Etat des lieux des technologies de l'intelligence artificielle dans la profession comptable

Article écrit par (6 articles)
Modifié le
9 125 lectures

Sous l'appellation d'intelligence artificielle, plusieurs technologies sont mises en ½uvre. Citons par exemple les réseaux neuronaux, l'apprentissage machine ou les robots conversationnels. Voyons voir plus en détail l'ensemble des technologies intégrées dans l'intelligence artificielle et quel est le degré d'utilisation de celles-ci dans la profession comptable.

Ce sujet étant en perpétuelle évolution, vos contributions sont les bienvenues !

L'intelligence artificielle est au croisement de 12 technologies, tel que l'illustre le schéma ci-dessous.

Commençons par décrire brièvement chaque technologie, en 3 phrases maximum chacune !

Description des technologies de l'intelligence artificielle

Les réseaux neuronaux [i] sont constitués de plusieurs couches de traitements dans lesquels sont analysées des données en entrée. Après un premier passage pour déterminer les données en sortie, le processus est renouvelé vers l'arrière pour déterminer les poids de chaque synapse afin de diminuer l'erreur du modèle. Ce processus est renouvelé des millions de fois, selon la taille du réseau neuronal, pour obtenir une erreur minimale.

Les systèmes autonomes sont inspirés du système nerveux autonome humain, qui descend la colonne vertébrale et fait fonctionner nos organes de manière autonome (yeux, poumons, c½ur, etc.). Appliqué à une entreprise, il s'agit des travaux de maintenance informatique pouvant être automatisés [ii] (exemple : analyse des journaux d'erreurs, des journaux d'accès et diagnostic des anomalies).

Un agent virtuel reconnaît les requêtes formulées verbalement par un utilisateur afin de l'orienter soit vers une réponse pré-enregistrée (exemple : récupération de mot de passe) soit vers un agent humain. Il s'agit également de Siri, Cortana ou Alexa.

L'apprentissage automatique correspond aux méthodes statistiques utilisées afin de permettre aux machines « d'apprendre ». Il s'agit par exemple de la régression logistique.

La reconnaissance d'image s'est développée via les techniques d'apprentissage profond afin d'identifier les sujets figurant sur une image (exemple : animaux, logos, etc.), avec un taux d'erreur le plus bas possible.

La représentation des connaissances [iii] est comment représenter une base de connaissances et comment rechercher des informations (émettre des requêtes) au sein de celle-ci.

Le traitement automatique du langage naturel [iv] regroupe l'algorithmique relative à l'analyse du langage naturel. L'exemple fourni en fin de l'article se base sur un algorithme de 9 étapes.

Autant l'apprentissage automatique peut être considéré comme une technique mathématique d'optimisation, autant le raisonnement machine [v] est utilisé dans le cadre de la résolution de problèmes nécessitant un raisonnement abstrait. Elle se base sur les connaissances acquises par la machine pour résoudre de nouveaux problèmes, au contraire de l'apprentissage automatique (exemple : AlphaGo ne peut pas jouer aux échecs).

Le robot conversationnel, ou chatbot, est un automate de réponse à une conversation écrite. Il est basé sur des textes pré-programmés. Pareil pour les réponses reçues de l'utilisateur, elles doivent entrer dans un cadre préparé à l'avance.

L'apprentissage profond est une branche de l'apprentissage automatique. Il s'agit principalement des algorithmes et méthodes statistiques liés aux réseaux de neurones.

La reconnaissance automatique de la parole regroupe les techniques et les méthodes visant à traduire en texte informatique le langage parlé.

La vision par ordinateur ou comment paramétrer les machines pour qu'elles puissent analyser des images en vue, par exemple, de reconnaissance faciale ou d'analyse de mouvements.

Application à la profession comptable

À l'heure actuelle, les utilisations de l'intelligence artificielle à la profession comptable sont multiples.

Cela va par exemple de la reconnaissance des facturettes, utilisation de la technologie de reconnaissance d'images, en vue de la réalisation et la comptabilisation des notes de frais avec une synchronisation avec les comptes bancaires. Il s'agit d'applications telles que Cleemy, Concur, Evoliz, Expensya, Expensify, Izyfrais, Jenji, N2F, Onexpense, Rydoo, Spendesk ou Tiime.

La technique des réseaux neuronaux est utilisée, quant à elle, pour identifier quelles sont les écritures à comptabiliser suite à la reconnaissance des caractères et images composant la facture. Cela peut permettre d'identifier le taux de TVA, le fournisseur, le type de prestation, la devise, le type de document etc.

Ensuite, il s'agit de synchroniser les comptes bancaires professionnels, de pré-catégoriser les opérations bancaires et de récupérer automatiquement les factures. On pense à des applications telles que Cegid (en partenariat avec Xerox), Conciliator, Loop, Wity ou Yooz.

Et demain ?

Il ne s'agit en effet que d'un maigre échantillon de ce que peut permettre l'intelligence artificielle. Cependant, l'idée n'est pas d'utiliser à tout prix les technologies de l'intelligence artificielle mais plutôt de voir comment elles pourraient améliorer les travaux actuels des experts-comptables, voire quels nouveaux services elles nous permettraient de proposer.

Par exemple, à ce niveau-là, Cegid gère environ 4 millions de bulletins de paie. Dans un PoC (proof of concept) réalisé avec Microsoft, l'éditeur a exploité ces données - anonymisées - pour déterminer des taux de rotation de personnels, industrie par industrie, fonction par fonction ou région par région. Grâce aux services de Machine Learning d'Azure, Cegid a pu faire du prédictif sur les démissions à venir.

L'intelligence artificielle peut-être utilisée également dans la détection des anomalies et des anormalités : une facture trop élevée par rapport aux précédentes, un document manquant, un début de fraude.

Elle aura aussi un rôle, toujours chez Cegid, dans les interfaces pour améliorer l'expérience utilisateurs. « Le logiciel peut déterminer que, habituellement, vous faites telle tâche le mardi et donc vous présenter une page personnalisée si l'on est mardi ».

On pense aussi aux chatbots, soit pour répondre aux questions en langage naturel des utilisateurs, soit pour amener de manière plus fine du contenu de manière proactive (sur la Déclaration Sociale Nominative ou les changements fonctionnels qu'induit le Prélèvement à la Source).

S'agissant de la représentation des connaissances, l'intelligence artificielle peut apporter une nette contribution à l'exercice de veille réglementaire. A titre d'exemple, dans le domaine de la réglementation bancaire, il existe l'application RegMind, qui va puiser dans toutes les sources d'information réglementaire (ACPR, Code monétaire et financier, BCE, BIS, etc.) pour en donner un condensé et visualiser les changements intervenus par rapport à la réglementation précédente.

[i] Pour une description plus détaillée, voir la vidéo de Brandon Rohrer : www.youtube.com

Pour tester de manière pratique le fonctionnement d'un réseau de neurones : www.playground.tensorflow.org

[ii] A titre d'exemple, la prestation d'IP_Soft : www.slideshare.net

[iii] Pour plus de détails : www.slideshare.net

[iv] Pour le fonctionnement étape par étape : www.medium.com

Pour tester sur des phrases personnelles : www.explosion.ai

[v] Un article de référence sur le sujet, par Léon Bottou, chercheur IA Facebook : www.arxiv.org [PDF]



Laurent Lanzini
Diplômé d'expertise comptable, Directeur Associé au sein du cabinet de conseil Ailancy, cabinet spécialisé dans la transformation organisationnelle et la stratégie opérationnelle dans le secteur des services financiers (banque et assurance).