De nouveaux concurrents au sein et en dehors de la profession comptable

Article écrit par (73 articles)
Modifié le
13 730 lectures
Dossier lu 44 421 fois

Concurrence au sein de la profession



Le low-cost

L'arrivée des cabinets « low-cost » a fait grand bruit au sein de la profession. Leurs offres ont incontestablement tiré les prix vers le bas [1]. Les taux de marge ont également chuté, passant de 11% avant la crise à 9.7% sur l'exercice 2012/2013. La crainte de l'expansion de ce type de modèle peut donc paraître justifiée.

Mais la profession comptable n'est pas la première à affronter le modèle du low-cost. Il est donc possible d'écarter les craintes et fantasmes pour tirer leçon des secteurs économiques qui ont déjà subi ce bouleversement.

Premièrement, les offres low-cost ne cannibalisent généralement pas les offres existantes. Au contraire, selon l'étude des Moulins, elles convertissent plutôt « une nouvelle clientèle qui n'utilisait pas l'offre de référence, le plus souvent grâce à un prix plus attractif et/ou plus transparent. L'exemple type est celui des compagnies aériennes low-cost, qui ont attiré nombre de personnes qui ne prenaient pas l'avion du fait de prix trop élevés. » [2]. Attention toutefois, les entreprises low-cost n'ont souvent pas vocation à maintenir des prix bas et des marges faibles. Les entreprises qui ont conquis des parts de marché par le low-cost accroissent ensuite leurs parts de marché en montant en gamme. On peut citer par exemple le cas d'Easyjet, Ryanair, ou même Lidl [3].

L'expertise comptable est actuellement confrontée au low-cost, dans sa première phase, la conquête de parts de marchés par les prix. Les professionnels de l'expertise comptable ont tout intérêt à réagir dès à présent. Les cabinets low-cost se positionnent clairement sur la mission comptable « traditionnelle ». Le Conseil supérieur résume clairement les deux options qui s'offrent aux experts-comptables :

In fine, les attentes [des chefs d'entreprises] vis-à-vis de leurs prestataires (et, encore une fois, les experts-comptables n'échapperont pas à la règle) ne sont pas les mêmes, avec notamment une demande qui tend à se cliver autour de deux grands types de prestations:

- soit une prestation «basique» pour laquelle ils chercheront sans état d'âme le prix le plus bas possible;

- soit une prestation différenciée et à forte valeur ajoutée pour laquelle ils seront prêts (du moins la plupart d'entre eux) à mettre le prix. [4]

En d'autres termes, les experts-comptables peuvent regarder s'effriter la rentabilité de cette mission qui représente plus de deux tiers de leur chiffre d'affaires [5] ou choisir le terrain en positionnant leur offre sur le conseil.

Les plateformes

La création de plateformes en ligne qui viendraient s'appuyer sur la dématérialisation et l'automatisation peut se faire au sein même de la profession comptable. Là encore, il ne s'agit pas d'un risque virtuel, mais d'une réalité bien concrète. Citons deux exemples :

  • Self-Med, qui développe et commercialise un service informatique utilisable par les professionnels de santé (et leurs experts-comptables) pour répondre à leurs besoins en « tenue comptable, information financière en temps réel, finalisation et télédéclaration de la 2035 ». Le tout pour un tarif de 39,90 ¤ / mois.
    Cette entreprise a été fondée par des professionnels de santé et des experts-comptables.

  • Skreeb, le projet de Cyril Degrilart, vainqueur du concours « Top départ » organisé par QuickBooks.
    L'idée est de construire une plateforme qui mettrait en relation « des experts-comptables qui veulent travailler dans la comptabilité, des personnes qui ont envie de se délester de cette saisie comptable et potentiellement des clients, qui souhaitent [...] traiter leur comptabilité, sous la responsabilité d'un expert » [6]. Juridiquement, cette plateforme collaborative devrait être un cabinet d'expertise comptable. Elle ne constitue pas en elle-même un concurrent à proprement parler. Au contraire, ce projet peut devenir un véritable levier pour les cabinets qui veulent se libérer de la tenue des comptes et orienter leur activité vers le conseil.

Les cabinets vont toutefois devoir composer avec un autre type de concurrence, celle des nouveaux acteurs sur ce marché.

Concurrence d'intervenants extérieurs



L'ubérisation

C'est devenu une crainte généralisée et presque irrationnelle, une expression qui terrorise les monopoles bien établis : le phénomène « d'ubérisation ». Philippe Arraou, président en exercice du Conseil supérieur, le rappelait encore lors de la réunion des partenaires en vue du 71e Congrès, c'est un véritable risque pour la profession [7]. Les experts-comptables doivent prendre les devants pour éviter qu'une plateforme ne vienne se positionner entre eux et leurs clients, pour imposer un partage des marges. Mais le risque est-il réel ?

Pour répondre à cette question, le think tank « Les moulins » distingue dans son analyse trois types de prestations :

  • l'activité comptable traditionnelle ;
  • le conseil de proximité ;
  • le conseil sur-mesure.

Selon cette analyse, l'activité comptable traditionnelle est protégée par un monopole d'exercice qui ne semble pas remis en cause à court terme. Elle serait donc faiblement exposée au risque « d'ubérisation » par un intervenant extérieur à la profession.

Le conseil sur-mesure, a priori difficilement automatisable (voir : toutefois « Automatiser le conseil ? »), semble également exclu du terrain de jeu des « Uber » de l'expertise comptable. On constate donc que le risque « d'ubérisation » porte en fait sur le « conseil de proximité », qui répond à un besoin client tout en étant automatisable. Parmi les acteurs de ce segment de marché, on peut citer par exemple Rivalis, QuickBooks, ou Silae.

Le grand écart des visions : experts-comptables/prestataires
(source: 623-leblog.fr)

Les prestataires

L'ubérisation possible ou en cours de la profession ne doit pas masquer la concurrence présente des prestataires de la profession. De nombreuses entreprises ont été créées autour de certaines niches du conseil, non investies par les professionnels de l'expertise comptable. Citons par exemple l'expertise retraite, le recouvrement, ou la recherche d'aides publiques.

Mais ces différents prestataires ne pourraient-ils pas devenir des partenaires de la profession ? (voir : S'appuyer sur des partenaires missions).

Dossier rédigé par Marc Mrozowski, directeur de la rédaction experts-comptables chez LexisNexis et Julien Catanese, rédacteur en chef Lexis 360 Experts-comptables.

Dans l'exercice de son métier, l'expert-comptable est confronté à toutes les problématiques de l'entreprise. Il ne peut y répondre avec une documentation juridique classique. L'ambition de Lexis 360® Experts-Comptables est de l'accompagner avec des formats de contenus variés et adaptés (revues, documentation, fiches pratiques, Missions Lexis 360®, modèles de documents,...) couvrant toutes ses thématiques d'intervention en fiscal, social, comptable et juridique.

Au c½ur de cette ambition, les Missions Lexis 360® constituent une innovation éditoriale majeure. Elles permettent au professionnel d'entrer dans un écosystème lui offrant l'accès à tous les formats de contenus mais aussi la possibilité d'entrer en contact avec les partenaires métiers de LexisNexis.

Dans ce nouvel environnement, l'expert-comptable sera en mesure de développer son activité de conseil sur l'ensemble de la chaîne de valeur de ses clients.