Au Royaume-Uni, les Big 4 s'opposent au projet d'audit partagé du gouvernement

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Le gouvernement britannique poursuit son objectif de réforme du marché de l'audit au Royaume-Uni. En mars dernier, il avait ainsi soumis son projet de réforme et ses propositions à consultation publique, avec notamment la mise en place d'un audit partagé pour les sociétés cotées.

Une proposition rejetée par les Big 4 dans leurs réponses à cette consultation, qui vient de se terminer.

Les scandales BHS, Carillion, ou Thomas Cook, mais aussi les alertes successives du régulateur de l'audit ont convaincu le gouvernement britannique. Son projet de réforme, soumis à consultation publique en mars, affiche donc des objectifs ambitieux :

  • améliorer la qualité de l'audit, jugée insuffisante par le régulateur ;
  • adapter le « produit d'audit » aux attentes du marché ;
  • et mettre fin au manque de concurrence du secteur (les Big 4 auditent la totalité des entreprises du FTSE 100 et plus de 90% de celles du FTSE 250. 

Pour une synthèse des principales propositions de ce rapport, voir notre article « Les propositions du gouvernement britannique pour rétablir la confiance dans l'audit ».

Concernant ce dernier point, le gouvernement prévoit de recourir plus largement au « managed shared audit », proche du co-commissariat à la française. Concrètement, les sociétés du FTSE 350 seraient tenues de nommer un second cabinet d'audit, plus petit, pour effectuer une « proportion significative » de la certification des comptes. Pour le gouvernement, c'est une manière d'accroître la concurrence sans faire peser la responsabilité entière de l'audit sur des structures d'audit plus petites, et ne disposant pas toujours des moyens nécessaires.

S'ils disent soutenir l'esprit de la réforme, les Big 4 s'opposent à ce projet de co-commissariat. 

Une opposition unanime des Big 4 au projet de « managed shared audit » 

Selon le Financial Times, qui a consulté les résumés de leurs réponses à la consultation, Deloitte, EY et PwC s'opposent clairement aux audits partagés, KPMG déclarant pour sa part ne disposer d'aucune preuve qu'un tel dispositif améliorerait la qualité de l'audit.

Dans le détail, Michelle Hinchliffe, directrice de l'audit chez KPMG, juge que les audits partagés pourraient entraîner des doublons dans l'accomplissement des diligences et une augmentation des coûts pour les entreprises.

De son côté, Stephen Griggs, directeur de Deloitte UK, met en garde le gouvernement contre l'effet d'une telle mesure sur l'attractivité du Royaume-Uni auprès des entreprises cotées. Selon lui, le risque est aussi de ne pas trouver suffisamment de plus petits cabinets d'audit volontaires pour participer à la certification des comptes des entreprises cotées.

Quelles sont les propositions des Big 4 ? 

PwC, cabinet d'audit le plus présent auprès des entreprises du FTSE 350, et qui a donc potentiellement le plus à perdre dans cette réforme, a quant à lui déclaré au Financial Times que ni les « managed shared audits » ni un quelconque plafond des mandats n'amélioreraient la qualité de l'audit. Une position proche de celle de KPMG, qui s'interrogerait à la fois sur l'efficacité du co-commissariat et sur le fonctionnement d'un dispositif de plafonnement du nombre de mandats.

Deloitte et EY préféreraient un plafonnement du nombre de mandats pouvant être exercés par les cabinets d'audit auprès des entreprises du FTSE.

Le ministère britannique n'a pas encore indiqué quand sera publiée sa réponse aux propositions du public suite à cette consultation.



Julien Catanese Aubier
Diplômé d'expertise comptable, après 7 ans en tant que rédacteur en chef puis directeur de la rédaction Fiscalistes et experts-comptables chez LexisNexis, Julien rejoint l'équipe Compta Online en tant que Directeur éditorial de juin 2020 à octobre 2023.