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Coronavirus : soutenir encore plus nos PME TPE

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Catégorie : Actualité des métiers du chiffre
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Je souhaite que, pour les PME et TPE, il y ait un dispositif qui soit plus convergent avec l'arsenal Outre-Rhin

Alors que tout allait bien il y quelques semaines, l'impact économique de la crise sanitaire est sans précédent. En moins de 3 mois, c'est plus de la moitié de la planète qui est confinée, donnant un coup de frein très brutal à l'économie. Des chiffres anxiogènes sont égrenés quotidiennement.

Tout d'abord, le nombre de victimes du Coronavirus. Puis ceux du dévissage de l'économie mondiale : en France, cinq dernières années de croissance anéanties en seulement deux semaines, une prévision de récession 2020 la plus forte depuis 1945, aux Etats-Unis on redoute 20 millions de chômeurs.  A la différence des dernières crises qui l'avaient quelque peu épargné, le secteur des services est quasi à l'arrêt et ce sont déjà beaucoup de PME qui s'inquiètent pour leur survie.

 

Des milliards qui donnent le vertige

Face à ce véritable chaos, les Etats ont vite réagi avec des plans massifs de soutien : le G20 injecte 5000 milliards de dollars, la BCE débloque 750 milliards d'¤ et, pour la France, le Ministre de l'Economie et des Finances a annoncé jeudi 9 avril  que le plan d'urgence, initialement fixé à 45 milliards d'¤, est porté à 100 milliards d'¤. Tout en prenant soin de préciser que ces chiffres pourraient encore évoluer en fonction de la durée de la pandémie.

En France, le confinement a débuté le 16 mars. En tant qu'experts-comptables et commissaires aux comptes, cela fait un mois que nous sommes essayons d'aider au mieux nos 3 millions d'entreprises clientes. Et, au cours de ce mois qui vient de s'écouler, notre poste d'observateur privilégié nous permet de tirer déjà quelques constats et de d'émettre des recommandations.

Le dispositif de chômage partiel a été très largement utilisé pour 8 millions de salariés. Le Premier ministre a rappelé il y a quelques jours que notre pays avait été le plus généreux en la matière. C'est sans doute exact. Mais qu'en est-il des autres aides financières ? Osons la comparaison avec notre voisin Outre-Rhin. L'économie allemande est certes plus robuste mais le leadership de l'Union européenne est partagé entre ces deux pays.

 

Les plans de soutien des deux locomotives de l'Europe

La France et l'Allemagne proposent un système semblable de prêts garantis par l'Etat pour fournir un « pont aérien de cash » à leurs ETI et PME (respectivement, enveloppes de 300 et 400 milliards d'¤). Mais la différence essentielle réside dans le fait que l'Allemagne a décidé, depuis quelques jours, de porter la garantie de l'Etat à 100% alors qu'elle est toujours limitée entre 70% et 90% en France (en fonction de la taille de l'entreprise). Ainsi, l'Allemagne a corrigé un écueil du dispositif que nous subissons toujours chez nous : les banques refusent de prendre un risque, même résiduel à 10%, pour les dossiers qui ne présentent pas de bonne notation BDF ou de forte garantie de solvabilité. C'est en tout cas ce que nous constatons sur le terrain depuis que le PGE est commercialisé, privant ainsi de cash les entreprises qui en ont peut-être le plus besoin. C'est la raison qui nous a motivé ECF à lancer un observatoire PGE à tous les professionnels afin de mesurer les causes des refus. Un PGE qui sera structurellement plus difficile à obtenir chez nous puisque l'endettement des entreprises françaises a progressé de 12 points entre 2010 et 2018 alors que, sur la même période, il a baissé de 3 points dans la zone euro.

L'Allemagne a aussi prévu une enveloppe de 100 milliards d'¤ pour réaliser des opérations d'equity dans des PME et ETI, dont le chiffre d'affaires dépasse 50 millions d'¤. Des apports de fonds propres par des prises de participation ont été annoncées jeudi dernier par Bercy, mais avec une enveloppe limitée à 20 milliards d'¤ et dont la cible est  la recapitalisation d'entreprises stratégiques. Ce sera certainement le cas pour Air France mais pas pour nos PME et ETI.

Mais, concernant le plan de soutien de l'économie déployé par ces deux pays, le point le plus différenciant concerne les TPE. En France, leur poids est significatif : elles sont plus de 2 millions et elles produisent 17% de la valeur ajoutée de l'économie nationale. Beaucoup de ces TPE sont déjà en danger avec des trésoreries qui se tendent après un mois de confinement, puisqu'elles sont par nature fragiles et, ayant en moyenne peu de salariés, n'ont pas profité des économies de chômage partiel. Initiée avec seulement un milliard de fond, l'enveloppe concernant le fonds de solidarité vient d'être corrigée à 6.5 milliards d'¤. Alors que l'Allemagne a mis 50 milliards d'¤ sur la table pour soutenir ses TPE... Sur le terrain, la différence est nette : nous avons beaucoup de mal à obtenir les aides mensuelles de 1 500¤ pour beaucoup de nos clients. Alors qu'en Allemagne, avec des conditions d'obtention plus souples, beaucoup de TPE ont déjà perçu des aides substantielles, s'élevant jusqu'à 9 000¤/mois pour les entreprises jusqu'à 5 salariés et jusqu'à 15 000¤/mois pour celles qui comptent jusqu'à 10 salariés. La différence est de taille, le fonds de solidarité français n'est pas du tout à l'échelle des besoins des TPE.

 

Des ajustements urgents si on veut garder une grande partie de notre tissu d'entreprises

On peut comprendre que le gouvernement ait besoin de recul pour ajuster au mieux toutes ces aides. Mais il y a vraiment urgence ! Et, ce que nous observons aussi sur le terrain, c'est l'inquiétude de plus en plus forte chez les chefs d'entreprise avec un confinement qui dure et des trésoreries qui s'amenuisent. Sans parler de certains secteurs comme l'événementiel, l'hôtellerie ou la restauration qui savent déjà que le retour à une activité normale sera long.

La crise du Coronavirus  que nous vivons est différente de toutes les précédentes. Pour combattre ses effets dévastateurs au niveau économique, il ne peut pas y avoir de demi-mesures et le gouvernement doit s'assurer qu'il met en place un véritable « bouclier anti-crise » afin de contenir le maximum de défaillances d'entreprises. Et ce « quel qu'en soit le coût » tel que l'a énoncé le Président de la République le 12 mars dernier. Depuis hier soir, nous connaissons l'échéance du confinement. Emmanuel Macron, au cours de son allocution, a annoncé qu'il y aurait de nouvelles aides pour les entreprises. Je souhaite que, pour les PME et TPE, il y ait un dispositif qui soit plus convergent avec l'arsenal Outre-Rhin. Cette crise économique coûtera très chère aux Etats avec une explosion des dettes publiques. La France ne fera pas exception mais, quelquefois, il s'agit de choisir le moins pire des remèdes.

Maintenant, il convient déjà de préparer l'« après 11 mai ». Le plan de soutien devra être complété d'un plan de reprise et assurer le niveau de l'offre ainsi que de la demande. Les prochains mois seront cruciaux pour beaucoup d'entreprises et, aux cotés des chefs d'entreprise, les professionnels du chiffre et leurs équipes resteront totalement investis pour limiter le volume de défaillances, toujours synonymes de pertes de valeur et aussi quelquefois privatives de futures pépites.

Jean-Luc FLABEAU

Jean-Luc FLABEAU
Président de la Fédération nationale ECF


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