euro et zone franc) : énergie, équipement des ménages et industriels, produits agricoles, textile,... Cela induit aussi une baisse du pouvoir d'achat interne et éventuellement à terme peser sur la compétitivité à cause du renchérissement du coût du travail s'il y a correction de la baisse du pouvoir d'achat et indirectement ensuite à cause de la détérioration des conditions de vie. Plus un pays est dépendant des importations et plus une dépréciation de sa monnaie aura un effet négatif sur son économie.

Par ailleurs, l'histoire nous montre que la tentation de l'autarcie a des effets encore plus néfastes.

Au passage signalons que les échanges dans les zones euro et franc ne sont pas impactés puisqu'il n'y a pas de change entre les pays de la zone euro et que la parité euro/franc est fixe dans la zone franc (XFA, XOF, XPF).

Pour les entreprises exportatrices, les grandes gagnantes supposées de l'opération, le gain espéré ne semble également pas aussi important que ce qu'il paraît, et cela d'autant plus que leur processus de production intègre beaucoup d'importations, ce qui va renchérir en particulier leur coût de revient.  Et cela est sans tenir compte des effets induits internes : augmentation des coûts pour les fournisseurs, sous-traitants, salariés,... qu'ils sont susceptibles d'être obligés à terme de répercuter d'une manière ou d'une autre.

Comme toujours les explications simples et manichéennes, aisément compréhensibles par tous, sont fausses et trompeuses. Il n'est en particulier pas possible de faire une analyse pertinente à partir d'un seul paramètre dans des économies systémiques complexes et interconnectées.



André Cavagnol
Consultant - Formateur - Auteur en management des organisations
Conseils en organisation, séminaires, conférences, cours
Direction de rapports de stage et de mémoires (DCG, DSCG).