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La rupture conventionnelle : quel bilan ?

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Catégorie : Actualité sociale
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Une variante située entre le licenciement et la démission : c'est à cela que la rupture conventionnelle peut être comparée.

Pour être plus précis, cette procédure permet à l'employeur et au salarié de convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie. Mais, deux ans et demi après son instauration, quel bilan peut-on en tirer ?

C'est ce que nous allons voir en analysant, dans un premier temps, les avantages. Puis, dans un second temps, nous aborderons les limites.

Les avantages

Pour le salarié

Au niveau du salarié, ce type de rupture permet de ne pas être « licencié ». De ce fait, les conséquences ne sont pas les mêmes, car dans l'esprit de chacun un licenciement aura davantage une connotation négative, par rapport à la rupture conventionnelle. Cette situation donne plus une impression d'équilibre employeur/salarié : gérer une rupture de contrat à l'amiable, est plus simple pour les deux parties.

Mais les avantages ne s'arrêtent pas uniquement à l'aspect moral. Le décret instaurant la rupture conventionnelle a prévu deux contreparties pour le salarié :

  • Une indemnité équivalente à l'indemnité de licenciement (sauf disposition conventionnelle plus favorable), comme cela est stipulé à l'article R1234-2 du Code du Travail :
    L'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d'ancienneté, auquel s'ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d'ancienneté.

    Une négociation pour une indemnité supérieure à l'indemnité légale ou conventionnelle, est également possible. Il faut également préciser que cette indemnité n'est ni soumise aux cotisations de Sécurité Sociale, ni à l'impôt sur le revenu.

  • Une ouverture des droits aux chômages dès la rupture du contrat.

Ce sont des avantages non négligeables pour le salarié. Mais qu'en est-il pour l'employeur ?

Pour l'employeur

Du point de vue des employeurs, la rupture conventionnelle rassemble à elle seule trois qualités :

Elle est simple.

C'est-à-dire qu'elle peut être mise en place pour n'importe quel motif. Ce qui n'est pas le cas du licenciement qui doit avoir un caractère réel et sérieux.

De plus, hormis la procédure à respecter de manière « stricto sensu », il faut avouer que le formalisme est simple. Toujours en comparaison avec le licenciement, où une mesure de reclassement au sein de l'entreprise doit être proposée. Ce qui n'est pas le cas de la rupture conventionnelle.

Elle est peu coûteuse.

Le droit du travail en termes de licenciement, étant évité (notamment en qui concerne la Convention de Reclassement Personnalisée (CRP)), l'économie pour l'entreprise n'est pas négligeable. Et cela, malgré l'indemnité pour rupture conventionnelle qui est à verser.

Mais du fait qu'il y ait un consentement mutuel entre les parties, le risque de contestations éventuelles, reste faible.

Elle est sûre.

L'objectif à atteindre par la mise en place de ce dispositif est de sécuriser les ruptures du contrat de travail. Ceci, dans le but de voir une baisse significative des contentieux au niveau des licenciements pour motif personnel.

Mais après deux ans et demi d'application, certaines limites se font déjà sentir.

Les limites

Certains employeurs profitent de ce système pour rompre les contrats de travail de leur salarié, en leur mettant « la pression ».

A titre d'exemple, et selon le site France Info, une collaboratrice d'un cabinet comptable du Val d'Oise s'est vue imposer la rupture conventionnelle par son employeur, après son congé maternité. Le prétexte invoqué est que le licenciement ternirait son cv pour sa recherche d'emploi. Les conditions de travail rendues très difficiles pour cette salariée, elle a finalement cédé aux pressions et signé la rupture conventionnelle. Ceci tend à prouver que des abus réels existent en la matière.

Mais ce qu'il faut également souligner est l'aspect consentement mutuel entre les parties, qui est un des éléments majeurs, pour ce type de rupture. Cela rend toute contestation en justice, très difficile, et implique qu'il faille apporter la preuve :

  • Soit que la convention ait été signée de force,
  • Soit qu'il y ait un vice de consentement dans la procédure.

De toute évidence, ce type de preuve est très difficile à apporter devant la justice.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes : seulement une dizaine de contentieux pour plus de 500000 dossiers signés. C'est le constat fait par David Métin du Syndicat des Avocats de France. Il précise également que pour lui, la « rupture conventionnelle est une porte ouverte aux dérives ». Cela passe dans certains cas, par des « licenciements déguisés ».

A ce titre, selon un article paru dans Les Echos du 08 Février 2011, l'inspection du travail constate de nouveaux abus, notamment dus aux ruptures conventionnelles. Le travail qui leur est demandé, est à titre d'exemple, de vérifier qu'il n'y ait pas de « licenciements de salariés protégés déguisés en rupture conventionnelle ».

Par conséquent, l'Administration prend pleinement conscience des limites de ce type de procédé. Certes, le législateur souhaitait initialement simplifier les ruptures de contrat de travail, mais la rupture conventionnelle est victime de son succès et créé d'elle-même des abus, difficilement chiffrables.

A noter : Pour mettre en place cette procédure, des délais sont à connaître. Vous retrouverez tous les détails sur le site du Ministère du Travail, de l'Emploi et de la Santé.

Pour ce qui est de l'homologation, vous retrouverez un modèle sur le site Legifrance.

Vénaïg Le Bris

Vénaïg Le Bris est diplômée d'expertise comptable et inscrite à l'Ordre des experts-comptables de Bretagne.


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